Avec plus de 165 professionnels, soit l’équivalent de 100 emplois à temps plein, la filière audiovisuelle et cinématographique calédonienne est particulièrement dynamique, selon une étude réalisée par la Fédération indépendante des producteurs audiovisuels de Nouvelle-Calédonie (Fipa NC) pour le compte de la province Sud. Le secteur a ainsi généré en 2020 un chiffre d’affaires de 1,3 milliard.
Un secteur dynamique mais un marché étroit
L’étude le démontre, la production locale présente tout de même plusieurs fragilités : si le secteur est désormais bien structuré avec 72% des entreprises qui ont plus de dix années d’exercice au compteur, il est par contre peu rémunérateur avec seulement 31% des structures qui réalisent plus de 5 millions de francs de chiffre d’affaires.
Enfin, l’activité est peu diversifiée : la grande majorité des projets sont des documentaires et reportages télévisés, destinés à être diffusés localement. La fiction, hors court-métrage a beaucoup de mal à émerger.
Et si les professionnels du secteur jugent les institutions impliquées, ils n’en regrettent pas moins le fonctionnement du fonds audiovisuel et cinématographique (FAC). “Les commissions d’attribution se réunissent deux fois par an. Or, quand il n’y a pas de gouvernement, elles ne se réunissent pas. Cette situation de blocage, on l’a déjà vécu par deux fois, rappelle Catherine Marconnet, la présidente de la FIPA NC. Il faudrait changer le fonctionnement”. Une question qui devrait être évoquée cet après-midi lors d’une rencontre entre les associations de professionnels et le membre du gouvernement en charge du secteur, Yohann Lecourieux. L’aide du FAC est en effet indispensable à l’aboutissement d’une grande majorité des projets : sur la période 2017-2021, 208 projets ont été soutenus sur les 296 dossiers présentés, pour un total de 661 millions de francs.
Faire vivre la fiction locale et attirer les productions internationales
Côté fiction, la production locale est stimulée notamment par le festival du film de La Foa, mais si les clips et courts-métrages calédoniens arrivent à boucler leurs budgets, la situation est bien différente en ce qui concerne les long-métrages, dont les coûts de réalisation sont très importants.
Pour Terence Chevrin, président de l'Association calédonienne des producteurs de fiction, "le cinéma, c’est un mélange de produit culturel et d’industrie, donc évidemment on est pas éligible au mécénat, mais on fait un produit culturel. Donc pour nous ça c’est quelque-chose à travailler, que les investissements privés puissent être faisables, à travers de la défiscalisation, du crédit d'impôt. Par ailleurs, on est des petites structures et on doit investir dans du matériel qui coûte très cher donc peut-être pensé à des exonérations de taxes à l’importation, etc. Il y a aussi encore beaucoup de réseaux à tisser pour créer des passerelles dans la zone Asie-Pacifique et vendre nos films déjà dans cette zone avant peut-être la Métropole, qui nous connaît moins finalement. Et ça, il faut que ce soit une envie pays, ce n’est pas nous les petites structures qui pouvons le faire."
La venue de productions internationales permettrait également de générer de l'activité pour les entreprises locales, estiment les professionnels. "Ce qu’il faudrait, c’est faire un peu plus de séduction auprès des productions internationales pour qu’elles puissent venir tourner en Calédonie, souligne Terence Chevrin. Mais là encore pour ça, il faut qu’il y ait une volonté pays pour que la Calédonie devienne une terre de tournage attractive, pour compenser les coûts liés à la distance ou à l’hébergement, etc. Donc aujourd’hui, c’est sur ces aspects-là qu’il faut qu’on travaille."
"Il faut qu’il y ait une volonté pays pour que la Calédonie devienne une terre de tournage attractive."
Terence Chevrin
Un point de vue partagé par Catherine Marconnet : “On a les professionnels et des sites exceptionnels, Mais aujourd’hui, on n’arrive pas à attirer les productions extérieures, contrairement à nos voisins du Pacifique qui ont des politiques très incitatives”, regrette Catherine Marconnet.
La Polynésie par exemple propose aux productions extérieures s’engageant à dépenser au moins 30 millions de francs sur le territoire un régime fiscal avantageux : exonération de droits de douane, de TVA sur les achats locaux, remboursement des charges sociales sur les salaires locaux, etc.
Un coût pour la collectivité qui serait selon la FIPA compensée par les retombées : 1 franc d'aide publique à la production audiovisuelle génère 3 francs de retombées pour l'économie locale estime-t-elle.