Une coque en aluminium, une cabine, un moteur de 200 chevaux, voici Filowima, un bateau entièrement conçu et fabriqué en Nouvelle-Calédonie. "On a une coque qui passe bien la mer, une bonne stabilité : c'est un bateau très pratique, utile, garantit Vincent Reuillard, gérant de l'entreprise AMC sud, basée à Ducos. On peut être à six dessus, avec une tonne de chargement et le bateau a un bon comportement."
Des bateaux calédoniens
Ce prototype n’est pas sorti d’un chantier naval, mais des ateliers d’une société spécialisée en chaudronnerie et en fabrication de pièces métalliques pour le secteur du nickel. Fin 2023, en pleine crise du secteur, Vincent Reuillard se rend au Vanuatu et trouve une idée lumineuse pour diversifier les activités de l’entreprise.
"Je me suis rendu compte que là-bas, tous les bateaux de pêcheurs et d'excursions touristiques étaient les mêmes, et qu'ils étaient fabriqués dans la capitale. Je me suis dit : 'pourquoi on ne fabrique pas nos bateaux en Calédonie ?' On est tournés vers la mer, mais dans les marinas il n'y a que des bateaux australiens et néo-zélandais. C'est comme ça qu'est venu ce projet."
Un chiffre d'affaires en baisse de 65%
De retour à Nouméa, Vincent contacte les affaires maritimes, fait une étude de marché et rencontre Tony Laubreaux, architecte naval. "J'ai été très intéressé par son projet puisque la conception des navires c'est mon métier : c'est un bateau construit en local, en aluminium, adapté à la plaisance et aux professionnels."
Ce qui m'a beaucoup plu, c'est la qualité du travail de la société. On est facilement au niveau du standard des Australiens et des Néo-Zélandais, et peut-être même mieux.
Tony Laubreaux, architecte naval
AMC sud, qui fêtait ses 60 ans d'existence l'an dernier, reste performante, malgré la crise du nickel et les émeutes de 2024. Pourtant, en l'espace de quelques années, la société a perdu 65 % de son chiffre d’affaires et plus de la moitié de ses employés. Pour ceux qui restent, ce virage nautique est une bouffée d’oxygène.
Aventure technique
"C'est une aventure technique qui est vraiment enthousiasmante pour l'entreprise et les salariés. Tout le monde est à fond dans ce projet, qui nous a aidé à traverser l'année 2024 avec un peu de positif, se réjouit Vincent Reuillard. Rien que ça, c'est bon à prendre. Aujourd'hui la Nouvelle-Calédonie n'a pas d'énormes besoins en termes de bateaux, les pêcheurs ne sont plus trop aidés, mais j'espère qu'à un moment donné la situation va changer et qu'on vendra à nouveau des bateaux". Dans l’attente, l’équipe travaille déjà sur un prototype d’annexe et bientôt de catamaran à moteur.
Repenser ou diversifier son activité professionnelle est une question de survie pour certaines entreprises. Comment le 18e gouvernement peut-il aider ces initiatives ? "Il y a une problématique pour les entreprises qui souhaitent reconstruire la Nouvelle-Calédonie et leur outil productif, confirme Christopher Gygès, le membre en charge de l'économie, du travail et de l'emploi. On a un devoir moral d'être à leurs côtés, de les accompagner, de permettre que les indemnités d'assurances soient versées, et qu'ils soient réassurés. On lancera très prochainement un guichet unique pour simplifier les formalités administratives, avec la chambre de commerce et d'industrie."