Chaque jour, les urgences du Médipole voient passer au moins un à deux patients victimes d’une allergie, une affection de plus en plus courante : "La fréquence des allergies a été multipliée par trois depuis quinze ans", estime le docteur Christine Delebarre, allergologue au CHU de Lille, qui vient régulièrement en Nouvelle-Calédonie pour des consultations spécialisées.
Les raisons de cette flambée sont mal connues, mais l’environnement et l’alimentation semblent en cause : "Les pratiques industrielles modifient notre alimentation, ainsi les farines sont de plus en plus concentrées en gluten, explique le Dr Sylvie Delaunay, allergologue à Nouméa. Or, ce type d’allergies est en augmentation."
Une maladie aux multiples visages
Réaction inflammatoire de l’organisme à une substance étrangère, l’allergie peut s’exprimer sous différentes formes : eczéma, rhinite, asthme, conjonctivite ou problèmes digestifs. Elle est diagnostiquée par des tests cutanés, sanguins ou des tests d’exposition et apparaître à n’importe quel stade de la vie : "Le nourrisson peut devenir allergique très tôt au lait, mais on peut devenir allergique plus tard à d’autres aliments, on peut devenir allergique à des pollens, on peut devenir allergique à l’âge adulte à la crevette alors qu’on en a mangé pendant dix, quinze ans, sans faire le moindre symptôme, explique le Dr Delaunay. L’allergie, c’est un tapis roulant, c’est évolutif, certaines allergies alimentaires qui sont présentes très tôt peuvent disparaître, d’autres qui apparaissent plus tard vont parfois, souvent, persister toute la vie."
Ainsi l’allergie au lait qui inquiète nombre de parents de jeunes enfants disparaît dans la plupart des cas, ce qui n’est pas le cas des allergies aux fruits à coque par exemple.
Dans le cas des allergies alimentaires, l’interdiction totale (appelée éviction) fait place depuis plusieurs années à des stratégies de désensibilisation. Il s’agit alors "de déterminer dans un premier temps à partir de quelle quantité l’allergie est déclenchée et de réintroduire toutes petites quantités d’aliments au fur et à mesure, indique le Dr Delebarre. Il s’agit de redonner de la qualité de vie aux patients, et surtout en le rendant tolérant d’éviter les réactions graves en cas d’ingestion involontaire."
La prévention, une nécessité
Quel que soit le niveau de gravité, la prise en charge de l’allergie commence par la prévention (éviction, contrôle de l’environnement), avant la prescription de médicaments, les anti-histaminiques, et lorsque cela est possible la désensibilisation, un processus qui peut prendre trois à cinq ans.
En général, le médecin allergologue recherche également d’autres allergènes que celui qui a conduit à la consultation : "Quelqu’un qui a une allergie aux acariens a plus de risque de devenir allergique à la crevette, explique le Dr Sylvie Delaunay. Pourquoi ? Parce que les acariens ont à leur surface des protéines qui sont communes avec les crevettes. Cette communauté moléculaire fait que vous avez plus de risques de faire de l’allergie alimentaire si vous êtes allergique aux acariens." Des allergies dites croisées, dont il est important d’avoir connaissance, l’allergie pouvant – sans être une fatalité - se déclarer à n’importe quel moment.
Certaines allergies particulièrement sévères peuvent en effet provoquer un choc anaphylactique ou un œdème de Quincke : "C’est la réaction extrêmement brutale de l’organisme lui-même qui va mettre en danger, précise le Dr Elodie Gigon. Le malade va être en difficulté sur le plan cardiologique, sur le plan respiratoire, ce qui peut aller jusqu’décès."