1ère séance administrative à l'Assemblée : le discours de Gaston Flosse

L'intégralité du discours de Gaston Flosse
Allocution de Monsieur Gaston FLOSSE,
Président-Sénateur de la Polynésie française

OUVERTURE DE LA SESSION ADMINISTRATIVE

Jeudi 10 avril 2014 à 09H00 – Assemblée de la Polynésie française
 
Monsieur le Président de l’Assemblée
de la Polynésie française,
Mesdames et Messieurs les Représentants,
Mesdames et Messieurs les Maires,
Mesdames et Messieurs,
 
L’ouverture de la session administrative de cette Assemblée présente un caractère particulier cette année. Elle intervient, en effet, après les élections municipales. Je me plais à saluer les maires ici présents qui ont pu répondre à l’invitation du Président de l’assembléeet à les féliciter pour leur élection.
Selon les derniers pointages qui m’ont été fournis, sur 45 maires désignés jusqu’à présent, 30 sont Tahoera’a Huiraatira soit les 2 tiers, 3 sont Tavini, 7 sont ATP et 5 n’appartiennent à aucun mouvement comme cela arrive souvent dans les élections locales.
Est-ce là, la soit disant demi-défaite qui nous aurait été infligée, comme ont tenté de l’accréditer les médias et d’illustres politologues que nous connaissons tous bien ? Des défaites comme celle-là, j’aurais voulu en connaître tout au long de ma carrière politique !
Personne n’a pensé à pleurer sur les résultats du Tavini qui ne détient que 3 mairies sur 45, ou du mouvement ATP dont le leader n’a même pas pu devenir Maire alors qu’il en brûlait d’envie.
Il y a pourtant des commentateurs en cour auprès des médias pour faire gagner dans l’opinion une opposition qui a perdu dans les urnes.
En fait, et quoique nos détracteurs attitrés en disent, les municipales ont témoigné du maintien de la confiance populaire en notre majorité et en notre gouvernement. C’est un encouragement pour nous. C’est une nouvelle marque de confiance après les législatives et les territoriales.
Voilà ce que je tenais d’emblée à dire devant vous et à l’adresse de tous les Polynésiens.
Pour moi, le débat artificiellement provoqué par les médiassur le résultat de ces élections est clos.
Venons-en à l’essentiel.
*
*    *
Près de douze mois ont passé depuis que votre assemblée m’a porté à la présidence de la Polynésie française. Un an, c’est court et c’est long tout à la fois. C’est court, c’est très court quand tout est à faire ou à refaire. Et, justement, tout était à rebâtir: l’emploi en déroute, les finances publiques ruinées, interdisant tout sursaut,la cohésion sociale gravement mise en péril, l’économie en pleine récession. Le tableau clinique, comme disent les médecins, pouvait difficilement être pire ! Quand il faut redresser tout cela, et tout cela en même temps, oui, un an, c’est court !
Je ne vous avais d’ailleurs pas caché qu’il faudrait plus d’un an pour que le développement soit à nouveau durablement assuré.
Cependant, pour ceux qui attendent la sortie du gouffre, et qui l’attendaient depuis des années, un an, c’est long !Parce que c’est un an de plus! Hé bien voyez-vous, pour moi aussi, c’est trop long.
La seule solution c’est l’action : Avançons ! Jour après jour, avançons !Nous sommesen situation d’urgence :
Nous qui gouvernons.
Et, plus encore, la population et les entreprises.
La société civile compte sur nous. Je le sais.
Je ne me ménage pas. Je talonne les ministres jusqu’à les harasser. Mais je salue leur dévouement.
Vous-mêmes, vous avez siégé presque douze mois sur douze.
Je tiens à rendre hommage à votre travail et saluer la qualité de vos débats sous la présidence éclairée d’Edouard FRITCH que je félicite.
Il a montré sa stature et ses immenses compétences.
Mais les élus doivent pouvoir s’appuyer sur une administration efficace.
C’est pourquoi j’ai rappelé aux chefs de service il y a quelques semaines que servir est un honneur. C’est aussi un devoir.
Bref, plutôt que de mendier du temps, je veille à ce que chaque heure, chaque jour qui passe, soient pleinement efficace !
