L'ancien Président de la Province-Nord Leopold Jorédié est mort ce dimanche matin à l'âge de 66 ans. Ancien militant de l'Union Calédonienne et lieutenant de Jean-Marie Tjibaou et d'Eloi Machoro, il aura marqué d'une empreinte décisive les premiers pas de la province-Nord.
La semaine aura été lourde pour les figures historiques de la Nouvelle-Calédonie contemporaine. Car, à 6 jours d'intervalle, ce sont deux figures de la politique du pays qui ont quitté les rivages du Pacifique pour l'éternité. Après Dick Ukeiwë, inhumé vendredi après une série d'hommages unanimes, c'est Léopold Jorédié - "Léo" pour beaucoup de Calédoniens- qui a tiré, ce matin, sa révérence, à l'âge de 66 ans.
L'homme, originaire de Canala, y commence sa carrière à l'UC, en 1977. L'année où, précisément, l'Union Calédonienne opte pour "l'indépendance kanak et socialiste", l'IKS, sous la férule de Jean-Marie Tjibaou, créateur, deux ans plus tôt, du festival Mélanesia 2000". Mais c'est à partir de 1983 , lorsqu'il devient maire-adjoint de Canala, et surtout de 1984, avec la création du FLNKS, qu'il connaît une ascension politique fulgurante.
Après la mort d'Eloi Machoro, en janvier 85, il devient ministre de la sécurité du "gouvernement provisoire de Kanaky". Puis il est choisi - déjà- pour mener la bataille dans l'une des 4 régions issues du statut Pisani, celle du centre, là où les jeux sont loin d'être faits. A la surprise générale - et grâce aux divisions du camp opposé à l'indépendance - il y est élu. Il y siègera , ainsi qu'au Congrès de la Nouvelle-Calédonie, jusqu'aux événements dramatiques de 1988 où il participe aux négociations avec les preneurs d'otages d'Ouvéa.
Après les tragiques événements de Gossanah et la mission du dialogue qui s'en suit, quelques semaines plus tard, vient enfin le temps de la paix et, progressivement, de la réconciliation. D'abord très sceptique vis à vis de la démarche - il aura des mots très durs à l'encontre de Jean-Marie Tjibaou durant les premières négociations - il devient le défenseur de ces accords et participe activement à leur concrétisation durant les 10 ans passées à la tête de la Province-Nord, entre 1989 et 1999. Il hérite, en effet, du fauteuil initialement prévu pour Jean-Marie Tjibaou , assassiné à Ouvéa en mai 1989, un an après la tragédie de Gossanah, lors de la cérémonie de levée de deuil où Yeiwene Yeiwene perd également la vie. Il se dit alors que Léopold Jorédié était également visé.
A la tête de l'exécutif provincial, il développe progressivement cette province avec un maître mot: le rééquilibrage. Le rachat , en juillet 1990, par la SOFINOR de 85 % des parts de la SMSP, détenu alors par Jacques Lafleur est un acte fondateur dont on mesure aujourd'hui l'importance stratégique pour la Province et pour le pays. Parmi les réalisations fortes de la décennie, on retiendra aussi la Koné-Tiwaka qui désenclave la côte-est et la réalisation de plusieurs complexes hôteliers (Poum et Hienghène ).
Autrefois considéré comme un dur du FLNKS, Léopold Jorédié devient un partisan, avec François Burck, du dialogue réaliste avec le RPCR. Ce qui lui vaudra une mise à l'écart progressive du FLNKS et de l'Union Calédonienne. Il s'éloigne progressivement du FLNKS pour fonder, avec François Burck et Raphaël Mapou, la FCCI, Fédération des Comités de Coordination Indépendantiste, suspectée à l'époque par ses ennemis, d'être une création de Jacques Lafleur ou, tout au moins, de servir les intérêts du RPCR. Ce qui lui vaudra d'être battu, lors des élections provinciales de mai 1999, par le leader du Palika Paul Néaoutyine, leader du Palika. La création de la FCCI lui permettra d'obtenir un poste de vice-président du gouvernement collégial de la Nouvelle-Calédonie, chargé de l'enseignement, sous Jean Lèques. Il sera ensuite chargé des affaires coutumières sous le gouvernement Frogier.
Malgré des initiatives intéressantes dans le domaine de l'enseignement, la création de la FCCI ne lui réussit pas et une série d'affaires l'amenant directement au tribunal - avec plusieurs condamnations - commencent à ternir sa réputation. Le coup de grâce politique viendra en mai 2004 lorsque la liste qu'il conduit aux élections provinciales n'arrive qu'en 5 ème position.
Dès lors, Léopold Jorédié, totalement blanchi de nouvelles accusations portées contre lui en 2007, se fera discret. A peine fera -t-il quelques déclarations appelant au destin commun et à dépasser les clivages politiques traditionnels. Il sera, à l'époque, peu entendu.
