Quelles conséquences les émeutes auront-elles sur les tarifs des assurances en Nouvelle-Calédonie ?

La vie a repris dans cette rue passante de Ducos mais les ruines restent. Nouméa. Septembre 2024.
Quatrième volet de notre série consacrée aux conséquences des émeutes sur les assurances [4/5]. Faut-il s’attendre à une augmentation des tarifs ? Comment sont-ils fixés ? Éléments de réponse.

Des augmentations tarifaires, il y en a chaque année, émeutes ou pas émeutes”, en particulier sur les contrats auto et habitation, relève Frédéric Jourdain, président du comité des sociétés d’assurance (Cosoda).  

Elles sont calculées par les actuaires, en France”, explique-t-il. Les actuaires ? Des experts de l’évaluation, de la modélisation et de la gestion du risque. Chaque compagnie a les siens. "Ils vont définir les tarifs en fonction de la sinistralité constatée l’année N-1. En fonction des résultats, la hausse sera plus ou moins importante.” Si peu de sinistres ont été déclarés, elle sera faible. À l’inverse, si de nombreux dommages ont été enregistrés sur des contrats auto, habitation ou professionnel par un assureur, elle sera plus élevée. 

Un nombre de déclarations de sinistres "jamais vu"

Autant dire qu’avec 3 490 déclarations de sinistres rien que pour la période des émeutes, en 2024, du jamais-vu en Nouvelle-Calédonie, il faut s’attendre à des majorations de tarifs dans des proportions bien plus considérables qu’habituellement. Quels que soient le type d’assurance et la compagnie.  

Il y aura cependant peut-être des exceptions. “Chaque compagnie a sa politique tarifaire.” Toutes n’ont pas subi les émeutes de la même manière. Frédéric Jourdain, lui, a par exemple décidé “de n'augmenter aucun tarif sur le risque professionnel en 2025, pour aider les entreprises à se remettre à flot, ne pas leur infliger une double peine. J’ai été moins touché que d’autres assureurs sur le risque entreprises”, autrement dit, ses clients ont été plus épargnés. Ce qui lui laisse un peu plus de latitude pour “accompagner la reconstruction." 

Avec la sinistralité qu’il y a ici et 300 000 habitants, sans la mutualisation des moyens avec la France, on est inassurable.

Ghislaine Cassière, bénévole à l'UFC-Que choisir

À l’UFC-Que choisir, Ghislaine Cassière, qui a fait toute sa carrière dans les assurances, essaie de relativiser le coût des couvertures. "En Nouvelle-Calédonie, on a la chance, jusqu’à présent, de bénéficier des rapports risques/primes de la France", informe la bénévole. En gros, les statistiques calédoniennes sont intégrées aux statistiques nationales. “Sans la mutualisation des moyens, avec 300 000 habitants et la sinistralité qu’il y a ici, notamment en termes d’accidents de la route, on est inassurable. 

Des menaces de départ et des recours contre l'État

Elle, espère que les assureurs ne vont pas quitter le territoire. La menace a déjà été évoquée. “Il faut que l'État trouve des solutions ou, à terme, il n'y aura plus d'assureurs dans les outre-mer, (...) les actionnaires s’en iront”, avertissait le président de Generali France, Jean-Laurent Granier, en octobre.

La compagnie venait d’annoncer le dépôt d'un recours au civil contre l'État pour être remboursé des sommes versées à ses assurés victimes des émeutes en Nouvelle-Calédonie. D’autres assureurs présents sur le territoire ont l’intention de faire pareil : “certaines compagnies estiment que la sécurité, qui est compétence de l’État, n’était pas respectée et qu’il en va donc de sa responsabilité”, résume Frédéric Jourdain.  

Cela ne les empêchera pas d'indemniser leurs clients. ”Dans la pratique, on paie d’abord et après on se retourne contre l’État si on estime qu’il y a une faute de sa part.