Gaston Flosse perd ses mandats de président et de sénateur

La cour de cassation a rendu son arrêt aujourd’hui, à Paris. La condamnation de Gaston Flosse est confirmée à 4 ans de prison avec sursis, 15 millions de francs d’amende et 3 ans d’inéligibilité.


Gaston Flosse condamné

 
Cette nuit, la cour de cassation à Paris s'est prononcée sur le pourvoi du Président contre sa condamnation dans l’affaire des emplois fictifs.
En appel, 4 ans d’emprisonnement avec sursis, 15 millions de francs d’amende mais surtout 3 ans d’inéligibilité avaient été prononcés à l’encontre de l’actuel président de la Polynésie. Une peine moins lourde qu’en première instance. Aujourd'hui la condamnation est confirmée. Gaston Flosse va donc perdre ses mandats, et il ne pourra plus se présenter à une élection pendant les années à venir.

Ci-après l'arrêt complet de la Cour de Cassation :
Téléchargez la version pdf :

ARRET COUR DE CASSATION 23 JUILLET: GASTON FLOSSE


Sa défense n'exclut pas une requête devant la cour européenne des droits de l'homme

 
Cette décision sonne comme un clap de fin pour le "Vieux lion", âgé de 83 ans. Du coté de sa défense, si Me Jean-Yves Le Borgne reconnaît avoir été un peu "surpris" par cette décision, il il assure en avoir pris acte, précisant que toutes les voies de recours ont été explorées. Jean-Yves Le Borgne, au micro de Maïté Koda :

Jean Yves Le Borgne

 
Selon un autre avocat de Gaston Flosse, un recours auprès de la Cour européenne des droits de l’homme est toujours envisageable. En revanche, son autre avocat Me Mathieu Stoclet  se fait plus dissert et évoque une requête devant la Cour européenne des droits de l'homme. "La question peut se poser", reconnait-il.  "Est-ce qu'il est envisageable  par une mesure postérieure de remettre en cause l'inéligibilité ? C'est une question que nous somme en train de creuser…", a-t-il déclaré :

Mathieu Stoclet

 

L’affaire des emplois fictifs, une affaire qui remonte aux années 90

 
Les faits se sont déroulés entre 1996 et 2004. A l’époque, Gaston Flosse est intouchable et son réseau de collaborateurs s’étend sur toute la Polynésie. Le système mis en place : des contrats cabinets signés par la présidence, avec des mises à disposition aussi diverses que variées.
Ainsi, des élus, des syndicalistes et même des responsables associatifs, auraient été rémunérés entre 100 et 600 000 francs, afin d’assurer, en parallèle de leur profession pour certains, des missions présidentielles.

En première instance puis en appel, les magistrats ont assimilé ces emplois à une politique clientéliste et à un vaste système de propagande en faveur du Taho’era’a Huira’atira, le parti politique de Gaston Flosse.

Les autres affaires en cours

 
Cette affaire des emplois fictifs n’est pas la seule dans laquelle Gaston Flosse est impliqué. Depuis les années 90, le « Vieux lion » comme on l’appelle, a été entendu dans une dizaine de procès. D’autres affaires sont en cours et devraient encore arriver.
 
Difficile de faire un condensé des procédures impliquant l’actuel président du gouvernement. Le mois dernier fut marqué par le retour à l’instruction de l’affaire Haddad, qui avait vu Gaston Flosse subir ses premiers jours de détention à Nuutania, c’était en 2009.
 
L’affaire Anuanuraro a récemment été jugée en première instance. Le délibéré sera connu le 2 septembre prochain. 2 ans de prison ferme, 5 ans d’inéligibilité et 10 millions de francs d’amende ont été requis à l’encontre du président.
 
Ce dernier est aussi mis en examen dans deux autres affaires : celle du SED, le service d’étude et de documentation pour atteinte à la vie privée, et celle du réseau d’eau de sa résidence d’Erima, cette fois, pour détournement de fonds publics.
 
Une instruction est enfin en cours pour déterminer s’il y a eu favoritisme dans l’attribution des marchés de l’hôpital du Taaone.
 
Des affaires qui mêlent pouvoir et argent, et qui font de Gaston Flosse, l’élu le plus condamné de la Vème République.
 
