Covid-19 : les tests deviennent payants sur fond de blues des pharmaciens

En cas d'autotest positif, un test antigénique doit être mené auprès d'un professionnel de santé.
A partir de ce mardi 1er février, les tests antigéniques et PCR seront payants à quelques exceptions près. De leur côté, les pharmaciens dénoncent la très forte surcharge de travail impliquée par la réalisation des tests, alors que le nombre de personnes qui viennent se faire dépister explose.

Finie, la gratuité. A partir d’aujourd’hui, il faudra débourser a minima 2 850 francs pour obtenir un test antigénique associé à un QR code, délivré par un professionnel de santé. Seules les personnes symptomatiques ou les personnes considérées comme contact à risque pourront continuer à bénéficier d’un test gratuit.

Agacement des voyageurs

Pour tous ceux qui ont besoin de prendre l’avion au départ de Nouméa pour la Métropole, la Polynésie française, Lifou et Maré, il faudra donc mettre la main au porte-monnaie. Ce que de nombreux usagers de l’aérodrome de Magenta ont du mal à digérer : "ça devient cher, et des fois, des vols sont reportés. Ça veut dire que les gens sont obligés de faire plusieurs fois le test et de repayer, ça fait beaucoup", soupire une voyageuse.


Une décision de rendre les tests payants qui agace d’autant plus cette jeune fille, que la fiabilité des tests peut être aléatoire, notamment avec le variant Omicron : "Ce matin, j’ai accompagné une amie parce qu’on devait partir pour Lifou. En ville, son test était positif. On a refait le test dans une autre pharmacie et là, il était négatif. Donc si on nous fait payer quelque chose qui n’est pas fiable, ce n'est pas correct", estime-t-elle.

En ville, son test était positif. On a refait le test dans une autre pharmacie et là il était négatif. Donc si on nous fait payer quelque chose qui n’est pas fiable, ce n'est pas correct.

Pour cet autre usager, c’est le temps d’attente pour obtenir un test qui est inquiétant : "ça promet, parce que les pharmacies et les laboratoires ne désemplissent pas, je pense que ça va être compliqué à gérer pour les Calédoniens."

Certains pharmaciens jettent l'éponge

Une crainte loin d’être injustifiée. Ces deux dernières années marquées par la crise sanitaire et la fermeture des frontières ont accentué la pénurie de personnel en pharmacie. Résultat : le manque de personnel, cumulé à une surcharge de travail avec la prise en charge de tests antigéniques, ont mis à bout de nerf les pharmaciens.

Certaines pharmacies ne pratiquent plus les tests.

Dans cette pharmacie de Magenta, il n’est effectivement plus question d’effectuer ces tests. Cela pénalise la qualité du service et nuit à la mission première de la profession, assure Sophie Sore, pharmacienne : "Nous ne pouvions plus assurer les deux tâches, c’est-à-dire accueillir les patients, les conseiller sur leur traitement, tout en assurant les tests antigéniques de façon convenable. Car ces tests sont très chronophages et nous prenaient énormément de temps."

Le conseil de l’ordre tire la sonnette d’alarme : il sera de plus en plus difficile de trouver une pharmacie qui assure ces tests. "Sur ces prochains jours, ça risque d’être un peu plus difficile de trouver des pharmacies, assure Thierry Van Waerebeke, président de l’ordre. On a des pharmacies qui vont arrêter, j’ai eu des informations dans ce sens. D’une part, parce qu'elles peuvent avoir des personnes malades, ou parce qu’elles n’ont plus suffisamment d’effectifs pour faire à la fois les tests et notre mission première qui est de délivrer les médicaments."

"Donc là, on n'en peut plus, résume-t-il. On a été surchargés avec des tests qui, pour nous, en tant que personnels de santé, étaient un peu surprenants. Quand on impose un test pour aller aux îles alors que le virus circule déjà là-bas, on a un peu l’impression de perdre du temps."

Quand on impose un test pour aller aux îles alors que le virus circule déjà là-bas, on a un peu l’impression de perdre du temps.

Ce couple peut en témoigner. Après avoir fait trois pharmacies pour réaliser des tests antigéniques validé par un QR Code, c’est la douche froide : "Pour trouver des centres, c’est difficile. A chaque pharmacie, ils manquent de personnel ou alors il n’y a plus de tests, c’est galère!"

L’ordre des pharmaciens souhaite également rappeler qu’ils ne sont pas les seuls à être habilités à faire des tests, les médecins, les infirmiers et les kinésithérapeutes peuvent aussi les pratiquer.

Voyez aussi le reportage de Natacha Lassauce-Cognard et Carawiane Carawiane :

©nouvellecaledonie

Désaccord de coutumiers

La fin de la gratuité des tests ne passe pas, auprès du grand chef de La Roche, à Maré. Hippolyte Sinewami estime que c'est au gouvernement de prendre en charge la dépense. "C’est encore un autre budget qu’il va falloir prévoir. On tient à rappeler que si on a exigé les tests, c’est pour contrôler la maladie", insiste-t-il en faisant référence à l'obligation de se dépister avant d'entrer aux Loyauté.

Une interview de Steeven Gnipate et Kaio Tui :

©nouvellecaledonie

Le passage à des dépistages payants représente une double peine, renchérit Issaka Qala, l’un des portes-parole du district du Wetr, à Lifou. "On conteste cette décision qui, pour nous, est anormale et injuste", résume-t-il. 

Tests payants, le Wetr proteste (une réaction recueillie par Toufaili Andjilani)