Huit questions pour comprendre le projet de taxe qui risque de faire grimper le prix du carburant

Dans une station-service de l'agglomération nouméenne.
Présentée par le gouvernement mais pas encore votée au Congrès, la modification de la TTE, la taxe pour la transition énergétique, fait déjà polémique. Concrètement, il s’agit d’ajouter à cette taxe sur le carburant une part additionnelle, variable. Avec pour objectif de financer l’équilibre du système électrique calédonien, aujourd'hui déficitaire. Décryptage de cette mesure en huit points.

Examiné par le gouvernement, mercredi 26 avril, le dossier n'est pas passé inaperçu et pour cause. Les Loyalistes ont pris les devant en dénonçant la mesure, avant même que l'exécutif ne communique lui-même sur le dispositif. 

Ce texte qui coince, c'est un avant-projet de loi du pays relatif à la TTE, la taxe sur la transition énergétique, qui concernera directement les automobilistes. En quoi consistait  cette taxe à l'origine ? Et quels sont les changements attendus ? Voici quelques éléments de réponse. 

1 Qu'est-ce que la TTE ?

Créée en 2018, la taxe sur la transition énergétique est venue s'ajouter, dans la composition du prix du carburant, à la taxe sur les produits pétrolier (TPP) et la taxe additionnelle sur les produits pétroliers (TAPP). Il s'agit d'une taxe fixe que le consommateur paie chaque fois qu'il va à la pompe. Elle équivaut à 0,6 francs le litre pour l'essence et 2,8 francs pour le gazole. 

2 A qui est-elle affectée ? 

A l'origine, cette taxe sur la transition énergétique était destinée à financer la nouvelle centrale électrique de Doniambo. Ses recettes étaient affectées à l'ACE, l'Agence calédonienne de l'énergie.

Pourtant, après plusieurs années de récolte de ces recettes et d'études de faisabilité, le projet de renouvellement de la centrale de Doniambo n'a jamais vu le jour.

Depuis avril 2022, la TTE est fléchée vers les transports de la manière suivante : 90 % pour le syndicat mixte des transports urbains (SMTU), qui exploite les bus de Nouméa et de son agglomération (Carsud et Karuïa), et 10 % vers le syndicat mixte de transport interurbain (SMTI) dont les bus Raï desservent la Brousse. 

3 Qui est exonéré de cette taxe ? 

Plusieurs secteurs d'activité ne sont pas soumis à la TTE. C'est le cas de la métallurgie, des mines, des sous-traitants sur mine, des transports de liaison commerciale internationale, des société d'avitaillement de véhicules de défense ou d’intérêt général, des pêcheurs professionnels, de la recherche océanographique, de l'armée, des entreprises d'approvisionnement des îles, de l'hôtellerie, de la boulangerie et de l'agriculture.

4 En quoi cette TTE va-t-elle être modifiée ? 

Le nouveau dispositif voté par le gouvernement propose de conserver la part fixe de la TTE et d’y ajouter une part additionnelle variable.

Pour comprendre cette modification, il faut d’abord se pencher sur le CAF, comprenez le coût, l’assurance et le fret. Une valeur qui varie chaque mois et qui correspond au prix du litre de carburant, lorsqu’il arrive aux portes du Caillou. 

La nouvelle taxe sera directement liée à ce CAF. À mesure qu’il augmente, elle sera plus faible. À l’inverse, elle sera plus élevée si le CAF diminue. La taxe ne pourra pas dépasser 20 francs par litre. Elle sera également désactivée les mois où le CAF représentera plus de 91 francs pour l’essence et 109 francs pour le gazoile.

5 Pourquoi modifier cette taxe ? 

Pour le gouvernement, il s’agit de trouver de nouvelles recettes destinées à garantir  l’équilibre financier de notre système électrique, que l'on sait déficitaire depuis plusieurs années. Comment ? En mettant un peu plus à contribution les consommateurs d’énergies fossiles (essence et gazole), autrement dit les automobilistes. 

Un Fonds pour l’équilibre du système électrique serait d'ailleurs créé à cette occasion, via une délibération du Congrès. 

6 Combien devrait-elle rapporter ? 

Rendement estimé de cette TTE, nouvelle version : 5 milliards de francs par an. L'executif compte ainsi ne pas augmenter une nouvelle fois les tarifs d'électricité qui, on le rappelle, ont été revus à la hausse, à trois reprises en un an (4 % en avril 2022, 4 % en octobre 2022 puis encore 3 % en avril 2023).

L'alternative, sinon, "ce serait d'augmenter les prix de l'électricité de 25 % encore, pose Laurent Chatenay, le président du conseil d’administration d’Enercal et conseiller économie et énergie au gouvernement. Dans le contexte actuel, nous refusons de nous résoudre à cette éventualité".

Par ailleurs, les transports en commun du Grand Nouméa et de la Brousse continueront de percevoir le fruit de cette taxe, à hauteur de 560 millions de francs par an. 

7 Quelles conséquences sur le prix du carburant ? 

Pour les Loyalistes, qui dénoncent la mesure, la modification de cette taxe aura pour effet d'augmenter le prix du carburant et donc de pénaliser les consommateurs. Et ce, après les hausses successives appliquées sur la facture d'électricité, comme évoqué plus haut. 

A titre d'exemple, si le nouveau dispositif avait été mis en place en avril, les automobilistes paieraient ainsi 8 francs de plus pour l’essence et 20 francs de plus pour le gazole. 

Une situation dénoncée par Ensemble pour la planète, dans un récent communiqué : "Ceux qui paient déjà la TTE paieront encore plus, tandis que toutes les exonérations (énumérées plus haut, ndlr) sont maintenues".

8 Quand cette mesure sera-t-elle effective ? 

Pour l'heure, il s'agit encore d'un avant-projet de loi du pays. Il devra être voté par le Congrès pour être appliqué en Nouvelle-Calédonie.