Je pense donc pouvoir, en conscience, prendre à témoin tous les Polynésiens, et d’abord vous-mêmes, Mesdames et Messieurs les Représentants, de ce fait:
La trop brève année qui vient de s’écouler, a été bien et pleinement employée.
Elle l’a été en conformité avec les engagements que nous avons pris devant le peuple !
Fondamentalement, nous nous étions engagés sur deux priorités:tendre la main sans délai aux plus démunis et redresser les finances publiques désastreuses qu’on nous avait léguées.
Nous avons fait l’un et l’autre et dans les délais que nous nous étions fixés.
Malgré la crise financière, notre préoccupation la plus immédiate a été de secourir les personnes et les familles dans la misère. La création du Secours à la famille « Te Tauturu Utuafare » a constitué notre première réponse à cette situation. Du 12 juin, date de sa mise en œuvre, au 31 décembre, ont été ainsi secourues, au moins, 22.000 personnes.
Ceci s’est accompagné d’un relèvement significatif des allocations familiales et du minimum vieillesse du RST.
Près de 20 000 enfants et 1750 personnes âgées en ont été, respectivement, les bénéficiaires.
Un centre d’hébergement d’urgence a été ouvert pour lespersonnes sans abri.
Simultanément, nous avons conçu et vous avez voté la loi du pays créant le Contrat d’Accès à l’Emploi, le CAE. Puis-je rappeler que ce dispositif a été immédiatement attaqué ?
A n’en pas douter, l’UPLD craignait que la nouvelle majorité et le gouvernement ne parviennent à offrir rapidement des emplois à tous ceux qui souhaitent désespérément y accéder.
Ce sabotage politicien a réussi. Il suffit de déposer un recours, si fantaisiste soit-il, pour bloquer durant des mois, voire plus d’une année, des mesures urgentes.
Le résultat de cette manœuvre a été de retarder l’entrée en vigueur du CAE jusqu’aux premiers jours de 2014.
J’ai peine à comprendre que l’UPLD, un parti polynésien qui se veut populaire, subordonne le sort de Polynésiens  en détresse, à ses calculsélectoraux.
Bien entendu, dès l’instant où la loi du pays a été promulguée, nous avons tout mis en œuvre pour rattraper le temps perdu.
A ce jour, 1.824 demandes d’agrément ont fait l’objet d’une décision favorable et plus d’un milliard de Francs ont été engagés pour faire face au coût de cette action.Ainsi, mesdames et messieurs les Représentants, nous avons intégralement rempli nos engagements envers les plus défavorisés.
Dans le même temps, nous avons réussi l’authentique exploit de redresser les finances publiques. Dois-je rappeler qu’Oscar TEMARU nous avait laissé 54 milliards de dettes ?Nous avons dû augmenter les impôts des entreprises les plus importantes et des citoyens les plus aisés, comme nous l’avions annoncé.
L’accroissement de la fiscalité n’est jamais populaire, maisnos concitoyens ont bien compris l’enjeu de ces décisions et ont accepté cet effort. Je leur en suis reconnaissant. Nous avons pris nos responsabilités.
Nous les avons prises également en abaissant de cinq points l’impôt sur les sociétés. Nous savons, en effet, que la relance passe par la bonne santé des entreprises.
Permettez-moi donc d’insister sur l’effort consenti à leur bénéfice. Cinq points de moins, cela veut dire qu’un impôt qui s’étageait de 30 à 40%, se situe maintenant entre 25 et 35% soit une baisse de 17% pour les sociétés qui étaient taxées à 30%.
De sévères économies budgétaires ont accompagné le « train fiscal ». Nous avons rogné sur les dépenses ordinaires de l’administration, diminué la plupart des subventionset imposé des sacrifices aux ministres et aux élus.
Vigoureusement resserré, le budget de fonctionnement de 2014 est aussi un budget sincère alors que ceux de nos prédécesseurs avaient été falsifiés.
M. RenéDosières, rapporteur spécial du budget de l’outre-mer à l’Assemblée nationale et qui ne prétend pas être de nos amis, aestimé ces falsifications à 20 ou 30% du budget.
L’Etat, aussi bien que Standard & Poor’s, ont pris acte de la scrupuleuse rigueur avec laquelle nous avons établi notre budget.
C’était la condition première du retour à la confiance de nos partenaires.
