Des talons aiguilles pour les victimes de Pam: quand la générosité confine à l'absurdité

Les Australiens se montrent très généreux quand une catastrophe naturelle frappe leurs voisins du Pacifique. Mais un rapport de la Croix Rouge montre que cette générosité occasionne des coûts supplémentaires pour les organisations humanitaires, sans aider les sinistrés.

Des chaussures à talons et des sacs à main, voici quelques uns des objets envoyés par les Australiens aux Vanuatais au lendemain du cyclone Pam, en mars 2015.

C’est ce que montre un rapport de la Croix Rouge australienne paru lundi. En tout, 70 conteneurs d’objets donnés par les Australiens ont atterri à Port Vila. 10 mois plus tard, 18 conteneurs n’avaient toujours pas été déchargés, et leur contenu trié. Des conserves alimentaires soient mélangées avec les vêtements. La plupart étaient déjà périmées.  

Bilan de l’opération: la Croix Rouge a déboursé près de 2 millions de dollars australiens pour stocker ces conteneurs, dont le contenu n’a jamais aidé les Vanuatais.

Ces dons spontanés créent un véritable casse-tête logistique et financier pour les ONG d’aide humanitaire. 

« Ces dons bien intentionnés ont pas mal d’effets négatifs. Il faut payer les coûts de stockage dans des entrepôts. Cet argent pourrait être utilise pour des choses utiles, comme l’achat et la livraison aux sinistrés de produits de première nécessité. Si on compte le coût de transport, le coût de stockage et de distribution, il y a de fortes chances que ces coûts soient supérieurs à la valeur des biens donnés », explique Joanna Pradela, du conseil australien pour le développement international (ACFID). 

Des tronçonneuses et des pulls en laine pour les victimes de Winston 

En février 2016, le même scenario s’est répété, cette fois-ci pour les victimes fidjiennes du méga cyclone Winston. Les Australiens ont envoyé des tronçonneuses, des tapis, des vêtements de sport et des pulls en laine, des objets peu utiles, qui ont encombré les aéroports et les ports des Fidji. En tout, le pays a reçu l’équivalent de 33 piscines olympiques de bric-à-brac inutilisable. Joanna Pradela:

« Souvent ce sont les gouvernements des pays sinistrés eux-mêmes qui doivent payer la facture pour ces biens. Très peu de gouvernements du Pacifique ont les moyens de gérer l’afflux de biens qui leur arrivent. »

La Croix Rouge australienne a produit ce rapport sur la générosité spontanée des Australiens pour les inciter à verser de l’argent, plutôt que de faire des dons en nature. 

« Donner de l’argent, c’est le meilleur moyen d’aider efficacement les victimes. C’est plus rapide, et plus souple. L’argent permet aux ONG et agences d’aide d’acheter les produits dont les gens ont vraiment besoin, au moment où ils en ont besoin »,rappelle Joanna Pradela. 

Mais la Croix Rouge reconnaît que les organisations humanitaires ont encore du travail devant elles pour parvenir restaurer la confiance des donateurs. Beaucoup hésitent à donner de l’argent par peur qu’il soit mal utilisé.