Intercontinental Moorea : licenciés et désormais oubliés

2 050 emplois perdus en 2020 ! La première baisse depuis cinq ans. En cause, la crise sanitaire bien sûr. L'administration et la construction sont épargnées. Parmi les secteurs les plus touchés, la perliculture, le commerce, ou l'hôtellerie comme à Moorea où 192 personnes ont perdu leur emploi.

"Ils ont pas pensé à toutes les personnes qui n’ont plus de travail. Ils ont pas pensé comme ça. C’est comme si on prenait un papier qu’on chiffonne qu’on jette à la poubelle tu vois". Une année que ce sentiment habite Anna. Licenciée économique d’un hôtel où elle a travaillé durant 20 ans.

Sa générosité, elle ne l’a pas perdue, bien au contraire. Elle aide bénévolement sa maman à tenir un parking. Mais avec un loyer de 60 000 cfp à payer chaque mois et un enfant de 2 ans à charge, Anna FOLITUU s’inquiète chaque jour pour son avenir. "Ils n'ont pas pensé à toutes les personnes qui ont des enfants. Ils n'ont pas pensé à toutes les personnes qui ont des crédits. Ils n'ont pas pensé à toutes les personnes qui ont beaucoup de choses à payer tous les mois. Surtout qu’avec la crise qu’on a en ce moment c’est pas facile de trouver du travail. C’est pas facile", dit amèrement cette ex-employée de restauration.

 

Angélique en témoigne. Elle qui a travaillé près de 7 ans avec Anna. Elle perd son CDI en octobre 2020. S’ensuit dès lors une longue attente, où elle dépose de nombreux CV, avec toujours la même réponse : pas d’embauche de salarié. 

Alors en février, elle prend une patente. Elle décroche finalement des extras comme femme de ménage dans des pensions de famille. Mais aujourd’hui, elle gagne 2 fois moins qu’avant. "J’ai fait un prêt, et là j’ai un loyer à payer et j’ai 4 enfants à nourrir... Mentalement c’est dur, par rapport à ce que j’ai eu à l’Intercontinental. Enfin, ça a été un cauchemar pour moi", souligne Angélique TUAHU, elle aussi ex-employée de restauration. 

 

Pêcher pour se nourrir, Igino l’a appris sur son île natale à Mangareva. En 1987, il est embauché dans un hôtel de Moorea. De plongeur en cuisine, il finira par devenir chef pâtissier en 2000.

Il consacre 32 ans de sa vie à sa carrière, quand l’annonce du licenciement tombe. A cela s’ajoutent des soucis de santé. "Mon médecin il m’a dit, tu ne peux plus travailler, t’as un problème de santé grave. Alors il a fait tout son possible pour que je puisse avoir ma retraite". Cette retraite, "ça m’a sauvé un peu...que je puisse vivre dignement", assure Igino TEAGAI, ancien chef pâtissier. 

 

Avec sa femme Eloïse, ils ont consacré leur vie à cet hôtel. 

Elle était femme de ménage pendant 30 ans. A la retraite, elle gagne désormais 110 000 cfp par mois. Heureusement, leur maison leur appartient. Mais le coût de la vie est tellement cher qu’ils ont d’autres projets pour l’avenir. "On va se préparer aussi pour rentrer chez moi à Tupuai. Peut-être l’année prochaine. Pour y vivre. Et ici on va laisser pour les enfants", dit-elle. Car à Tupuai, ce sera plus simple. "Là bas je peux aller pêcher, je peux faire mon petit faapu, potager. Et je peux vivre."

 

Vivre et non survivre... Cet espoir anime les licenciés économiques de la crise liée au covid. 

Car à l’exception de ce couple, tous aspirent à retrouver un emploi stable.