Nous l’avons remplie et nous en tirons le bénéfice attendu du côté des prêteurs tandis que l’Etat a appuyé nos efforts par une avance de trésorerie, facilitant un rapide retour de notre collectivité à la solvabilité.
Ce budget n’est pas seulement un budget transparent et honnête qui honore cette assemblée et le gouvernement.
C’est aussi un budget de solidarité et d’avenir. A cet égard, l’argent est allé là où nous avions dit qu’il irait.
Ainsi, il alimente le Fonds pour l’Emploi et la Lutte contre la Pauvreté afin de financer, notamment, le CAE et, pour partie, le déficit alarmant du RST. Quant à la couverture de ce déficit,nous attendons de savoir si l’Etat consentira à faire jouer à nouveau la solidarité nationale en faveur des Polynésiens.
Bien entendu, nous n’attendons pas tout de l’Etat en ce domaine.
Le financement du RST repose en effet essentiellement sur la CST, que nous avons déjà augmentée.
Aussi nous sommes-nous engagés à réformer le dispositif du RST. L’objectif est de réserver l’accès à ce régime aux personnes réellement dépourvues de ressources, en assurant un contrôle renforcé.
Ce n’est pas un dossier facile, car nous tenons à notre couverture sociale pour tous, mais nous ne voulons pasde fraudeurs comme nous ne voulons pas imposer des charges excessives à ceux qui travaillent.
Nous ne pourrons résoudre ce dilemme qu’en développant notre économie, en générant des revenus et des emplois, c’est-à-dire des capacités de contributions au système social.
C’est pourquoi la destination prioritaire de nos recettes budgétaires est l’investissement public.
 
Alors que le montant de liquidation des dépenses d’investissement avait chuté à 12 milliards en 2012, les crédits de paiement disponibles pour 2014 s’élèvent à 37 milliards 410 millions. Je souligne qu’il ne s’agit pas là de simples inscriptions budgétaires mais de fonds qui seront réellement disponibles du fait de notre solvabilité reconquise.
Déjà, le second semestre de 2013 a connu unenette augmentation des paiements aux entreprises et des engagements de travaux.
Le 6 février dernier, j’ai présenté aux professionnels puis au public le programme des opérations d’investissementpour 2014.
A lui seul, je le rappelle, le ministère de l’Equipement disposera de 18 milliards de crédits de paiement.
A ces 18 milliards d’investissements s’ajoutent les dépenses de tous les opérateurs présents en Polynésie française.
L’OPT va commencer 1,7 milliard de travaux pour le centre de tri postal de Faa’a en mai prochain.
L’OPT débutera la reconstruction de son siège avant octobre, pour son transfert du Parc Bougainville à l’avenue Prince Hinoi. Le montant de ces travaux est estimé à 5,4 milliards.
Le Port autonome a entamé un programme de 3 milliards.
L’aéroport va démarrer des travaux de rénovations pour 1,9 milliards.
Le logement social, enfin, disposera de 10 milliards de crédits.
Je n’oublie pas de rappeler que l’Etat de son côté et pour son compte a lancé d’importants travaux pour un montant d’environ 15 milliards.
L’Etat participe également aux dépenses d’investissements de la Polynésie française par le Contrat de Projets, le Fonds Exceptionnel d’Investissement, et le 3è instrument financier.
Il ne fait aucun doute que cette importante injection de crédits publics ou parapublicsva avoir et commence déjà à avoir un effet d’entraînement sur l’économie et, à terme rapproché, sur l’emploi.
C’était le volet premier du plan de relance. J’ai accordé priorité à son élaboration.
Mais il faut maintenant passer à une exécution rapide des dépenses.
Or j’ai constaté que les uns et les autres n’ont eu de cesse de compliquer le dispositif.
Le statut tout d’abord, dans lequel, sous couvert de transparence, l’Assemblée Nationale a multiplié les procédures.
Mais nous-mêmes en créant une foule de dispositions souvent inutiles, nous avons contribué à notre paralysie.
Il faut aujourd’hui plus de trois mois entre l’écriture d’une convention avec l’Etat et sa mise en application !
Notre administration compte 510 commissions dont la consultation freine encore plus les décisions à prendre.