Et une nouvelle affaire se profile à l’horizon pour Gaston Flosse. Hier, mardi 22 juillet, on a appris qu’il allait être convoqué le 20 août par le juge d’instruction afin d’être mis en examen pour complicité de favoritisme et trafic d’influence passif dans l’affaire de l’attribution du marché de la construction du centre hospitalier. Cette convocation fait suite à sa garde à vue de lundi. A l’issue de ce rendez-vous, et comme l’immunité parlementaire de Gaston Flosse est levée, le juge peut demander son placement sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire. Le magistrat peut aussi décider de le laisser libre.

Que va-t-il se passer dans les jours à venir ?

 
Selon nos informations, Gaston Flosse ne devrait pas attendre la notification de sa condamnation via le Haut Commissariat. Il pourrait démissionner. Il faudra alors un nouveau président à la Polynésie française. C’est l’Assemblée de Polynésie qui le désignera.

Gaston Flosse devait prendre l’avion pour Auckland ce matin. Il avait l’intention de se rendre à la réunion du Groupe des leaders du Pacifique. C’est le vice président Nuihau Laurey qui le remplace. 

Les 10 autres pourvois en Cassation également rejetés

 
Gaston Flosse est définitivement condamné dans l’affaire des emplois fictifs de la présidence, mais ce n’était pas le seul à s’être pourvu en cassation. 10 autres prévenus l’avaient fait, et aucun n’a eu gain de cause.
 
En effet, les 11 pourvois ont été rejetés. Il faut à présent attendre les notifications des autorités compétentes. Bruno Sandras va perdre son titre de maire de Papara. Il a lui aussi été condamné à une peine d’inéligibilité de 3 ans, une nouvelle élection aura donc lieu à Papara.
 
D’autres figures bien connues perdront également leur mandat. C’est le cas de deux syndicalistes : Cyril Legayic actuellement à la tête de la CSIP et Jean Marie Yan Tu d’A Ti’A I Mua. Ces deux là perdront leur mandat de secrétaire général et par la même occasion ne siégeront plus au CESC. Leur peine d’inéligibilité a également été fixée à 3 ans.

 

Les réactions suite à la condamnation

 
Peu de réactions ce matin après cette décision de justice qui fera date. Gaston Flosse n’a pas prévu de s’exprimer pour le moment. Pas de commentaire de la part de Nuihau Laurey et Marcel Tuihani junior ce matin avant leur départ pour Auckland. A Paris, le député Jean Paul Tuaiva a déclaré qu’il s’agissait « d’une triste nouvelle »
 
Du côté de l’opposition, Oscar Temaru a prévu de tenir une conférence de presse demain matin, jeudi.
 

La carrière politique de Gaston Flosse

 
C’est donc la fin d’une carrière politique débutée en 1958. Gaston Flosse a 27 ans lorsqu’il rejoint l’Union Tahitienne Démocratique, un mouvement d’inspiration gaulliste mené par  Rudy Bambridge. Maire, député, euro-député, sénateur, sénateur, président, secrétaire d’état. Il aura connu toutes les fonctions.
 
Son tout premier mandat, Gaston Flosse le décroche en 1965, il devient maire de Pirae. Il entre à l’Assemblée en 1967, et ne la quittera plus. Il occupera même 2 fois le perchoir.

Dans les années 70, il fonde son parti le Tahoeraa Huiraatira, devient député. Il rencontre surtout Jacques Chirac qui fera de lui en 1986, son secrétaire d’état au Pacifique Sud.
 
Entre 1984 et 2004, Gaston Flosse sera tour à tour, président du gouvernement puis président de la Polynésie française.
 
Le 23 mai 2004, il connait l’échec. C’est le taui, l’indépendantiste Oscar Temaru, son adversaire de toujours, gagne les élections territoriales.
 
Le 7 juillet 2007, à la surprise générale, l’UPLD et le Tahoeraa Huiraatira s’unissent. La coalition se partage alors la présidence du Pays, celle de l’Assemblée et les deux mandats de sénateurs. Ces événements, couteront à Gaston Flosse son adhésion à l’UMP.
 
A partir de 2009, rattrapé par les affaires judiciaires, il se fait plus discret. Edouard Fritch prend le relais. Il faut attendre 2012 pour revoir le Vieux Lion renouer avec le succès. Les trois candidats orange à la députation sont tous élus.
 
En 2013, alors sous la menace d’une peine d’inéligibilité, Gaston Flosse réussit à se faire élire à la tête du Pays.