40 ans de l'élection de François Mitterrand : comment le président socialiste a marqué l’Outre-mer

Ce lundi marque le 40e anniversaire de la victoire de François Mitterrand à la présidentielle de 1981. En Outre-mer, son score fut très faible face à Valéry Giscard d'Estaing. En revanche, en 1988, il y écrase Jacques Chirac. Retour sur deux septennats marquants pour ces territoires.

Moins de 28% des voix au second tour le 10 mai 1981, plus de 58% en 1988. Parti de très bas, François Mitterrand, dont le 40e anniversaire de son élection à la présidentielle est commémoré lundi 10 mai, a plus que doublé son score électoral outre-mer en sept ans. Parmi les raisons de ce changement, une politique institutionnelle souple, qui s’est adaptée au terrain.

Autonomie puis suspension des essais nucléaires en Polynésie

En 1972, le programme commun de la gauche avait classé le chapitre Outre-mer à la rubrique étranger. Le droit à l’autodétermination était d’emblée affirmé. Même si les socialistes ont ensuite mis de l'eau dans leur vin, cela explique l'inquiétude de 1981 dans des territoires dont l'économie dépendait fortement des transferts de la Métropole.

 

La Polynésie obtenait, en 1984, un statut d'autonomie élargie. Il sera suivi dix ans plus tard d'un pacte de progrès. Celui-ci visait à compenser les pertes liées à la suspension en 1992 des très controversés essais nucléaires de Mururoa. Même remise en cause par son successeur, Jacques Chirac, la décision du président, rappelée fermement en 1994, a marqué son temps : "Il n'y aura plus d'expérience nucléaire tant que je serai là. Bien entendu, le jour où je n'y serai plus, ceux qui me succéderont seront totalement libres et maîtres de leur décision."

Le dossier calédonien et les accords de Matignon

Mais le grand dossier politique statutaire de l'ère Mitterrand, outre-mer, c'est la Nouvelle-Calédonie. En 1984, les tensions entre indépendantistes kanak et non-indépendantistes, souvent d'origine européennes, débouchent sur des affrontements. Le plan Pisani ramène un calme précaire. Mais sous le gouvernement de cohabitation de Jacques Chirac, entre 1986 et 1988, les heurts reprennent de plus belle et aboutissent à la prise d'otages d'Ouvéa, qui s'achève par un assaut des militaires, peu avant le second tour de la présidentielle. Au total, 25 personnes meurent dans ce drame.

Au terme d'une mission du dialogue, et de négociations, sous l'égide du nouveau Premier ministre socialiste Michel Rocard, les accords de Matignon rétablissent la paix, instaurant un rééquilibrage et un processus institutionnel évolutif. Un accord aux forceps pour lequel chacun doit faire un pas important vers l’autre comme le raconte le leader des non-indépendantistes, Jacques Lafleur (1932-2010), le président du Rassemblement pour la Calédonie dans la république.

Nous avons réussi à comprendre que nous devions savoir donner, savoir pardonner.

Jacques Lafleur

 

Côté indépendantiste, Jean-Marie Tjibaou (1936-1989), président du Front de Libération nationale kanak et socialiste sait que sa base militante va renâcler (il sera d’ailleurs assassiné un an plus tard par un indépendantiste radical) mais il ne doute pas d’avoir fait le bon choix : "L'avenir saura reconnaître que ces accords ont constitué un pas important."

"Vous savez bien que ce qui nous unit est fort"

En deux septennats François Mitterrand a transformé les Outre-mer. Il a aussi établi une relation plus équilibrée et tissé un véritable lien. Il l'exprime avant les législatives de 1993 sur RFO : "Si l'Outre-mer a besoin de la France, je crois que la France a tout autant besoin de l'Outre-mer. Tout à l'heure, je disais, ce serait un peu moins de France. Mais vous-là qui m'écoutez dans l'ensemble des départements et des territoires, vous savez bien que ce qui nous unit est fort." Et sur le plan simplement politique, après avoir réconcilié la gauche nationale, avec l'Outre-mer, François Mitterrand l'y a durablement ancrée.