J’ai déjà entamé la tâche de rénover tout ce fatras bureaucratique dont les fonctionnaires eux-mêmes souffrent.
La bureaucratie ne doit pas non plus envahir l’espace social.
La construction d’une économie polynésienne durable, exige que l’économie trouve en elle-même ses ressorts.
Pour cela, il faut lui faciliter la tâche en la libérant de contraintes inutiles ou excessives et en créant un environnement juridique favorable à l’emploi, à l’investissement et à l’initiative privée.
Telle était la mission que j’avais assignée au vice-président.
Une première ébauche avait été élaborée en début d’année mais elle m’avait semblé devoir être complétée par diverses contributions des ministres.
Nous avons donc pris un peu plus de temps pour aboutir à un véritable plan de refondation de l’environnement économique.
Je me propose de vous en exposer la philosophie sans entrer dans l’énumération détaillée de chacune des cinquante mesures que le conseil des ministres a retenues.
Celles-ci seront regroupées dans un document imprimé.
Elles seront également présentées aux chefs d’entreprises et au public lors d’une réunion au cours de laquelle le vice-président, les ministres et moi-même leur exposeront en détail les dispositions arrêtées.
Le plan comporte trois axes majeurs :
-            Favoriser la création d’emplois,
-            Dynamiser nos principales potentialités économiques,
-            Renforcer la compétitivité de l’économie.
Dans une économie déprimée, la création d’emploi passe d’abordpar la dépense publique. Le plan s’appuie donc sur le vaste programme de travaux publics de toute sorte dont je vous ai rappelé la teneur.
Simultanément, nous entendons faciliter l’embauche par un assouplissement du droit du travail.
Il consiste à mettre en place: le « contrat de chantier ». Celui-ci proportionne la durée du contrat à celle du chantier pour lequel on embauche une personne.
La relance de l’emploi passe également par l’assouplissement de l’utilisation du chèque emploi/service.
Un projet de loi du pays permettra de déplafonner le nombre d’heures mensuelles autorisées afin de permettre un mi-temps.
Une autre loi du pays en préparation aura pour objet de fixer un cadre réglementaire incitatif aux sociétés de placement de personnes.
Permettre aux ménages de se loger en investissant constitue un autre objectif privilégié.
Nous avons élaboré, à cet effet, un dispositif facilitant l’accession à la propriété. Il comporte une prime pour l’acquisition d’un logement neuf. Elle sera attribuée sous condition de revenus et plafonnée, à cet effet, à quatre SMIG.
Le dispositif s’accompagnera d’une réduction importante des droits d’enregistrement.
Les primo acquéreurs se verraient offrir un taux zéro pour la tranche inférieure à 15 millions et un taux de 2% au lieu de 7%, au-delà. Nous attendons de ces deux mesures une dynamisation sensible du logement intermédiaire.
En matière de logement social,nous mettons la dernière main à une loi de pays qui permettra d’agréer des opérateurs privés pour la réalisation de logements sociaux.
Le second axe du plan de relance porte sur la dynamisation de nos potentialités : le tourisme, les ressources de la mer et de la terre et le recours aux énergies renouvelables.
S’agissant du tourisme, notre action s’inscrit en deux temps : tout d’abord nous devons améliorer et diversifier notre produit.
Le réaménagement de nos sites terrestres sera entrepris dès cette année. Par ailleurs, des mesures d’encouragement au tourisme nautique seront prises.
Puis nous entamerons la réalisation de projets à plus long terme.
La création de grands complexes hôteliers et de loisir ainsi que l’accroissement et la diversification simultanés de l’offre de transport aérien, constituent le thème majeur de notre politique de développement touristique à moyen et long terme.
Je me suis personnellement investi dans la réalisation de cet objectif.
Le projet du Tahiti Mahana Beach est le plus emblématique de l’action entreprise.
Vous avez voté la loi du pays qui crée la zone prioritaire d’aménagement et de développement touristique de Tahiti Mahana Beach.
Elle encadre la procédure d’élaboration du plan d’aménagement de la zone et du règlement qui y sera annexé. Le conseil des ministres statuera en dernier ressort après enquête publique, avis de la chambre de commerce et du conseil municipal de Punaauia.
