A l'invitation d'Edouard Fritch, le Haut Commissaire a rencontré vendredi à la présidence les maires venus participer au congrès des communes. Lionel Beffre a longuement évoqué le contrat de projet 2015 / 2020 et le FIP, leviers d'un partenariat opérationnel entre l'Etat, le pays et les communes.
DISCOURS de M. LIONEL BEFFRE HAUT-COMMISSAIRE DE LA REPUBLIQUE LE 18 SEPTEMBRE 2015 A L'OCCASION DE LA RENCONTRE AVEC LES MAIRES
Monsieur le président de la Polynésie française,
Monsieur le président de l’Assemblée de la Polynésie française,
Madame et Monsieur les députés, Madame et Monsieur les sénateurs,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les représentants à l’Assemblée de Polynésie française,
Monsieur le président du Syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française,
Monsieur le président du Conseil Supérieur de la Fonction Publique Communale,
Mesdames et Messieurs les maires,
Mesdames et Messieurs les maires délégués, les adjoints et conseillers municipaux,
Mesdames, messieurs les chefs de services de l’Etat, du Pays et des communes,
Mesdames, Messieurs,
J’ai la chance de pouvoir m’exprimer, une nouvelle fois, devant vous cette semaine. Dans une configuration quelque peu différente puisque nous sommes aujourd’hui invités par le Président de la Polynésie française.
Les trois piliers institutionnels, le Pays, les communes et l’Etat, sont réunis aujourd’hui. Vous le savez, nous devons travailler ensemble et avec un même objectif : celui du développement de la Polynésie française. Si un seul pilier de ce trépied institutionnel fait défaut, tout projet est instable ou tout du moins, peu durable.
Je souhaiterais donc vous parler aujourd’hui du partenariat Etat-Pays-Communes que nous devons conforter pour atteindre des objectifs communs et ambitieux.
Le partenariat le plus évident et pourtant le plus récent entre l’Etat, le Pays et les communes, c’est le contrat de projets 2015-2020 relatif aux investissements communaux. Je vous rappelle les chiffres, que je vous ai déjà indiqués lundi, il est doté de 12 milliards de francs sur 6 ans. Il faut d’ailleurs saluer le travail des équipes du Pays, du SPC et de l’Etat sans qui la signature de ce contrat de projets en mars dernier en présence de la Ministre des Outre-Mer n’aurait pas été possible.
Cet outil est destiné à aider l’investissement des communes. Il représente une grande avancée puisqu’il est plus simple, plus efficace et plus directement utile aux communes que les dispositifs précédents.
Il a déjà prouvé son efficacité avec la programmation, lors du dernier comité de pilotage, de 10 projets structurants dans le domaine des services publics environnementaux. Ces projets représentent 2,18 milliards de francs d’investissement qui seront directement injectés dans l’économie polynésienne. Ils sont financés à part égales entre l’Etat et le Pays à hauteur de 85%, le reste étant à la charge des communes. Je vous invite, Mesdames et Messieurs les maires, à engager sans tarder ces chantiers, indispensables à la bonne santé de l’économie polynésienne.
Le prochain comité de pilotage aura très certainement lieu en octobre ou en novembre cette année, il permettra de programmer des chantiers sur les budgets de 2015 et 2016. Il est important que vous nous présentiez, à cette occasion, des projets complets afin que nous puissions les lancer le plus rapidement possible. Nous avons une responsabilité collective à démarrer rapidement les opérations programmées pour faire réussir ce partenariat ambitieux.
Un autre partenariat évident entre les trois institutions, c’est le Fonds Intercommunal de péréquation, le FIP. L’Etat versera, au titre de l’année 2015, plus de 2 milliards de francs dans ce fonds destiné aux communes.
