La période stable de taux bas a duré quinze ans. Mais la remontée est brutale, en 2023. Les banques centrales ont relevé les taux directeurs pour lutter contre l’inflation. L’évolution du taux d’usure est devenu mensuel. Et chaque mois, les taux des crédits à l’habitat grimpent, sur le Caillou comme ailleurs.
Le regard des agences
“Il reste une dynamique de marché qui est réelle”, concède Jean-Damien Ponroy, qui préside la Fédération territoriale des agents immobiliers. “On voit qu’un certain nombre de GOU, de projets en Vefa, sortent dans Nouméa”, relève-t-il en faisant référence à de “grandes opérations d’urbanisme” et aux “ventes en l’état futur d’achèvement", c’est-à-dire sur plan. “Mais ce sont des actes qui ont été passés il y a quelques mois, déjà.”
On constate depuis plusieurs semaines un certain ralentissement, et des difficultés pour les acquéreurs à se faire financer.
Jean-Damien Ponroy, président de la Fédération territoriale des agents immobiliers
La vision des banques
“On continue de prêter”, assure Lionel Wolff, qui préside la Fédération bancaire française de Nouvelle-Calédonie, “même si les conditions d’octroi sont plus compliquées, puisque le taux d’usure nous bloque.” On parle là du maximum légal que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer quand ils accordent un prêt. “En Australie, il n’y a pas de taux d’usure, les taux des crédits immobiliers sont déjà au-delà de 7 %, compare le professionnel. Alors qu’en Calédonie, ils sont capés par le taux de l’usure. Mais on doit respecter la réglementation, et notamment la réglementation du HCSF [le Haut-conseil de stabilité financière], qui nous impose de respecter un taux d’endettement de 35%.”
Vous voulez emprunter ? Pour assurer que vous pourrez faire face aux échéances du futur crédit, et prévenir le surendettement, la part de la somme due chaque mois ne peut pas dépasser une certaine proportion, comparé à vos revenus et vos charges. Résultat, dans la conjoncture actuelle : “Plus vous avez des taux qui augmentent, plus la mensualité va augmenter, et moins la part empruntable par le client sera importante.”
Vers des prix à la baisse ?
Dans l’Hexagone, les professionnels alertent depuis plusieurs mois sur un très fort ralentissement du marché de l’immobilier, et les prix des biens font partie des rares variables d’ajustement. Selon Jean-Damien Ponroy, “on commence à assister à des corrections de prix qui, en 2022, étaient soit stabilisés soit même, dans certaines zones, légèrement remontés. Depuis plusieurs semaines, on observe les communications d’agents immobiliers qui affichent ‘prix en baisse'. Ce qu’on ne voyait pas du tout en 2022 et au premier trimestre 2023.”
En attendant d'y voir plus clair
A quoi s’attendre à court-terme ? “Il y a très peu de visibilité, remarque Lionel Wolff. Tout dépendra de la capacité des banques centrales à juguler l’évolution de l’inflation."
Ce qui est perturbant aujourd’hui, c’est cette remontée qui est brutale. Une fois qu’on aura atteint un pic, qui nous permettra d’avoir une visibilité plus stable dans le temps, je pense que les choses se normaliseront.
Lionel Wolff, président de la Fédération bancaire française de Nouvelle-Calédonie
Des emplois en jeu
On ne mesure pas non plus l’impact sur l’emploi, de cette hausse des taux d’intérêts. Si le volume des transactions confirme sa tendance à la baisse, cela aura des conséquences sur les acteurs de l’immobilier. Et également sur ceux de la rénovation et de l’équipement, pour lesquels les particuliers avaient tendance à avoir recours à l’emprunt.