Les gardes-nature aux petits soins pour les oiseaux marins

Une carte permet de savoir en temps réel quels sont les îlots interdits au public
En cette période estivale, les oiseaux migrateurs sont de retour pour se reproduire sur les îlots. Une période de nidification qui coïncide avec les vacances scolaires et donc une importante fréquentation humaine. Alors chaque été, les gardes-nature de la province Sud mettent tout en œuvre pour permettre aux oiseaux et aux hommes de cohabiter.

A l’approche de l’îlot M’Bé, derrière le phare Amédée, ce n’est pas le mât rouge interdisant de débarquer que l’oeil remarque en premier, mais les milliers d’oiseaux tournoyants dans le ciel.

Le spectacle est exceptionnel : alors que 70% des oiseaux marins de la planète ont déjà disparu, cette nouvelle colonie de sternes de Dougall, découverte il y a une quinzaine de jours par les garde-natures de la province Sud, compte plus de 10 000 individus. "C’est magique et tout à fait exceptionnel à l’échelle du monde. Car sur toute la planète, il ne reste plus que 200 000 sternes de Dougall", se réjouit Caroline Groseil, chef du service des gardes-nature de la province Sud.

L’activité humaine a poussé les oiseaux marins à se retrancher sur ces quelques kilomètres carrés de sable, en pleine mer.

Une population en baisse chaque année

La Calédonie n’est pas épargnée par la disparition des oiseaux marins. Chaque année, leur population baisse de 2 à 4%, selon une étude publiée il y a quelques jours dans le bulletin de la société zoologique de France. "Les îlots, c’est tout ce qui reste à ces oiseaux, regrette Patrice Plichon, en charge des gardes-nature du Sud. Avant, il y avait des nidifications sur la Grande Terre, mais tout ça, c’est fini."

C’est bien l’activité humaine qui a poussé les oiseaux marins à se retrancher sur ces quelques kilomètres carrés de sable, en pleine mer.

Les gardes nature sillonnent les îlots pendant toute la période de reproduction.

Alors pour leur permettre de nidifier en toute sécurité dans ces derniers havres de paix, les gardes-nature sillonnent les îlots pendant toute la période de reproduction et s’il le faut en interdisent l’accès : ce sont les fameux mâts jaunes à pavillon rouge, désormais bien connus des plaisanciers. Cathy Geoffray, de retour d’une mission d’inspection de deux jours dans la réserve du Grand Lagon Sud, l’assure "les gens respectent bien. C’est bien parce qu’il ne faut vraiment pas débarquer lorsque l’on voit ce mât. Si l’on marche dans la colonie, les oiseaux s’envolent, abandonnant leurs oeufs ou leurs poussins, et ça c’est dramatique, car ça veut dire que cette année-là, il n’y aura pas de nidification."

Pour ne pas empêcher toute activité humaine, les gardes-nature enlèvent et remettent les mâts au fur et à mesure de l’arrivée et du départ des oiseaux. Une carte permet de savoir en temps réel quels sont les îlots interdits au public.

Respecter des règles simples

Parfois des oiseaux nichent sans que l’accès à l’îlot soit fermé. « Dans ces cas-là, il faut respecter quelques règles simples pour ne pas déranger les oiseaux. Ne pas approcher à moins de 40 mètres, ne pas camper, faire de feu, et surtout ne pas amener de chien sur les îlots », énumère Cathy Geoffray.

Les oiseaux choisissent parfois la difficulté, comme sur l’îlot à Signal très fréquenté en cette période estivale où des promeneurs ont signalé des sternes diamant aux gardes-nature. Arrivés sur place, l’équipe inspecte la zone et repère vite les oiseaux. "Il y a trois ou quatre nids, ce n’est pas beaucoup, alors bien sûr on ne va pas fermer l’îlot, explique Patrice Plichon. Le problème, c’est que les oiseaux couvent juste sur le sable. Elles creusent une toute petite dépression pour y mettre leurs oeufs. Alors un usager lambda ne va rien remarquer. Les oiseaux vont s’envoler, on peut marcher sur les oeufs, etc." Armés de pancartes et de cordes, les gardes-nature ferment la zone de ponte pour protéger les oeufs.

Quelques mètres carrés interdits à l’activité humaine mais qui assureront le retour des sternes diamant sur l’îlot Signal. Devenues grandes, les petites sternes, qui naîtront bientôt, viendront chaque année en pèlerinage sur leur lieu de naissance.

Le reportage de Charlotte Mannevy et Laura Schintu :

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