L’emprise foncière, propriété du pays, est à présent disponible après que les squatters aient été relogés. Les terrains du Tahiti Mahana Beach sont et demeureront la propriété du pays.Les aménageurs en auront seulement la disposition pendant la durée du bail emphytéotique qui leur sera concédé.
Après cela, la Polynésie française retrouvera la pleine disposition de ces terres et ce qui aura été construit dessus deviendra sa propriété.
Quant au projet d’aménagement lui-même, je ne sais pas encore ce qu’ilseraen détail. Nous procédons par étape, faute de disposer, comme certains, d’un petit génie capable de concevoir une zone touristique internationale en douzetraits de crayon de couleur, sur le coup de minuit, heure propice aux sortilèges.
Dans un tel domaine, il faut être sérieux.
Fin janvier un jury a opéré une sélection parmi quatorze groupementsqui avaient répondu à un appel à candidature en vue de l’élaboration du projet.
Troiscabinets internationaux d’architecture et d’aménagement ont été retenus : un américain, une holding chinoise et un grand cabinet d’architecture français.
Le résultat de leurs travaux respectifs doit nous être remis en juin.
Le projet qui aura eu la faveur du jury sera celui sur la base duquel sera rédigé leprogramme final.
La campagne de dénigrement que ce beau projet a provoquée montre qu’il y a encore en Polynésie française des gens prêts à faire passer leur aigreur avant l’intérêt général des Polynésiens.
Du Tahiti Mahana Beach nous pouvons attendre des centaines d’emplois pendant la phase de construction et des milliers après.
Ces emplois seront polynésiens, hormis, éventuellement, les emplois d’encadrement spécialisés.
 
Je n’ai pas cédé devant Bouygues lors de la construction du centre hospitalier quand ce groupe voulait faire venir des centaines d’ouvriers du Maroc, de Thaïlande et des Philippines. Je ne cèderai pas non plus devant des demandes éventuelles d’importation de travailleurs étrangers pour la construction du complexe de Tahiti Mahana Beach ou de tout autre. Je dis « ou de tout autre » car j’espère bien que le Tahiti Mahana Beach aura des petits frères et des petites sœurs.Vous le savez, je m’efforce depuis des mois de convaincre les propriétaires indivis des terrains d’assiette de l’ex-Club Méditerranéede vendre leurs droits au Pays au lieu de les stériliser comme c’est le cas depuis des années. Ce sera le site du Moorea Mahana Beach.
Ce n’est pas un mystère non plus que je fais tout mon possible pour séduire des investisseurs potentiels pour qu’ils reprennent le golf d’Atimaono et qu’ils édifient autour un ensemble immobilier de prestige sans lequel aucun golf ne peut couvrir ses frais.
Ce projet, est adossé à la création d’une ligne aérienne entre la Chine et Tahiti et d’un deuxième golf, apportant ainsi une dimension nouvelle à notre tourisme.
Compte tenu de la volonté de ses promoteurs, je pense que les projets du groupe HNA commenceront à se réaliser avant ceux de Tahiti Mahana Beach.
Dans l’immédiat, cependant, notre énergie se concentre sur le développement de l’aquaculture aux Tuamotu. Dans ce domaine nous n’en sommes plus à rechercher un investisseur. Nous l’avons trouvé. Il s’agit d’un fonds d’investissement chinois, le TIAN RUI International Investment. Le 25 janvier, j’ai signé une convention avec cette société par laquelle la Polynésie française et TIAN RUI scellent un partenariat en vue de l’implantation d’un vaste projet aquacole à Makemo. Il prévoit la mise à disposition d’une terre domaniale de 26 hectares pour une période renouvelable de 30 ans aux conditions habituelles de mise à disposition de terres publiques.
La société y construira sa base vie, les unités de production d’alevins, ses laboratoires de recherches, les unités de conditionnement de la production de poissons et crustacés, les unités de traitement des eaux et des déchets ainsi que la centrale électrique. La société disposera d’une concession maritime pour les besoins de ses recherches et de l’alevinage. Cependant, les concessions destinées à l’élevage ne seront attribuées qu’à des Polynésiens qui seront non pas des salariés mais des producteurs de poissons. La convention dispose également que la société engagera 150 milliards de Francs dans son activité sur 15 ans. Elle s’engage également à prendre en charge la formation des cadres polynésiens.
