Portrait. Découvrez le destin peu commun de Thoanë Thomadra, hors des sentiers battus

Le destin peu commun de Thoanë Thomadra, hors des sentiers battus
C’est l’histoire d’une quête personnelle qui se raccroche au collectif. Entre l’urbain et le tribal, entre l’ici et l’ailleurs, Jules Thoanë Thomadra a mobilisé ses expériences diverses pour trouver sa voie, et participer à la réappropriation collective d’un patrimoine oral menacé de tomber dans l’oubli. Découvrez son portrait dans Destins peu communs.

Thoanë naît en 1971 : la même année que le quartier de Pierre-Lenquette dans lequel il grandira. Dans ce contexte de boom du nickel "tous les gens [étaient] partis pour travailler à Nouméa, abandonnant les caféiers, les vaches laitières, les poules… ça a produit toutes ces tribus qu’on appelle les ‘quartiers Nord’… Pour moi ce sont des tribus, dans lesquelles il y a des Wallisiens, des Chinois, des Blancs… toute la famille ! Depuis bien longtemps on vivait le destin commun à Pierre-Lenquette" sourit-il. Le quotidien y est alors fait d’escapades dans les cabanes ou les palétuviers à la lisière de la ville, de découvertes musicales, mais aussi des "400 coups" avec une jeunesse prise dans le tumulte des Événements.

 Après avoir échoué à obtenir un CAP électromécanicien au lycée Champagnat, Thoanë regagne Lifou. Un premier déclic : il prend réellement conscience de la richesse du terroir. Ce retour aux origines épouse bientôt la cadence de la troupe du Wetr, en pleine création sous l’impulsion de feu le grand chef Paul Sihaze au tournant des années 90.

Thoanë se retrouve embarqué dans une aventure qui l’emmènera loin. Première escale : le Festival des Arts du Pacifique aux îles Cook en 1992, alors qu’il n’a que 21 ans. "Aller dans un autre Pays pour partager notre art, avec les gens du Pacifique… On est grands, comme peuples ! C’était vraiment une belle expérience au cours de laquelle j’ai découvert plein de choses."

Un artiste "gardien" de la culture Drehu 

Vingt-quatre ans plus tard, il participera à un nouveau festival des Arts, cette fois à Guam en tant que conteur. Il y rencontre des "Kanakas" établis dans les îles du détroit de Torres, au nord de l’Australie : des descendants de Loyaltiens, partis à la fin du 19ème siècle pour la culture de la canne à sucre ou comme missionnaires au nord du Queensland. Pour celui qui s’attache désormais à puiser aux sources des traditions orales drehu, c’est une occasion en or de recueillir leur version du mythe de la création du monde, entretenue depuis leur exil.

Suite à quoi Thoanë planchera notamment sur le nom des constellations en Qene Drehu. Ce mouvement, fait d’allées et venues dans le vaste Monde, inspire les recherches de l’artiste. De 2017 à 2020, avec sa compagne Sywe et cofondatrice avec lui du groupe de musique Madjas , il vit en France : entre Charente-Maritime – côté mer, et l’Ardèche – côté terre.

Thoanë Thomadra est un artiste de Lifou - juillet 2022

Ce n’est peut-être pas un hasard si ses expériences de vie ont infusé en paraboles, qu’il distille au milieu de plaisanteries ponctuées d’un rire contagieux. Car suite à des étapes compliquées sur son chemin de vie, Thoanë a également été diacre un temps, à la tribu de Siloam. L’occasion pour lui de fédérer la jeunesse autour de projets culturels, retrouvant le sens du partage et de la transmission à travers l’acte créateur.

Désormais celui qui aime à se présenter comme un "gardien" est également guide touristique au nord de Lifou, dans la région qu’on appelle "Muj", si fertile en présences animales, végétales, aussi bien qu’en mythes. Un peu tel un "banian sacré qui relie les îles entre elles", comme le disent les paroles d’une chanson composée par Madjas, qui en référence à cette nouvelle activité s’appelle tout simplement Guide Touristique

Découvrez cet épisode ainsi que tous les autres de Destins peu Communs, l'émission qui part à la rencontre de nos identités (diffusion en radio les lundis à 14h et dimanche à 16h).