Il a fallu attendre 155 ans pour qu'une femme inscrive son nom au palmarès de la coupe de Melbourne, la mythique course hippique, qui se déroule chaque premier mardi de novembre dans la capitale du Victoria, en Australie...
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Avant de triompher avec son cheval Prince of Penzance, Michelle Payne a dû affronter le scepticisme d'un milieu très machiste, les réserves de sa famille, et plusieurs événements tragiques. Âgée de 30 ans, elle est la cadette de 10 enfants. Elle a perdu sa mère alors qu'elle n'avait que six mois. C'est donc son père, Paddy Payne, qui a élevé les enfants, qui travaillent tous dans le domaine des courses de chevaux. C'est dans sa maison de Ballarat, à une centaine de kilomètres au nord de Melbourne, qu'il a suivi la victoire de sa fille, mardi : « Elle a fait plusieurs mauvaises chutes et on a essayé de lui dire d'arrêter, mais elle a continué et elle en est récompensée, aujourd'hui. On a eu quelques beaux succès dans la famille, mais aussi pas mal de coups durs. On est très proches les uns des autres, mes enfants s'entendent bien entre eux, ce qui me ravit. »
Michelle Payne a notamment souffert d'une fracture du crâne après une mauvaise chute en 2004. Trois ans plus tard, sa sœur Brigid a fait une chute mortelle lors d'un entraînement. Patrick Payne, le frère de Michelle, a lui aussi participé à la coupe de Melbourne par le passé. Il se dit très fier de la victoire de sa sœur : « Elle ne doit sa victoire qu'à elle-même. On l'a critiquée toute sa vie, on lui a dit qu'il fallait qu'elle abandonne, mais c'est une rebelle, elle nous a dit qu'elle adorait ça. Elle nous prouve qu'on avait tort, bravo à elle ! »
Un autre de ses frères a participé à sa victoire : Stevie Payne. Trisomique, il travaille au sein de l'écurie de Darren Weir, l'entraîneur de Michelle Payne. Elle a partagé la victoire avec lui, mardi, à l'hippodrome de Flemington : « Stevie est une bénédiction pour notre famille. Mon père m'a dit que quand il est né, tout le monde lui disait 'oh, je suis tellement désolé pour toi'. Mon père déteste les gens qui lui disent ça. Stevie est heureux en permanence, il n'y a pas une once de méchanceté en lui. C'est vraiment super de partager cet événement avec lui. »
Cette victoire historique, Michelle Payne ne la doit pas qu'à son courage et à sa famille. Elle est reconnaissante envers son entraîneur, qui l'a engagée elle, une femme, alors que beaucoup d'autres lui ont tourné le dos. Elle entend bien profiter de sa victoire pour faire changer le monde des courses de chevaux : « C'est un sport dominé par les hommes, les gens pensent qu'on n'est pas assez fortes et bla bla bla… Vous savez quoi ? Il ne s'agit pas que de force, il y a beaucoup plus de choses qui entrent en jeu - faire en sorte que le cheval trouve le bon rythme, le pousser à se démener pour vous, être patient… Je suis tellement heureuse de remporter cette coupe de Melbourne et j'espère que ça va aider les femmes jockey à avoir leur chance. »
Michelle Payne se laisse le temps de savourer sa victoire, mais pense déjà à la suite. Elle arrêtera bientôt la compétition pour devenir entraîneure.