Melbourne Cup: mesure et démesure de la plus grande course à handicap du monde

La Melbourne Cup 2016, 100% made in Australia. (Supplied: Bland Shire Council)
Chaque premier mardi de novembre, à 15h, l’Australie retient son souffle pendant 3’30’’. C’est le temps qu’il faut aux 24 chevaux pour avaler les 3200 mètres de la Melbourne Cup, sur le champ de courses de Flemington. En attendant la course demain, petite révision de culture générale...

Depuis 1861, cette course fait vibrer tout le pays. À tel point que le jour de la Melbourne Cup est férié dans le Victoria depuis 1873.

2015: Michelle Payne est devenue la toute première femme jockey à remporter la Melbourne Cup, sur le dos de Prince of Penzance.

La course hippique à handicap la plus richement dotée du monde

Cette année, pour la 156ème édition, le prix se monte à 6.2 millions de dollars australiens (512 millions de francs CFP). Le principal partenaire financier de la Melbourne Cup est une compagnie aérienne, mais l’événement attire de nombreux autres groupes, producteurs de champagne, brasseurs, ou  casinos, l’équivalent australien du PMU ou encore une chaine de grands magasins. 

Le jour de la Melbourne Cup, la fièvre des paris s’empare de centaines de milliers d’Australiens. En 2015, le montant des paris s’est élevé à 141.8 millions de dollars sur les 10 courses du programme – paris enregistrés dans les points de vente TAB en Nouvelle-Galles du Sud, dans le Victoria et dans le territoire de la capitale australienne, Canberra.  
Beaucoup d’entreprises organisent leurs propres paris – c’est ce que les Australiens appellent un “Cup Sweep”. Les employés paient quelques dollars pour participer, et ils tirent au sort le nom d’un cheval. Celui qui gagne récolte le montant cotisé par tous les employés-parieurs.

Une coupe en or d’une valeur de 175 000 dollars (14.5 millions de francs CFP)
Cette année, la Coupe à 3 poignées en or 18 carats est un concentré d’Australie. Son or est extrait de la mine de Lake Cowal, située en Nouvelle-Galles du Sud, et le socle est fait en bois d’acacia australien.  C’est le propriétaire du cheval vainqueur qui reçoit cette coupe. Mais l’entraîneur et le jockey sont aussi honorés. Ils reçoivent deux copies miniatures d’une valeur de 10 000 dollars (826 000 francs CFP) chacune. En 1865, le vainqueur de la toute première Melbourne Cup, avait gagné une montre en or.
 

Mark Twain, un inconditionnel de la Melbourne Cup

En visite en Australie en 1895, l’auteur des “Aventures de Tom Sawyer” fut émerveillé par la fête de la Melbourne Cup, à tel point qu’il en a fait un compte-rendu truffé de superlatifs dans ses carnets de voyage “Following the Equator”« Les tribunes offrent un spectacle brilliant et magnifique, un délire de couleurs, une vision de beauté. Le Champagne coule à flots, tout le monde est vivant, excité, heureux ; tout le monde parie et les gants et les fortunes changent de main en permanence. (…) Le champ de course est la Mecque de l’Australasie. (…) Je n’ai vu nulle part ailleurs dans le monde une fête qui ait d’aussi magnifiques attraits pour toute une nation. La Cup m’époustoufle. »

Une fête chic qui tourne souvent à la beuverie généralisée
Chaque année, 100 000 spectateurs se massent aux abords de la piste de l’hippodrome de Flemington dès le début de matinée. Ils démarrent la journée tout endimanchés. Les femmes se perchent sur des escarpins compensés, mais elles finissent généralement la journée pieds nus. Et elles rivalisent de créativité en matière de coiffure. C’est à qui arborera le fascinateur le plus fascinant, et cela implique généralement quantité de plumes.
Quand arrive l’après-midi, la foule commence à ne plus être très fraîche, et cela se voit ( les photos ici). Généralement, la presse britannique se moque abondamment du manque d’élégance des Australiennes, titubantes d’alcool ou vautrées dans la pelouse. Chaque année donc, des spectateurs défrayent la chronique par leurs exploits. En 2015, c’est une visiteuse éméchée qui a remporté la palme, car elle a été filmée en train de culbuter un policier dans un massif de fleurs.
 

La suprématie des chevaux étrangers

En 2016, les organisateurs de la Melbourne Cup ont reçu les dossiers de 31 chevaux étrangers – élevés et entraînés au Japon, en France, en Allemagne et en Nouvelle-Zélande, tous candidats au départ. Les 5 derniers vainqueurs de la Melbourne Cup sont tous venus de l’étranger: les Irlandais Fiorente et Green Moon, le Français Dunaden, en 2011, l’Américain American ; et le néo-zélandais Prince of Penzance en 2015, monté par une femme jockey, Michelle Payne, la première à remporter la coupe.
Notons qu’à ce jour un seul jockey aborigène s’est arrogé la coupe: Frank Reys, sur le cheval australien Gala Supreme, en 1973.
Des concurrentes du concours "Fashions on the Field", Elis Crewes et Athena Lin, à Flemington, le jour de la Melbourne Cup, 3 november 2015

Une coupe controversée: maltraitance et coups de cravache

Ces trois dernières années, 4 chevaux ont du être euthanasiés à la suite de la la Melbourne Cup. Verema, de l’Aga Khan, en 2013, le cheval japonais Admire Rakti, Araldo en 2014, et Red Cadeaux en 2015. Trois d’entre eux se sont grièvement blessés pendant la course. Le quatrième, Araldo, a pris peur quand un spectateur a agité un drapeau. Il s’est coincé une patte dans un clôture. Depuis, Racing Victoria, Racing Australia, le gouvernement du Victoria et l'université de Melbourne collaborent sur un projet pour détecter les fragilités osseuses des chevaux de course et éviter de nouveaux drames. 
La Melbourne Cup est aussi la course qui divise le pays. Chaque année, des militants des droits des animaux manifestent contre les courses hippiques et l’utilisation de la cravache, en marge du grand défilé organisé pour célébrer la Melbourne Cup la veille du jour J, dans les rues de la ville.
Le 1er décembre 2015, Racing Australia a limité l’utilisation de la cravache pendant les courses. Un jockey n’a le droit de donner que 5 coups à son cheval, (contre 8 sur les courses de plat en France), quelque soit la méthode qu'il emploie, avant d’aborder les 100 derniers mètres. 
Araldo, terrorisé par un drapeau, s'est mortellement blessé l'année dernière.