A Orléans, le BRGM teste des bactéries naturelles pour extraire du nickel et du cobalt à partir des minerais calédoniens [et c'est bon pour la planète]

Un géologue et chimiste du BRGM teste des bactéries naturelles dans un réacteur contenant du minerai de nickel et de cobalt de la Nouvelle-Calédonie
La chimie verte est l'un des défis de demain : pour parvenir à extraire les métaux, rares ou non, contenus dans les mines calédoniennes. L’une des recherches les plus innovantes fait appel à des bactéries naturelles. Elle est financée par l'Union européenne et la France.

Extraire du nickel et du cobalt encore plus proprement, récupérer les métaux contenus dans la terre calédonienne. Ce sera possible dans quelques années grâce aux travaux de recherche conduits à Orléans par des ingénieurs français du BRGM (bureau de recherches géologiques et minières).

Le projet s’appelle "CROCODILE", avec un C comme Cobalt, il est mené en partenariat avec l’Union européenne qui en assure le financement. Le géant suisse Glencore, présent dans l'Usine du Nord en Nouvelle-Calédonie, participe au projet sur les aspects du raffinage du cobalt. Des contacts ont été pris avec Eramet. Le projet CROCODILE a pour objet de récupérer écologiquement le cobalt et le nickel contenus dans l’environnement des mines calédoniennes.

Après plusieurs années de recherche intensive en laboratoire, le projet avance. Il est déjà utilisé depuis des décennies pour extraire l’or et le cuivre. Mais chaque métal à sa propre complexité et celle du nickel est particulière. C'est aussi pour cette raison qu'on l'appelle "le métal du diable". Le projet novateur du BRGM consiste à utiliser des bactéries naturelles pour récupérer le cobalt et le nickel. 

L’étude est menée par Anne-Gwenaëlle Guezennec, chef de projet au BRGM. "Les bactéries naturelles se trouvent dans le sol, dans des milieux extrêmes comme les geysers d'eau chaude du parc naturel de Yellostone, explique la chercheuse, elles aiment les environnements chauds et acides des métaux, et il en faut de petites quantités. Ces micro-organismes aiment particulièrement les minerais calédoniens sur lesquels nous les avons testés, le processus biologique permet de réduire le fer et de concentrer, d'isoler le nickel et le cobalt."

Ces bactéries naturelles remplacent les réactifs chimiques et elles peuvent isoler les métaux à des températures relativement basses, entre 30 et 50 degrés. On est très loin des températures nécessaires à la production métallurgique traditionnelle, grande consommatrice d’énergie. "Ces bactéries produisent l’équivalent des réactifs chimiques, elles séparent les minerais à l’état liquide pour isoler le nickel et le cobalt. Lors des essais en laboratoire à partir de minerais calédoniens, elles ont montré qu'elles pouvaient extraire pratiquement 100% du cobalt et jusqu'à 80% du nickel." 

Il faudra sans doute encore plusieurs années pour aboutir à un procédé industriel qui permette d'atteindre de bons rendements. C'est tout l'enjeu de la recherche du BRGM sur les minerais calédoniens. Mais ces bactéries naturelles permettront un jour d’extraire les deux métaux à partir des résidus miniers. Le procédé sera sans doute rentable, surtout si les cours des matières premières poursuivent leur rallye haussier, et surtout il est bon pour la planète.

"L’idée serait de récupérer les grandes quantités de cobalt et de nickel restant sur les mines en Nouvelle-Calédonie, de les traiter dans des cuves ou des bassins en utilisant des micro-organismes, des bactéries" conclut Anne-Gwenaëlle Guezennec. Pour le BRGM et l'Union européenne, il s'agit donc d'arriver un jour à produire des métaux encore plus propres et respecteux de l'environnement, et cette révolution verte se déroulera en Nouvelle-Calédonie dans quelques années...

Une expérience identique est en cours en Finlande. Elle pourrait permettre là encore de récupérer du nickel et du cobalt, mais aussi des Terres rares, en utilisant les mêmes bactéries.

LME-NICKEL : 19 232 dollars la tonne +1,91% le 23/07/2021 à 12H46 GMT