Un projet de loi du pays, actuellement sur le bureau de l’Assemblée, exonèrera de droits de douane et d’impôts toute société qui s’engagera à créer aux Tuamotu une exploitation aquacole et y consacrera au moins vingt milliards sur cinq ans.
 
Pour sa part, le TIAN RUI s’y engage et se propose d’atteindre une production de 50 000 tonnes annuelles en régime de pleine activité après une phase d’installation d’environ 18 mois, suivie d’une « phase pilote » de deux à trois ans qui constituera un test de production.Les 50 000 tonnes seront entièrement exportées. Pour parvenir à ce résultat, elle mettra à la disposition des fermiers aquacoles polynésiens le matériel de production, les alevins et la nourriture, à charge pour eux de procéder au nourrissement. Dès juin, le TIAN RUI se propose de commencer la construction d’un quai pour l’accostage des bateaux dont le coût est chiffré à 1,5 milliard. En phase d’exploitation, la ferme génèrera un millier d’emplois.
Tian Rui est très soucieux de protéger l’environnement de ses produits, car cela constitue un argument essentiel de vente. La société vise en effet une clientèle riche, prête à payer cher, mais exigeante sur la qualité de ce qu’elle achète.
Cette volonté rencontre la nôtre, telle qu’elle s’illustre dans le programme de relance.
Nous tenons en effet à valoriser ou préserver nos ressources naturelles et, plus particulièrement, à organiser une protection efficace de l’environnement, à favoriser un urbanisme moins consommateur de ressources ainsi que le transport propre et le transport public et à stimuler le développement des énergies renouvelables.
Bien entendu, nous ne perdons pas de vue la valorisation des produits de la terre. Ainsi, nous avons passé un accord d’une durée de 15 ans avec la société chinoise Xisha Noni pour relancer l’exportation du noni. Cette société s’est engagée à acheter, à terme, 4.000 tonnes par an de fruits payés 60 FCP le kilo au producteur. En outre, sous condition que nous puissions mettre à sa disposition un terrain, pour lui permettre de construire une usine, la société s’engage à effectuer sur place la transformation du produit en purée.
Vous aurez noté, je l’espère, que dans tous les grands projets dont je parle, le foncier reste la propriété de la Polynésie, et l’emploi est celui des Polynésiens. Nous accueillons des investisseurs, nous ne nous soumettons pas à eux.
J’entends malgré tout certains me dire « mais pourquoi ne pas laisser faire des investisseurs polynésiens ? » Je réponds : Hé bien, faites-le ! Les avantages fiscaux qui sont consentis pour attirer des investissements considérables sont ouverts à tous. Et des opportunités ne manquent pas pour ceux qui ont les financements et les débouchés.
D’ailleurs, le réaménagement du centre-ville avec le projet Ainapare se fera avec des investisseurs polynésiens. La capacité de nos entrepreneurs existe bel et bien toujours. Bravo !
Le troisième et dernier volet du plan a pour objet de rendre notre économie plus compétitive.
Dans cette perspective, vous êtes déjà saisi d’un projet de loi du pays sur la transparence des relations commerciales entre les entreprises. Vous le serez sous peu d’un projet remanié de code de la concurrence destiné notamment à lutter contre les abus de position dominante ou aux effets négatifs de la concentration commerciale.
Encourager l’initiative privée constitue un autre objectif de ce troisième volet. Deux mesures s’inscrivent dans cet ordre de préoccupation : un dispositif de financement des petites et très petites entreprises et la mise au point d’un cadre législatif fait pour encadrer le partenariat public – privé. L’instauration d’une fiscalité plus favorable à l’initiative figure également parmi les projets à l’étude.
Enfin, nous sommes engagés dans une démarche de modernisation de nos mécanismes d’intervention et de simplification des procédures qui suppose un travail minutieux et long de révision des réglementations.
Comme vous pouvez en juger, il ne s’agit plus simplement de relancer l’économie mais de l’engager dans un processus de développement fondé sur une approche renouvelée de la relation entre la société civile et le pouvoir politique ainsi que sur le recours à grande échelle à de puissants et innovants investisseurs privés.