A ce sujet, je tiens d’ailleurs à souligner que l’année dernière, le SPC a beaucoup oeuvré avec le Pays et l’Etat afin de définir les critères de répartition, entre les différentes communes, des dotations non affectées du FIP. Ce fut un travail long et difficile car les critères précédents n’étaient pas suffisamment explicites et objectifs. Les nouveaux critères ont été adoptés de manière consensuelle et unanime lors du comité des finances locales en 2014, je tiens à remercier tout le monde pour le travail réalisé.
Il faut souligner également l’effort important consenti par le Pays pour ce fonds. Il a, en effet, doublé, entre 2014 et 2015, le montant du rattrapage de ses contributions des années antérieures en passant de 500 millions de francs en 2014 à plus de 1 milliard de francs en 2015.
Cependant, ces partenariats qui nous lient n’épuisent pas le sujet. D’autres vecteurs nous permettent de réaliser des projets ambitieux ensemble. Ils nécessitent tous la participation du trépied institutionnel.
C’est le cas par exemple du contrat de projet Etat / Pays. Si les communes ne sont pas directement parties à ces contrats, elles ne sont pas moins indispensables à la bonne marche de ces projets dont elles profitent directement et à plusieurs titres :
Ces projets sont d’abord un vecteur de développement important. Des montants conséquents sont dépensés. Par exemple, lors du dernier comité de pilotage en août, 6 opérations de logement social ont été programmées. Le total de ces investissements s’élève à 3,3 milliards de francs, financés à parité par l’Etat et la Polynésie française. Ces chantiers vont soutenir l’activité et de créer de l’emploi dans vos communes. On estime, par exemple, que les premiers chantiers programmés en août dernier vont mobiliser pendant 24 mois plus de 660 personnes, dont 300 dans les archipels.
Ces projets permettent aussi de résoudre, en partie, le problème des logements insalubres. Vous le savez mieux que quiconque, le manque de logement social est criant, ici, en Polynésie française, mais aussi en métropole ou dans le reste des outre-mer. Près de 5 000 demandes sont en attente en Polynésie française.
Je veux aussi souligner que ces programmes ne sont pas exclusivement à destination des agglomérations polynésiennes puisque nous mettons en place un projet d’habitat dispersé dans les archipels. Il s’agit de financer des farés sociaux au bénéfice des familles possédant des terrains constructibles mais aussi grâce à la mise à disposition du foncier du Pays. Personne ne doit être oublié, du fait de ses difficultés sociales ou de son éloignement.
Voici donc pour les exemples de partenariats qui fonctionnent entre nos trois institutions, mais nous pouvons aller plus loin et rendre ces instruments encore plus efficaces.
Ils seront d’autant plus performants que nous nous nous dirigerons vers une simplification des règlementations. Le statut d’autonomie de la loi organique du 27 février 2004 permet au Pays de définir ses propres politiques publiques. C’est aussi une opportunité pour simplifier les textes. Cette simplification sera bénéfique pour tous :
Les règlementations seront plus simples à rédiger pour le gouvernement polynésien,
Elles seront plus simples à appliquer pour les communes,
Et elles seront plus simples à contrôler pour l’Etat.
Pour prendre un exemple : les services environnementaux. Le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) vous fixe des obligations. Mais ces obligations concernent principalement le cadre général d’organisation des services. Le CGCT donne des grands principes : celui de la potabilité bien sûr, mais aussi celui de la transparence, l’obligation de publier des rapports pour rendre compte, celui du pollueur-payeur, l’obligation d’équilibre des budgets, l’idée que, par exemple, « l’eau paye l’eau », c’est-à-dire que le service de l’eau est payé par les factures d’eau, etc…
En revanche, la règlementation sanitaire ou environnementale est de la compétence du Pays. Le Pays peut donc définir des règlementations adaptées aux spécificités polynésiennes.
