Nouvelle-Calédonie la 1ère vous propose une série en quatre temps sur la fiscalité. Deuxième volet : l'impôt sur le revenu. Un dossier signé Bernard Lassauce.
Toucher à l’impôt sur le revenu pour dégager de nouvelles recettes, c’est fatalement mécontenter un grand nombre de contribuables. "On a l'impression de payer toujours trop d'impôts, trop de cotisations mais d'un autre côté nous sommes les premiers à réclamer davantage pour l'éducation, la santé, l'administration, la sécurité. C'est là que se trouve le iatus", observe Olivier Sudrie, expert en économie politique et spécialiste de l'Outre-mer.
L’impôt direct est la plus grande source de revenus pour les finances publiques : 76 milliards CFP collectés en 2019. Si la Nouvelle-Calédonie recense 110 000 foyers fiscaux, tous ne sont pas imposables. "Il y a un très petit nombre de foyers qui payent la totalité de l'impôt sur le revenu. Il est très difficile de juger de l'équité de sa fiscalité", note Guillaume Benoit, président de la commission économie et fiscalité au Medef.
Des niches fiscales qui s'élèvent à 30 milliards CFP
Pourtant, il s’agira bien, dans cette réforme, de réviser le barème de l’impôt sur le revenu et d’y adjoindre une tranche supplémentaire, à 45% pour les plus haut revenus. De quoi assurer l’adhésion des syndicats. "Je suis favorable à travailler sur la mise en place de nouvelles recettes. Notamment en réformant le barème de l'IRPP ou en mettant en place l'IRPP sur les dividendes", confirme Christophe Coulson, président de la CGC/CFE.
J'aimerai lier [la réforme, NDLR] à la recherche pour éliminer les niches fiscales qui ne sont plus d'actualité
Christophe Coulson, président de la CGC/CFE
Les niches fiscales représentent un sacré manque à gagner. Elles s'élèvent à 30 milliards en moins pour le trésor public, chaque année. Environ la moitié concerne des exonérations de taxes, le reste se rapporte à l’impôt non perçu pour déductions fiscales.
Ce sont, pour les particuliers, des réductions accordées sur des intérêts d’emprunts, des travaux, des frais de garde, des pensions alimentaires, des assurances-vie et d'autres réductions en faveur de l’investissement. Ces avantages seront désormais plafonnés voir supprimés.
La taxe sur les dividendes fait débat
Mais ce qui fait débat c’est l’intégration à l’IRPP d’une taxe sur les dividendes. Une double peine, selon le Medef, pour des revenus déjà taxés à l’IRVM, l’impôt sur les valeurs mobilières. "Si, demain, nous soumettions les dividendes des personnes physiques à l'impôt sur le revenu, nous nous retrouverions potentiellement, dans certaines situations, à 80% d'impôt. Ce sont des choses invraisemblables. Cela dissuaderait l'investissement et donc la création d'emploi", estime Guillaume Benoit.
Nous pourrions désavantager l'entrepreneur local. Je ne pense pas que c'est ce que nous souhaiterions faire aujourd'hui
Guillaume Benoit, du Medef NC
La mesure est pourtant demandée depuis des lustres par les syndicats, au nom de la réduction des inégalités. "Cela fait plusieurs années que nous réclamons un alignement progressif de la taxation des dividendes sur l'IRPP", atteste Tony Dupré, vice-président de la Cogetra. "Il n'est pas normal qu'ils ne soient pas taxés à la même hauteur que salaires. Nous sommes en plein dans l'équité".
Une fiscalité plus équitable
Le dossier est sensible. Une imposition sur les revenus du capital vient généralement contrebalancer la fiscalité du travail. "Si nous cherchons une fiscalité qui soit équitable ou juste, en principe l'objectif est de couvrir l'ensemble des types de revenus que peut toucher un ménage", analyse Jean-Pierre Lieb, expert en politique fiscale et avocat associé du cabinet Ernst & Young. "Il n'y a aucune raison de laisser de côté certains types de revenus."
Pour cette seule réforme de l’IRPP, le rendement escompté se monte à 4,2 milliards. Reste à convaincre tous les partenaires sociaux de la justesse d’une telle entreprise.
Retrouvez, ci-dessous, le reportage de Bernard Lassauce et Claude Lindor :