Dix questions sur la nouvelle règlementation contre les nuisances sonores en province Sud

Dans la ligne de mire, la musique amplifiée trop forte près d'habitations.
En Nouvelle-Calédonie, deux délibérations viennent d'être adoptées par la province Sud afin de limiter le niveau sonore à proximité des bars, discothèques et autres établissements qui diffusent de la musique amplifiée. Voilà qui sonne comme une victoire, pour l’association des résidents de la Baie-des-Citrons et Ensemble pour la planète, mobilisées depuis des années sur le sujet.

Coup de clairon, contre la musique trop forte qui s'échappe de certains bars, boîtes et autres restaurants, au détriment des habitants. Jeudi 9 novembre, l'assemblée provinciale Sud a pris des mesures pour encadrer les "émissions sonores provenant des établissements ou locaux recevant du public et diffusant à titre habituel de la musique amplifiée". Qui est concerné ? A partir de quand ? NC la 1ère détaille cette nouvelle réglementation.

1 Qui est concerné ? 

Les établissements ou les locaux recevant du public, situés en province Sud, qui ont l'habitude de diffuser de la musique amplifiée. Ils seraient une quarantaine, dont quatorze à Nouméa. Concernant la notion d'habitude, il faut que ce soit le cas "sur une durée supérieure ou égale à douze jours calendaires, sur douze mois consécutifs, ou sur une durée supérieure à trois jours calendaires, sur trente jours consécutifs". Et par "calendaire", on veut dire n'importe quel jour de l'année - en semaine, en week-end, férié ou chômé. 

2 Qui échappe à la règle ? 

Les lieux qui diffusent de la musique amplifiée moins souvent que ça, et à un certain niveau sonore. Attention, c'est technique : il doit être "inférieur à 80 décibels pondérés A en période diurne [entre 7 heures et 22 heures] et 60 décibels pondérés A en période nocturne [entre 22 heures et 7 heures] après qu’un mesurage ait été réalisé par un bureau d’études à plus de cinquante centimètres des enceintes et lorsque la sonorisation est au maximum de son utilisation habituelle en tous lieux accessibles au public."

3 Qu'est-ce qu'il faut faire ? 

Etablir une étude d’impact, pour "prévenir les nuisances sonores de nature à porter atteinte à la tranquillité ou à la santé du voisinage". Elle devra comporter une étude "permettant d’estimer les niveaux de pression acoustique, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur". Un plan qui indique où sont les riverains les plus exposés. Un autre avec le nombre, la surface, la disposition, la hauteur des pièces et/ou terrasses. Où se trouvent les éléments de sonorisation. La description détaillée de ce matériel. Les dispositions pour limiter le niveau sonore, par exemple les travaux d’isolation… 
Autres obligations, enregistrer en continu les niveaux sonores auxquels le public est exposé et garder les enregistrements au moins six mois. Afficher le nombre de décibels. Ou encore, mettre en place un ou plusieurs limiteur(s) de pression acoustique.

4 Quels sont les seuils ? 

Si un endroit est concerné, il lui faudra respecter des seuils de bruit. A moins de 25 mètres de la première habitation, le son ne devra pas dépasser 60 décibels en journée, en limite de propriété. La nuit, ce sera 50 décibels. Autre exemple, au-delà de cent mètres, le seuil passe à 75 décibels la journée et 65 la nuit.

5 Est-ce que la musique live entre dans le champ ? 

Sur les baies de Nouméa, par exemple, de nombreux artistes se produisent en live. La réglementation prévoit une autorisation exceptionnelle de déroger aux seuils, à condition d'en faire la demande (détaillée) au moins quinze jours avant l'événement. 

6 Quelles sont les sanctions prévues ? 

D'une part, des sanctions administratives (consignation d’une somme correspondant au montant des travaux à faire, qui sera restituée une fois le manquement réglé, exécution d’office de mesures aux frais de l’exploitant, suspension de l’activité le temps de se mettre en règle ou de payer une amende). Autre sanction possible, une amende pour les contraventions de cinquième classe, par exemple si les documents obligatoires ne sont pas présentés. Le matériel de sonorisation pourra par ailleurs être confisqué.

7 Quand est-ce que ça entre en vigueur ? 

Pour les établissements déjà existants, à partir du 1er mai 2024, le temps de se mettre en conformité. Pour les nouveaux établissements ou locaux recevant du public, dès l'entrée en vigueur du texte. Les endroits exonérés ont aussi des obligations dans le temps, comme transmettre le calendrier de leurs événements d'ici deux mois, puis chaque trimestre. La partie vérification périodique sur site est annoncée pour le 1er novembre 2024. 

8 Comment les exploitants concernés vont-ils pouvoir s'équiper ? 

Une autre délibération a été prise. Elle instaure un dispositif pour aider les entreprises existantes à se mettre en conformité. De quoi accompagner le financement de l'étude d'impact, l'achat et la pose d'un afficheur-enregistreur, l'installation de limiteurs de pression. Montant : 50 % du coût des dépenses, dans la limite d’un million. Cette aide intervient sur deux volets qui peuvent être cumulés. 

9 Qu'en pensent les professionnels ? 

"Ce n’est peut-être pas le bon moment pour demander encore des efforts financiers", réagit Jean-Jacques Jusseau, gérant d'un bar et restaurant. "Même si une partie de ces efforts vont être pris en charge par la province. Ça reste des sommes qui vont être très lourdes." Avec des appareils pour lesquels, ajoute-t-il, “on ne sait pas où se fournir pour l'instant sur le territoire, et on n’a pas une liste de sociétés qui sont capables de faire des études acoustiques”.

10 Et les riverains ? 

A Nouméa, l’association des résidents de la Baie-des-Citrons se bat contre les nuisances sonores des bars et boîtes de nuit depuis 2015. Un engagement en lien avec Ensemble pour la planète. "Pour nous, c’est une bonne chose, sur la Baie-des-Citrons, où il y a une très grande proportion d’établissements qui produisent de la musique amplifiée", salue son président, Yves Herbaut. "Que ce soit des bars, des restaurants ou des boîtes de nuit. Les riverains sont très affectés, depuis de nombreuses années."

Voyez aussi le reportage de Brigitte Whaap et  Cédric Michaut

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