C'est une première, signe d'une évolution des mentalités et du regard porté sur les langues kanak. Autrefois strictement interdites, quatre langues sont aujourd’hui enseignées au lycée. Et depuis cette année, des cours de drehu pour adultes sont dispensés par l'académie des langues kanak.
La langue drehu est une des principales langues d’évangélisation protestante dès 1840, qui sera treize ans plus tard, en 1853, strictement interdite dans les écoles missionnaires. Le français sera seul en usage à l’école.
Plus d’un siècle et demi plus tard, retour sur les bancs de l’école pour des apprenants volontaires inscrits aux cours hebdomadaires de l’ALK (académie des langues kanak).
Un apprentissage "assez ardu"
"On entend des choses dans la vie de tous les jours, et là, on rentre dans le vif du sujet et c’est pas évident parce que les prononciations, les additions de syllabes ne se prononcent pas de la même façon qu’en français, donc c‘est assez ardu" confie Michel Julia, l’un des élèves. " Moi, ma motivation, j’ai des ascendants qui viennent de Lifou, donc ça me gêne de ne pas avoir une langue et j’arrive à mon âge, et j’ai envie de découvrir des choses".
Une nouvelle méthode d’enseignement pour des langues particulières
Ce soir là, l’académie des langues kanak organise pour la première fois des cours payants sur la base d’une méthodologie 100 % calédonienne.
"Un mot n’a de sens que déjà dans un énoncé, mais ça ne suffit pas. Il faut aussi que l’énoncé soit dans un contexte d’énonciation" explique Leonard Drilë Sam, professeur de lettres, titulaire d'un doctorat en linguistique. "Par exemple, la langue drehu c’est ‘qene drehu’. C’est un sens. Mais si je dis ‘eni qene drehu’, ça sera ‘je parle le Lifou’. Donc entre ‘langue de Lifou’ et ‘parler le Lifou’, avec le même mot ‘qene’, selon le contexte, dans un énoncé et selon le contexte d’énonciation, ça n’a pas le même sens".
Découvrir une culture
Depuis 1992, le drehu et trois autres langues kanak (nengone, ajië et paicî) sont introduites dans les épreuves du baccalauréat. L’objectif des cours du soir de l’ALK n’est pas d’obtenir un diplôme, mais simplement de découvrir une facette de la culture kanak riche de vingt-huit langues.
"J’apprends cette langue parce que je pense que c’est comme ça aussi qu’on apprend à connaître les gens, en apprenant à connaître un peu la culture et les différences" explique Bernadette Viano, apprenante. "Un langage, ça dit beaucoup aussi sur les personnes et la façon dont ils communiquent, ils échangent entre eux".
A terme, l’académie des langues kanak espère proposer des cours de langues en nengone, en xârâcùù, et en paicî.
Le reportage de Nadine Goapana et David Sigal
L’invité du JT
Weniko Ihage, le directeur de l'académie des langues kanak, était l’invité du JT de NCla1ère du samedi 24 avril avec Laurence Pourtau.
Il est revenu sur le développement de l’enseignement des langues kanak.