Dossier : le chômage partiel à la loupe

La crise dans l'industrie du nickel se traduit par un manque d'activité et l'annonce de mise en chômage partiel économique pour des centaines de salariés. Que sait-on vraiment de ce dispositif ? Considéré comme « une bouée de sauvetage », il existe dans le Code du travail calédonien depuis 1983.

C’est maintenant confirmé et c’est le sujet qui préoccupe les 1 200 salariés de Vale. « Quand serai-je directement concerné par le chômage partiel et pour combien de temps ? » Victoria Lacreuse travaille au siège de Vale NC à Nouméa depuis 2008 et elle ne sait pas encore si dans quinze jours elle pourra travailler ou non. « C'est le sujet de toutes les discussions. On s'inquiète... Comment faire pour payer les traites de la maison ou pour ceux qui ont des voitures ? Comment on va faire? J'avoue que c'est rien du tout une visibilité sur quinze jours. On ne peut pas du tout parler d'avenir », détaille Victoria Lacreuse, technicienne planification et production à Vale NC.

Maintenir les emplois coûte que coûte

Les représentants syndicaux ont accepté le chômage partiel et négocié que Vale complète financièrement cette indemnisation. Avec un objectif : maintenir les emplois coûte que coûte. « C'est un outil indispensable parce que ça fait vivre 3 000 familles. Il y a un enjeu social, un enjeu économique. Ça peut avoir un effet domino pour le pays. C'est une bouée pour éviter le licenciement. Mais ça ne dure que quatre mois, c'est temporaire et ça ne pourra pas aller au-delà », explique Alexis Falematagia, délégué syndical Soenc Nickel à Vale NC.

Pas plus de 88 jours

Le salarié perçoit alors 66 % du SMG, soit 100 000 francs environ, quelque soit son salaire. Les critères sont précis et il ne peut pas excéder 88 jours. « Il faut vraiment que ce soit lié à l'activité et pas lié à un défaut de gestion. Cela peut être une conjoncture économique, un sinistre, des intempéries exceptionnelles, quelque chose qui impacte vraiment l'activité de l'entreprise, précise Nathalie Sakiman, directrice adjointe de la direction du travail et de l'emploi. S'il n'y avait pas le chomâge partiel, on arriverait à des décisions difficiles de fermeture d'entreprises et de perte d'emploi pour les salariés. Ça amènerait à une précarité plus rapidement. » 

Une flambée en 2020

Pendant des années, le nombre de salariés concernés était faible. Moins de 400 en 2017, mais il a flambé l’an dernier. C’est la Cafat qui gère le régime chômage. Un budget annuel de 4 milliards de francs financé par les entreprises et les salariés du secteur privé.

300 millions supplémentaires

Avec les annonces faites en janvier 2021 de chômage partiel pour 2 000 salariés chez Vale NC, la SLN et les sous traitants, la facture va exploser. « Aujourd'hui si on doit financer le chômage partiel tel qu'il est annoncé, on doit pouvoir sortir 300 millions supplémentaires par mois sur le régime chômage, assure Jean-Francois Kabar, président du conseil d'administration de la Cafat. On n'a pas du tout cet argent et on ne sait pas où aller le chercher. Et qui plus est, on considère que sur un régime comme celui-là, ce n'est pas aux cotisants, c'est-à-dire aux salariés, de financer les conséquences du blocage de l'entreprise. »

On n'a pas du tout cet argent. On ne sait pas où aller le chercher

- Jean Francois Kabar, président du conseil d'administration de la Cafat. 

 

Reprise de l'activité

En revanche, depuis la création de ce dispositif, huit entreprises sur dix qui ont eu recours au chômage partiel ont repris normalement leur activité et aucun salarié n'a été licencié.

 

Le reportage de Thierry Rigoureau et Laurent Corsi :