Exonération de cotisations: la proposition de Calédonie ensemble fait polémique

Philippe Dunoyer détaille la mesure à Alexandre Rosada.
Pour «restaurer le pouvoir d'achat des travailleurs modestes et des classes moyennes», Calédonie ensemble propose une exonération de cotisations salariales évaluée à 2,4 milliards. Le conseil d'administration de la Cafat conteste le principe. L'Avenir en confiance et le Medef le soutiennent.
Voilà une proposition électorale qui ne laisse pas indifférent. Elle ligue même contre elle le conseil d'administration de la Cafat, la liste L'Avenir en confiance et le Medef.
 

De quoi s'agit-il?

D'une mesure évoquée par Calédonie ensemble à l'approche des provinciales. Philippe Dunoyer en parlait dimanche soir, lors de l'émission Politique Direct(e). «Il faut restaurer le pouvoir d’achat des travailleurs modestes et des classes moyennes», a-t-il dit. «C’est le sens d’une proposition qu’on formule de revaloriser l’ensemble des bas salaires, compris entre 1 et 1,5 [salaires minimums garantis], c’est-à-dire entre 156 000 F brut et 230 000 F brut», développe le député et porte-parole de Calédonie ensemble. La fourchette  comprendrait «environ la moitié des salariés».
 

Cette mesure va restaurer du pouvoir d’achat pour la moitié des salariés.
- Philippe Dunoyer

 

Le coût? «Environ 2,4 milliards»

«La proposition, pose-t-il, c’est d’exonérer toutes les cotisations salariales Cafat payées sur ce SMG. Et du coup, le salarié passera de 135 000 F net à 150 000 F net.» Cette proposition «est mesurée, on sait que ça devrait représenter un coût d’environ 2,4 milliards. On sait aussi que ça ne coûtera rien aux entreprises», assure Philippe Dunoyer.
 

Comment compenser? «Lutter contre l'absentéisme»

«Pour la Cafat, il y a une solution, poursuit l'homme politique, puisqu’on a prévu d’ouvrir des négociations pour améliorer la compétitivité sociale des entreprises et lutter contre l’absentéisme - maladies abusives ou injustifiées.» Et de citer: «l’absence injustifiée, ça coûte deux mois de salaire, par salarié et par an. C’est une somme colossale et en luttant contre cet absentéisme, on a les moyens de compenser largement les 2,4 milliards.» 

Extrait de l’entretien de Philippe Dunoyer avec Alexandre Rosada.
©nouvellecaledonie
 

La Cafat «émet la plus grande réserve»

Dès le lendemain, le conseil d'administration de la Cafat «émet la plus grande réserve sur cette proposition, en ce sens qu'elle n'est pas financée». Son président commence par pointer que l'estimation de 2,4 milliards est un «chiffre non vérifiable à ce jour»
 

Des régimes financés «à 80,5%» par les cotisations

Jean-Pierre Kabar enchaîne: «Il faut souligner que les régimes sociaux sont financés à 80,5% par les cotisations sociales, et que dans ces conditions, le non paiement de cotisations aura un effet immédiat sur leur situation financière.» Il rappelle s'il en était besoin que «l'état général actuel des finances des régimes sociaux est préoccupant, ils sont quasiment tous en déficit».
 
Conseil d'administration de la Cafat en août 2018.
 

Un projet «doublement incohérent» 

«De surcroît, l'idée de compenser ce manque à gagner pour la Cafat en intensifiant le contrôle sur les arrêts maladie est doublement incohérent[e]», dénonce le président du CA:
- «les indemnités journalières prises en charge par le Ruamm suite à des arrêts maladie représentent 1,8 milliard» - leur suppression ne couvrirait pas la somme annoncée;
- «la baisse des dépenses concernant les arrêts maladie ne profiterait qu'au Ruamm, pas aux autres régimes qui seraient impactés»

Le communiqué de la Cafat à feuilleter ci-dessous.


«Dérive démagogique», pour L'Avenir en confiance

Mardi, L'Avenir en confiance «s'associe» à la déclaration de Jean-Pierre Kabar, «et déplore la dérive démagogique préélectorale du parti de Philippe Gomès». «Il semblerait que Calédonie ensemble soit prêt à tout pour se maintenir au pouvoir quitte à mettre en péril nos régimes sociaux», attaque la liste d'union entre Les Républicains calédoniens, le Rassemblement-LR et le MPC.

Le communiqué de L'Avenir en confiance à lire ci-dessous.


«Promesses électoralistes», dit le Medef

En fin de journée, c'est le Medef qui proteste par communiqué, et replace l'annonce dans le contexte de la grève pour le pouvoir d'achat des fonctionnaires. «Stop aux promesses électoralistes», dénonce le mouvement patronal en adhérant aux arguments développés par le conseil d'administration de la Cafat.
 

«Culot»

«Alors que la Nouvelle-Calédonie traverse une crise économique sérieuse et longue, avec des suppressions d’emploi importantes dans le secteur privé, la fédération des fonctionnaires a le culot de demander des revendications tous azimuts, écrit le Medef. Et les élus semblent prêts à tout accepter, à deux mois des élections provinciales, alors que la situation des comptes publics ne le permet absolument pas.»

Le communiqué du Medef à feuilleter ci-dessous.