Un éleveur de Pouembout perd plus de 200 bêtes dans une crue soudaine

Vue aérienne, le lendemain de la crue qui a emporté le bétail.
À Pouembout, un éleveur de bovins a perdu 60 % de son cheptel après une montée des eaux brutale, dimanche 4 février. Il ne sait pas encore s'il pourra être indemnisé.

Le travail de toute une vie emporté par les eaux. Depuis le 4 février, Georgie Péraldi vit la hantise de tout éleveur. La mort de près de 220 de ses bêtes, taureaux, bœufs, vaches, veaux, après une crue soudaine.

"140 mm de pluie en deux heures"

Ce dimanche-là, malgré la vigilance jaune "fortes pluies et orages", la journée a été belle. Le troupeau de l’éleveur bovin a passé la journée sur une parcelle qui longe la Pouembout, sans incident. Guy Monvoisin, éleveur sur les hauteurs de la commune, n'a averti d'aucune crue ses voisins en contrebas, comme il le fait d'habitude dans ces cas-là. C'est à la tombée de la nuit que tout s'accélère. Un orage soudain éclate sur la Chaîne. Georgie Péraldi parle de 140 millimètres de pluie en moins de deux heures. La station météo du plateau de Tango, elle, a enregistré 78,4 mm. Quoi qu'il en soit, le troupeau, qui a pourtant essayé de prendre de la hauteur, se fait surprendre quand le niveau de la rivière monte d'un coup.

Une vague géante

Georgie Péraldi évoque une vague énorme qui a tout emporté. Il parle aussi d'un engravement de la Pouembout que la population demande d'évacuer depuis des années. Selon l'éleveur, cet amas de bambous et de rochers serait à l'origine des débordements de la rivière à la moindre averse. Ce n'est que le lendemain matin, vers 5 heures, que le sexagénaire et son fils découvrent l'ampleur du carnage. Avertis par un voisin qu'une de leur bête est sur son terrain, ils survolent les environs avec leur drone. Sous leurs yeux, des dizaines de carcasses enchevêtrées, recouvertes de boue et de bambous. Le "spectacle" macabre s'étale sur plusieurs kilomètres. Des bêtes ont même été retrouvées dans la mangrove et à l'embouchure de la rivière.

Des bêtes ont été retrouvées jusque dans la mangrove, à plusieurs kilomètres du lieu où elles pâturaient.

Ne pas baisser les bras

Parmi les bêtes perdues, les quatre taureaux reproducteurs du cheptel. Un cheptel constitué méticuleusement depuis des dizaines d'années, dont il reste moins d'une centaine de têtes. S'il entend bien "s'acharner et remonter quelque chose rapidement", Georgie Péraldi est conscient qu'il sera difficile de se remettre d'aplomb. Déjà il va falloir racheter des bêtes, reconstituer un patrimoine génétique productif. Et c'est sans compter le dressage des animaux pour qu'ils reconnaissent le terrain, répondent à la voix, s'habituent aux chevaux... Tous ces paramètres pris en compte, l'éleveur estime qu'il lui faudra au moins 5 ans pour être de nouveau rentable.

L'indemnisation en question

Dès lundi, Georgie Péraldi a reçu le soutien du syndicat des éleveurs et de la Chambre d’agriculture et de la pêche de Nouvelle-Calédonie (CAP-NC). La Chambre s'est rendue sur place en milieu de semaine, pour recenser le nombre de bêtes restantes et aider à chiffrer exactement les pertes qui se comptent déjà en millions. C'est ce chiffrage précis qui permettra peut-être une indemnisation. Pour Rudy Devillers, vice-président de la CAP-NC et éleveur à Koumac, il est important que Georgie Péraldi puisse être indemnisé, même si la catastrophe climatique n'est pas retenue. "On a une météo compliquée en ce moment, avec des orages très ciblés. Là on le voit, il y a eu 140 mm sur le haut de Pouembout et en bas où ils sont, il n'y a presque rien eu. On peut se faire vite avoir."

Des courriers ont d'ores et déjà été envoyés à la Chambre d'agriculture, au syndicat des éleveurs et à la Davar. La Cama, la Caisse d'assurances mutuelles agricoles, va aussi être saisie. Quoi qu'il en soit, Rudy Devillers l'assure, "l’impact aujourd’hui chez cet éleveur il est tellement élevé, on ne peut pas laisser ça comme ça."