Par exemple, dans le domaine de l’eau et la question des contrôles. L’obligation de réaliser des analyses de potabilité de l’eau en laboratoire semble peu adaptée à des communes éloignées qui ne disposent pas de liaison aérienne comme Rapa. Grâce à des innovations récentes, il est possible maintenant faire des analyses in situ parfaitement fiables. Ces solutions simples et adaptées pourraient être étudiées pour faire évoluer la règlementation, sans avoir à transiger sur la qualité des services rendus aux habitants.
S’agissant des déchets, l’application de la règlementation actuelle sur les centres d’enfouissement technique est adaptée aux îles hautes, et nous avons déjà des exemples de réussite. Elle est, en revanche, plus difficile
pour les îles basses où le terrassement est plus problématique. Je sais que des études vont être lancées afin de concevoir des solutions innovantes, notamment aux Tuamotu. Si elles s’avèrent concluantes, des évolutions de la règlementation pourraient être envisagées. Il faut continuer dans cette direction pour concevoir des solutions simples et adaptées aux problèmes auxquels sont confrontées les communes. Cela pourra d’ailleurs bénéficier à toute la région pacifique. Des solutions adaptées à la Polynésie française dans le domaine environnemental pourraient, en effet, servir d’exemple pour d’autres îles.
Au-delà de la simplification, l’impact de ces partenariats peut être amplifié et démultiplié grâce à la mutualisation.
Bien sûr, quand on parle de mutualisation devant des maires, ils pensent immédiatement aux communautés de communes. Elles peuvent être très efficace, si les communes ont un projet commun, partagé, mobilisateur et rassembleur. Mais il faut être vigilant. Les exemples d’échecs ne manquent pas dans ce domaine, surtout quand des communautés de communes ont été créées pour des raisons politiques, ou bien uniquement pour bénéficier d’un effet d’aubaine financier.
Vous avez, à votre disposition, d’autres moyens de mutualisation. On observe plusieurs expériences réussies en Polynésie française : le SMO, le Syndicat Mixte Ouvert, qui gère les déchets des îles du vent, ou le SIVU, le syndicat intercommunal à vocation unique, qui se charge de mettre en place un schéma directeur pour l’assainissement collectif à Pirae et Arue.
Dans le domaine de la protection civile, nous pouvons citer aussi un exemple de réussite. Il s’agit de la mise en place prochaine d’un centre de traitement de l’alerte (CTA) commun à trois communes : Arue, Pirae et Mahina. Ce centre permettra de répondre, 24h sur 24, 7 jours sur 7 aux sollicitations des habitants en cas d’urgence. Il présente un double avantage pour les communes :
D’abord il permettra, grâce à des outils informatiques modernes, de fiabiliser la réception des appels d’urgence et d’assurer un meilleur service pour les habitants.
Grâce à cette mutualisation, les communes auront également la possibilité de réaffecter une partie des ressources humaines dédiées à ce service vers des fonctions opérationnelles.
Ce projet est une solution gagnant-gagnant. Il permet aux communes de fournir un service de meilleure qualité aux habitants, pour un coût moindre.
Pour la création de ce centre, un appel d’offre a été publié à la fin du mois d’août. Le CTA devrait être mis en service au courant du deuxième trimestre 2016. Ce projet de mutualisation a d’ailleurs reçu le soutien financier du Pays et de l’Etat par l’intermédiaire du FIP qui finance à 100% le matériel informatique. Voici donc un beau projet, il peut en inspirer d’autres.
Pour résumer et pour conclure, nous disposons d’instruments de partenariat qui font leurs preuves : nous les faisons évoluer par consensus, ce qui est signe de bonne santé (par exemple pour les critères du FIP) et nous programmons de nombreux chantiers.
Pour aller au-delà, je viens d’esquisser certaines orientations : la simplification des textes et la mutualisation qui sont de nature à renforcer l’impact de ces partenariats. Il vous appartient, au Pays dans le cadre du statut d’autonomie, aux communes dans le cadre de leurs compétences, de poursuivre la réflexion sur ces sujets. L’Etat sera présent pour vous accompagner dans cette réflexion.