Australie : des tombes de victimes du blackbirding redécouvertes

L'Histoire refait surface dans la ville de Mackay, à environ 900 kilomètres au nord de Brisbane, dans le Queensland. Des bénévoles sont en train de faire resurgir les tombes de dizaines d'îliens du Pacifique - des victimes du blackbirding.
C'est à l'aide d'un détecteur de métal et des archives de la commune que les volontaires du projet Work for the Dole ont découvert des dizaines de tombes sans nom, dans le carré païen du cimetière de Mackay. Elton Backo est le superviseur de ce projet :
 
« On a découvert 110 tombes sans nom pour le moment. On n'a encore identifié aucune de ces personnes. Tout ce que l'on sait, grâce aux archives de la commune, c'est qu'il s'agit d'îliens du Pacifique, qui ont été kidnappés entre 1867 et 1906. »
 
En l'espace de quarante ans, on estime qu'environ 63 000 Océaniens ont été victimes du blackbirding, enlevés ou attirés par de fausses promesses par des aventuriers qui les vendaient ensuite aux propriétaires des plantations de coton et de canne à sucre dans le Queensland et aux Îles Fidji. L'immense majorité de ces esclaves, originaires pour beaucoup du Vanuatu et des Îles Salomon, n'ont jamais revu leur terre natale.
 
C'est le cas des grands-parents d'Elton Backo, arrivés à Mackay en 1887. S'il connaît cette histoire, beaucoup des volontaires avec qui il travaille n'ont découvert ce passé tragique qu'en travaillant dans le cimetière :
 
« Parmi les volontaires, il y en a plusieurs dont les familles viennent des îles du Pacifique, et ils me disent : « On a vécu ici toute notre vie, cela fait plus de vingt ans, et on ne savait pas qu'ils étaient enterrés là, on ne nous a pratiquement pas parlé d'eux. » Ces jeunes sont en train d'apprendre que nous avons une histoire. »
 
C'est le cas de Starrett Vea Vea, l'un des trente volontaires qui a redécouvert les tombes de ces victimes du blackbirding :
 
« Je suis descendant d'îliens du Pacifique, je suis la quatrième génération, et quand j'étais petit, je passais tout le temps ici à vélo, sur cette partie du cimetière où il n'y avait que de l'herbe ; ce n'est que cette année que j'ai découvert qu'il y avait en fait des tombes sous l'herbe. Ce que ça signifie, c'est que ces gens sont oubliés de tous - de leur île natale et de nous, ici, parce qu'il n'y a aucun lien qui s'est créé entre les générations. Ce sont des laissés-pour-compte. »
 
 
Elton Backo, le superviseur du projet. Ses grands-parents ont été victimes du blackbirding
Mais Elton Backo rapporte que tous ne les ont pas oubliés :
 
« Quand je vais dans les îles - j'y suis retourné sept fois, il y a des gens qui me demandent si j'ai vu untel ou untel… Ils sont probablement quelque part ici, enterrés. C'est ça qui est triste. »
 
Les volontaires ont repéré quatre tombes supplémentaires qu'ils vont faire resurgir. Mais leur travail ne s'arrêtera pas là, Elton Backo pense que d'autres victimes du blackbirding ont pu être enterrées dans les carrés chrétiens du cimetière.