Le déficit de la Cafat examiné par la chambre des comptes

Siège de la Cafat, à Nouméa.
La chambre territoriale des comptes a publié un rapport sur la situation de la Cafat. Certes, les comptes sont dans le rouge depuis plusieurs années, mais pour la CTC, tout n’est pas perdu. A condition de prendre des mesures de rattrapage, qui risquent d’être impopulaires.

La vigie des comptes publics de la Nouvelle-Calédonie s’est penchée sur la gestion de la Cafat (Caisse de compensation des prestations familiales, des accidents du travail et de la prévoyance des travailleurs), dans un rapport qui examine l'exercice de 2020 et les suivants.

Sans surprise, la chambre des comptes fait état de la situation déficitaire de la Caisse. Un déficit structurel, « qui nécessite un accompagnement constant de la Nouvelle-Calédonie », note-t-elle.

Tassement de la croissance, recul de l'emploi salarié, vieillissement de la population... Les comptes de la Cafat sont systématiquement dans le rouge, depuis 2015. L'an dernier, en 2021, le déficit s'élevait à 4,85 milliards de francs. L'endettement a aussi progressé de 55,5 milliards en 2015 à 80,4 milliards de francs en 2021. Parmi ces dettes, de nombreux retards de paiement auprès des établissements publics de santé et aux provinces.

Les retards de paiement du régime d’assurance maladie s’élèvent à plus de 36,4 MdF CFP en 2021 et concernent essentiellement les établissements publics de santé et les provinces.

Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie

Une branche maladie en fort déficit 

C’est la branche maladie-maternité qui creuse le plus gros du trou de la Cafat, surtout depuis 2015. C’est là que le volume de cotisations a commencé à baisser, alors que l’offre de soin s’améliorait et que les calédoniens se soignaient plus aisément. Des dépenses qui ont augmenté de plus de 11 % entre 2015 et 2021. L'hôpital public représente le plus gros de ces dépenses (26,6 milliards de francs), suivi des pharmacies et des libéraux de santé (23,7 milliards) et des hospitalisations privées (9,1 milliards).

Autre facteur de dégradation : les deux années de crise sanitaire, qui ont coûté 3,7 milliards de francs au régime de protection sociale de la Cafat.

Pour combler le trou du régime d’assurance maladie, la Nouvelle-Calédonie, ainsi que l’agence sanitaire et sociale, mettent régulièrement la main à la poche : respectivement 11,66 milliards et 780 millions de francs, rien qu'en 2021.

Un seul régime en bonne santé

Quant au régime de retraite, son déséquilibre augmente depuis 2018. Il est passé de 4,2 milliards de francs en 2020 à 5,1 milliards de francs en 2021. Des déficits qui creusent chaque année un peu plus les réserves du régime. Elles étaient de 50 milliards de francs en 2015. Elles ne sont plus que de 32 milliards en 2021.

Autres branches en déséquilibre, le régime des accidents du travail et des maladies professionnelles, ainsi que le régime d'assurance-chômage. Seul régime excédentaire : le régime des prestations familiales, qui affiche des résultats positifs depuis 2018. 

Sous l’effet des déficits annuels de la plupart des régimes, le montant total des réserves des régimes a diminué depuis 2015 pour atteindre 698 MF CFP fin 2021, soit moins de deux jours de prestations.

Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie

Une liste de préconisations 

Pour redresser les comptes de la Cafat et améliorer sa performance, la chambre émet une série de recommandations. Elle préconise une plus grande rigueur dans le contrôle médical et dans le contrôle des prescriptions. En 2022, il y aurait ainsi l’équivalent de 500 millions de francs à récupérer, ainsi que 800 millions de francs en 2023. Elle encourage aussi la Cafat à baisser ses marges de fonctionnement de 200 millions de francs. 

Autre axe d’amélioration encore, le recouvrement des cotisations sociales, qui représentent 70 % des produits de la caisse avec un volume de 106,5 milliards de francs. Les sommes récoltées ne correspondent pas au nombre de cotisants potentiels . 

Le recouvrement amiable est insuffisamment développé, même si des améliorations sont notables depuis 2020.

Chambre territoriale des comptes de Nouvelle-Calédonie

La réforme du régime vieillesse est accueillie favorablement, mais la chambre invite à reculer l'âge de départ à la retraite et à revoir à la hausse les  plafonds de cotisations. "En 2021, le taux de cotisation au régime vieillesse est fixé à 14 % dans la limite d’un plafond mensuel de 363 700 F CFP. Par comparaison, le taux de cotisation métropolitain s’élève à 15,45 % jusqu’à un plafond de 408 095 F CFP mensuels, et à 1,94 % pour les revenus supérieurs à ce plafond", compare la chambre des comptes. 

Enfin, elle voit d'un oeil favorable la hausse de la CCS (Contribution calédonienne de solidarité), mais à 5 % plutôt qu’à 4 %, comme cela a été voté au Congrès en juin dernier.

Un rapport satisfaisant selon la Cafat

Du côté de la Caisse, l'état des lieux dressé par la chambre des comptes et les recommandations sont accueillis favorablement. "Les points visés par la chambre territoriale des comptes sont des points que nous avons déjà, bien entendu, éludés en partie puisque nous avons mis des moyens de concertation et de remise à niveau des points soulevés", a fait valoir Jean-Rémi Buraglio, le président du conseil d'administration de la Cafat, sur le plateau du journal télévisé de NC la 1ère de ce mardi 2 août. 

La chambre territoriale des comptes n'a pas pour habitude de faire des rapports de complaisance. Or, il n'y a aucune remise en cause de la gestion de la Caisse.

Jean-Rémi Buraglio, le président du conseil d'administration de la Cafat

Sur la baisse des dépenses de fonctionnement, le président de la Cafat estime qu'elles "pourront être réduites", à condition que la Caisse n'ait pas de charges supplémentaires. Ces dépenses représentent actuellement 5 % du budget de la Cafat, rappelle Jean-Rémi Buraglio. "Un ratio tout à fait conforme aux autres caisses en Métropole ou dans d'autres pays de la communauté européenne", estime-t-il. 

Point à améliorer encore, consent le président de la Caisse, l'évolution des systèmes d'information "un petit peu obsolètes" et de recouvrement. 

Entretien complet de Jean-Rémi Buraglio, invité de Loreleï Aubry, à retrouver ici.

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