J’ai toujours eu, pour notre Pays, de grandes ambitions. Aujourd’hui, je n’ai pas seulement pour objectif de le reconstruire. Certes, sauver l’économie et la société polynésiennes du marasme où elles s’enfonçaient, était et reste un défi prioritaire. Toutes nos forces sont bandées pour le relever. J’ai la certitude que nous allons y parvenir et sans beaucoup tarder. Pourtant, tout en y travaillant d’arrache-pied, je savais qu’il fallait porter le regard bien au-delà de cet horizon.
Aussi, je vous engage à un instant de réflexion.
 
Regardons le globe terrestre. Près de la moitié de notre planète est couverte par l’océan Pacifique. Et nous, nous occupons 5 millions de km²dans son centre sud-est. Jusqu’à une époque récente, notre situation nous mettait à l’écart des grands courants d’échanges qui faisaient du Pacifique nord la première zone du commerce mondial.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Notre chance historique est que le développement de nouvelles puissances économiques nous place sur la nouvelle route des échanges entre l’Asie et l’Amérique latine. A nous de savoir saisir cette chance. Si nous ne le faisons pas, d’autres, dans le Pacifique, se proposent déjà à notre place.
Alors saisissons là !
Nous serons la plaque tournante des communications matérielles et immatérielles dans cette « diagonale du Pacifique » qui s’est déjà constituée.
Nous ferons naître de nouvelles activités, en valorisant enfin notre vocation océanique.Au lieu de quelques milliers de tonnes pêchées actuellement, pensons à ce que pourra apporter un port halieutique international !
Puisons les autres ressources vivantes encore inexploitées que recèle l’océan. Notre futur centre de recherche nous y aidera.
Utilisons toute l’énergie qui s’y trouve : nos entreprises ont déjà réalisé deux SWAC. Et il existe également l’immense potentiel de l’énergie des vagues et des courants que nous devrons mobiliser.
Enfin, préparons l’exploitation des richesses minérales des fonds de notre ZEE.
Nous offrirons à nos jeunes les possibilités de s’épanouir chez eux parce que la Polynésie ne sera plus perdue dans une région oubliée du monde.
Alors saisissons notre chance !
Mais peut-être ce que je vous dis là, ce sont pour vous des rêveries d’un vieil homme ?
Vous devez certainement vous dire :
Ne risquons-nous pas d’être emportés par le tsunami que génère le surgissement de ces nouvelles puissances mondiales qui nous entourent ?
Ne sommes-nous pas une poussière d’îles entourée d’un monde qui se construit sans nous ?
Ne sommes-nous pas seuls face aux forces immenses qui agitent le grand océan ?
Ne risquons-nous pas d’être un jour victimes de visées stratégiques qui nous dépassent ?
Nous ne sommes, c’est vrai, qu’un tout petit pays mais nous savons où nous voulons aller et nous savons défendre nos idées.
Et nous ne sommes pas seuls ! Nous faisons partie d’une grande Nation qui nous accompagne et nous accompagnera encore.
Les liens qui nous unissent sont profonds et sont d’autant plus forts que la France a su accorder à la Polynésie française une autonomie sans précédent, voici 30 annnées.
C’est à nous d’en faire bon usage.
C’est à nous de développer une ambition pour notre Pays, et pourquoi pas, pour la France tout entière.
Imaginez un instant que nous soyons indépendants, c’est-à-dire vraiment seuls. Pensez-vous que les nains de l’ONU, incapables de réagir quand une grande puissance occupe et annexe une partie d’un autre pays, viendraient nous protéger ? Il ne faut pas rêver Monsieur TEMARU !
Non, évidemment !
C’est à ce moment-là que le brin de paille que nous sommes serait emporté par le vent de l’histoire.
Je ne veux pas de cela pour mon Pays.
Affirmons notre ambition ! Ayons la vision pour construire l’avenir !
C’est ce que le peuple attend de nous.
C’est à cela que je vous appelle !
Il s’agit de changer d’échelle et de siècle.
Ayons tous la foi de reconstruire ensemble notre Pays. C’est cette foi qui m’anime, c’est cette foi qui me fait agir, c’est cette foi qui me donne courage et vigueur.
Je ne demande plus qu’une chose : avoir suffisamment fait lorsque mon chemin s’arrêtera pour que notre jeunesse ait retrouvé, elle, le chemin d’un avenir assuré et prospère.