Des propos qui, aujourd'hui, résonnent de manière prophétique. Sur ce point, Lépolold Jorédié avait, à l'évidence, quelques longueurs d'avance...
gonzague.delabourdonnaye@francetv.fr
Une carrière politique qui débute aux côtés de Jean-Marie Tjibaou
L'homme, originaire de Canala, y commence sa carrière à l'UC, en 1977. L'année où, précisément, l'Union Calédonienne opte pour "l'indépendance kanak et socialiste", l'IKS, sous la férule de Jean-Marie Tjibaou, créateur, deux ans plus tôt, du festival Mélanesia 2000". Mais c'est à partir de 1983 , lorsqu'il devient maire-adjoint de Canala, et surtout de 1984, avec la création du FLNKS, qu'il connaît une ascension politique fulgurante.
Après la mort d'Eloi Machoro, en janvier 85, il devient ministre de la sécurité du "gouvernement provisoire de Kanaky". Puis il est choisi - déjà- pour mener la bataille dans l'une des 4 régions issues du statut Pisani, celle du centre, là où les jeux sont loin d'être faits. A la surprise générale - et grâce aux divisions du camp opposé à l'indépendance - il y est élu. Il y siègera , ainsi qu'au Congrès de la Nouvelle-Calédonie, jusqu'aux événements dramatiques de 1988 où il participe aux négociations avec les preneurs d'otages d'Ouvéa.
1988: un tournant dans la vie politique de Léopold Jorédié
Après les tragiques événements de Gossanah et la mission du dialogue qui s'en suit, quelques semaines plus tard, vient enfin le temps de la paix et, progressivement, de la réconciliation. D'abord très sceptique vis à vis de la démarche - il aura des mots très durs à l'encontre de Jean-Marie Tjibaou durant les premières négociations - il devient le défenseur de ces accords et participe activement à leur concrétisation durant les 10 ans passées à la tête de la Province-Nord, entre 1989 et 1999. Il hérite, en effet, du fauteuil initialement prévu pour Jean-Marie Tjibaou , assassiné à Ouvéa en mai 1989, un an après la tragédie de Gossanah, lors de la cérémonie de levée de deuil où Yeiwene Yeiwene perd également la vie. Il se dit alors que Léopold Jorédié était également visé.
A la tête de l'exécutif provincial, il développe progressivement cette province avec un maître mot: le rééquilibrage. Le rachat , en juillet 1990, par la SOFINOR de 85 % des parts de la SMSP, détenu alors par Jacques Lafleur est un acte fondateur dont on mesure aujourd'hui l'importance stratégique pour la Province et pour le pays. Parmi les réalisations fortes de la décennie, on retiendra aussi la Koné-Tiwaka qui désenclave la côte-est et la réalisation de plusieurs complexes hôteliers (Poum et Hienghène ).
1999: l'éloignement du FLNKS et la création de la FCCI
Autrefois considéré comme un dur du FLNKS, Léopold Jorédié devient un partisan, avec François Burck, du dialogue réaliste avec le RPCR. Ce qui lui vaudra une mise à l'écart progressive du FLNKS et de l'Union Calédonienne. Il s'éloigne progressivement du FLNKS pour fonder, avec François Burck et Raphaël Mapou, la FCCI, Fédération des Comités de Coordination Indépendantiste, suspectée à l'époque par ses ennemis, d'être une création de Jacques Lafleur ou, tout au moins, de servir les intérêts du RPCR. Ce qui lui vaudra d'être battu, lors des élections provinciales de mai 1999, par le leader du Palika Paul Néaoutyine, leader du Palika. La création de la FCCI lui permettra d'obtenir un poste de vice-président du gouvernement collégial de la Nouvelle-Calédonie, chargé de l'enseignement, sous Jean Lèques. Il sera ensuite chargé des affaires coutumières sous le gouvernement Frogier.
Malgré des initiatives intéressantes dans le domaine de l'enseignement, la création de la FCCI ne lui réussit pas et une série d'affaires l'amenant directement au tribunal - avec plusieurs condamnations - commencent à ternir sa réputation. Le coup de grâce politique viendra en mai 2004 lorsque la liste qu'il conduit aux élections provinciales n'arrive qu'en 5 ème position.
Dès lors, Léopold Jorédié, totalement blanchi de nouvelles accusations portées contre lui en 2007, se fera discret. A peine fera -t-il quelques déclarations appelant au destin commun et à dépasser les clivages politiques traditionnels. Il sera, à l'époque, peu entendu.
Des propos qui, aujourd'hui, résonnent de manière prophétique. Sur ce point, Lépolold Jorédié avait, à l'évidence, quelques longueurs d'avance...
gonzague.delabourdonnaye@francetv.fr