Figure du basket local, Michel Castex s’est éteint à l’âge de 68 ans. Meneur de jeu à l’habileté remarquable, champion de Calédonie et pilier de la sélection, il aura marqué son temps et vécu des expériences inédites.
Le champion de basket-ball Michel Castex, est mort mercredi 21 avril en Métropole à l'âge de 69 ans à la suite d’un accident dans la région de Cahors. Il avait quitté le territoire le 15 novembre 2019 pour s’installer en métropole loin de son lieu de naissance, à Nouméa, en 1953. Un garçon "d’une extrême sensibilité, compatissant avec la douleur des autres, attaché aux gens humbles et simples", confie Nicolas Kurtovitch, un ami de toujours.
Il l’a côtoyé dès la fin des années 1960 au pensionnat du collège du Sacré-Cœur de Bourail. Les deux copains partagent une passion : le basket-ball. "Il était déjà au-dessus de tout le monde. Il avait une adresse phénoménale, une dextérité incroyable dans les petits espaces." En club, Michel Castex va porter les couleurs de l’Indépendante puis celle du Mont-Dore. Il se démarquera tout au long de sa carrière. "Toute la génération des Calédoniens des 50 dernières années s’identifie à lui. Et toute la génération des 20 dernières années a entendu parler de lui, et sait qui il est. Il avait une autorité naturelle."
Le panier de la gagne contre Tahiti au Jeux de Guam 1975
Dans la mini-série télévisée Mémoires de Cagous diffusée avant les Jeux du Pacifique 2011, "Mimi", comme il était surnommé, évoquait son meilleur souvenir. Un match remontant à 1975, aux Jeux de Guam. Alors que la Polynésie Française cherche un cinquième titre d’affilée dans l’épreuve sportive phare en Océanie, elle tombe sur la Nouvelle-Calédonie. Une équipe co-entraînée par Daniel Buret et Gilles Jaunay, et dans laquelle il figure aux côtés d’Alain Loyat, Jean Fuluhea, Raymond Diawari ou encore Daniel Brunelet.
Les Cagous réussissent l’impensable : ils sortent les invincibles tahitiens et reçoivent la médaille de bronze. "Mon plus bel exploit est individuel, même si je suis dans un sport collectif. Vous allez comprendre pourquoi avec cette comparaison. Imaginez un match de football : à dix secondes de la fin il y a égalité, et vous obtenez un penalty. Et c’est vous qu’on désigne pour aller marquer. Eh bien, c’est exactement ce qu’il s’est passé à Guam pour moi. Au bout, il y avait le bronze. Les deux derniers paniers, à 15 secondes de la fin, c’est moi qui les marque. Je donne la médaille à la Nouvelle-Calédonie. Disons que c’était un petit moment que j’ai eu personnellement", racontait-il dans un sourire discret.
Une recrue des "Fabulous Harlem"
Très rapide, plein d’habileté, il est capable de marquer et faire marquer les autres. Un ailier ou meneur de jeu d’1,78 m, leader sur le terrain. En 1979, à 26 ans, c’est déjà capitaine de la sélection pour les Jeux du Pacifique à Suva. Les Cagous ne parviendront pas à monter sur le podium. Il conserve par la suite un poids majeur dans l’équipe, partageant les responsabilités offensives avec Angelo François-Elocie, joueur à Monaco et au Mans, au plus haut-niveau métropolitain. Anecdote de Nicolas Kurtovitch. "Je me souviens du match [perdu] contre Guam pour le bronze aux Jeux de Nouméa, en 1987. Ma femme, Nicole, est à la table de marque. A quelques minutes de la fin, l’arbitre siffle une faute sur un panier marqué. Il accorde non pas un, mais deux lancers-francs, et redonne la possession aux Guaméens. On va en prolongation. Sur la dernière attaque, le coach Gilles Jaunay demande à Roland de faire la remise en jeu pour Mimi, qui doit servir notre intérieur Le Prado, dans la raquette. Mimi reçoit le ballon, il dribble et tente le panier de la gagne. C’était ce genre de joueur-là, il veut la dernière balle."
C’est aussi à cette époque qu’il est repéré par les "Fabulous Harlem". Cette troupe de basketteurs américains réputés pour leur incroyable technique et qui privilégient le spectacle et l’humour à la compétition. Lors d’une tournée dans le Pacifique, ils recrutent le Calédonien et lui proposent de partir en tournée avec eux, pendant un an, pour des exhibitions à la Réunion et en métropole, puis à San Francisco et Tahiti. Des "Fabulous Harlem" qui feront carton plein en Nouvelle-Calédonie en 1986 et 1987, à Bourail et Nouméa, contre le CS Bourail et une sélection cagoue dans laquelle il joue.
"J’ai appris beaucoup de choses, sur, et en dehors des terrains. Je suis rentré dans leur milieu de basketteurs afro-américains. C’est très spécial et c’est une bonne leçon. J’espère que ça sera bénéfique pour d’autres joueurs du Pacifique à l’avenir. C’était vraiment bien", témoigne-t-il en 1987 après sa première partie de tournée.
Un dernier titre en 1997
Cette passion du basket ne l’a jamais quitté. Une fois sa carrière terminée, le jeu ne s’est pas arrêté. Celui qui a occupé la fonction de responsable des sports au cabinet de la Province Sud de 2014 à 2019 sous la mandature de Pierre Frogier et Cynthia Ligeard, jouait au basket tous les samedi matin, sur le playground de la halle de Boulari. Un rendez-vous immuable, de 7 heures à 9 heures, avec ses copains. Autour de lui : Eric Gay, Yorrhan et Rose Lallut, Philippe Roy, Yves Le Mestre, Michel Vaissala, Yvanhoe Fenuafanote, Nicolas Kurtovitch ou encore Lorenzo Subiranas.
"Si il était démarqué et que tu l’oubliais pour une passe, il gueulait. On était tous un peu pareil. Ça jouait dur ! Même sur le playground, c’était un 'go-to-guy'. Un joueur à qui tu donnes le ballon pour gagner. Si je devais faire une comparaison avec un joueur d’aujourd’hui, je dirais Stephen Curry. Il adorait le meneur et le jeu des Golden State Warriors [triple champion de la ligue nord-américaine NBA, de 2015 à 2018]. Michel shootait à trois points, et tentait des passes insensées comme lui. Des fois, quand je revenais du playground, je disais à Nicole : 'Si tu avais vu ce que Mimi a encore fait aujourd’hui'."