Deux jours à peine après son arrivée de Rio de Janeiro, elle est déjà de retour pour enseigner la danse, dans sa salle de Nouméa.
Professeure de samba, “Passista”, passionnée et travailleuse acharnée, Laura Ribeiro signe cette année sa troisième participation, au carnaval le plus regardé à l'international : celui de Rio.
"C'est comme si la ville s'arrêtait"
100 000 spectateurs, se pressent chaque année pour assister à cette féerie grandeur nature, au sambodrome de Rio. Une tradition bien ancrée, depuis la première édition en 1 723.
Danseurs, musiciens et chars gigantesques, décorés et parés de leurs plus belles couleurs investissent l’avenue, sous la bannière d’environ 200 écoles de danse. Mais il y a aussi les défilés dans les rues. La ville de Rio est en ébullition, pendant plusieurs jours et plusieurs nuits. “C’est la plus grande fête du monde. C’est comme si la ville s’arrêtait”, raconte Laura.
“C’était fou, on a tous pleuré”
Elle, a brillé dans le Sambodrome, trois années d'affilée. Lors de sa première participation, en 2023, l’école qu’elle vient tout juste d’intégrer “Imperatriz Leopoldinense” remporte le carnaval. Cela faisait vingt-et-un an qu’elle ne s’était pas imposée. “C’était fou, on a tous pleuré. On a senti l’énergie se renouveler au sein de l’école”, se souvient la danseuse. Lors de sa deuxième participation, son école termine vice-championne.
De bons résultats, qui sont le fruit d’un investissement constant. “Avec des répétitions de danse, de chants, des shows et répétitions dans les rues. Mon école, était située à une heure trente de mon domicile. C’est beaucoup d’investissement même pécunier, pour pouvoir se déplacer. Et puis c'est aussi et surtout physique. Il faut pouvoir danser chaque jour”, explique la participante au carnaval.
Répétitions dans les Favelas
Cette année, elle ne s’est pas ménagée. Laura, "Passista" ou danseuse performeuse, a défilé au sein de trois écoles : Estacio De Sa, la première école de samba créée au Brésil, Arranco De Engenho De Dentro et Unidos De Vila Isabel.
“On fait aussi des répétitions dans les Favelas. Parce que chaque école, est connectée à une communauté d’une Favelas. La majorité des personnes qui défilent, font partie de cette communauté”, poursuit la Calédonienne. D’autres participants internationaux, paient de leur poche pour défiler. Un business juteux. Elle, s’est démarquée lors d’auditions.
Des célébrations et des règles imposées
Le carnaval, c'est aussi un défilé millimétré. Chaque école, rassemble entre 2 000 et 3 000 personnes. Elles ont chacune, 1h20 pour parcourir les 700 mètres de piste du sambodrome. Pas une minute de plus. Le jury, les note sur plusieurs critères : “le thème représenté, la musique, les musiciens, les costumes, l’harmonie du défilé, le show des danseurs professionnels situés au début du cortège, les porte-drapeaux et puis bien sûr, les chars”, explique Laura.
Des chars gigantesque, produits d’heures et de mois de travail. Et d’un savoir-faire unique. Ils sont fabriqués dans des “barracaon”, hangars situés à la cité de la samba à l’extérieur de la ville. Des structures monumentales, travail d’orfèvre, dévoilées au dernier moment même pour les danseurs, juste avant le défilé. Des créations qui ont un coût. Elles sont financées en majorité par des investisseurs privés, des sponsors et les événements organisés par les écoles sur l’année.
Renouer avec ses origines
Au-delà de la danse, le carnaval raconte l’histoire du Brésil. Chaque année, le thème qui sera représenté par chaque école est décidé par un “carnavalesco”. Un artiste mais aussi historien. Il faut dire que le défilé met en lumière au travers de la musique, des costumes et de la danse, l’histoire afro-brésilienne, l’esclavage, la faune et la flore Amazoniennes, mais aussi les légendes et mythes du pays.
Une histoire marquée par l'esclavage et l'arrivée au XVIe siècle d'Africains, dans les exploitations sucrières du pays. “Il y a des responsables d'écoles de danse qui, lorsqu’ils traitent de légendes afro-brésiliennes, se déplacent jusqu’en Afrique, pour interroger des personnes sur ces mythes. Cela permet de s'informer mais aussi parfois, de demander la permission à des tribus, pour utiliser certains thèmes comme par exemple les “Orixas”, ou les Dieux, issus de religions africaines”, détaille la danseuse.
Un bout de brésil dans le Pacifique
L’occasion pour Laura, née à Salvador mais ayant grandi en Nouvelle-Calédonie, de renouer avec ses origines et celles de son père, brésilien. Mais aussi de partager une passion avec sa mère, professeure de danse bien connue des Calédoniens, Carine Richez Raguin.
Une culture que Laura Ribeiro diffuse désormais sur le territoire auprès de ses élèves, dans l’école de danse Extravaganz’art. Un petit bout de Brésil dans le Pacifique. Une étincelle de bonheur et de bonne humeur, dans un paysage calédonien marqué par les difficultés, ces deux dernières années.