Entre mai et septembre, c'est toujours la même rengaine. À l'image des Marquises et des Tuamotu, l'eau manque encore plus que d'habitude à Maupiti.
La solution des puits d'eau
L’approvisionnement devient compliqué, alors les habitants creusent des puits et se servent directement dans les lentilles d'eau.
Mamie Augusta et Papi Gab ont choisi cette solution comme la plupart des habitants de Maupiti. Leur petit forage alimente les cinq familles aux alentours “pour leur vie de tous les jours, matin, midi, soir ; mais ce n’est pas pour boire ! C’est juste pour les toilettes ou la lessive” explique-t-il.
L'eau salée distribuée par la commune
Car sur cette île de onze kilomètres où vivent 1 300 personnes, les foyers ne sont pas approvisionnés quotidiennement en eau. L’agent hydraulique de la commune ouvre les vannes d'eau tous les deux jours seulement. Il y en a trois tout autour de l'île, alimentés par les forages en montagne.
“La population a deux heures pour remplir ses cuves d’eau et après il faut attendre un jour plus tard. Pendant la sécheresse au mois de mai à septembre, on arrive pas à remplir nos bassins. Mais on peut aider la population en cas de besoin urgent” précise Tutea Tetuahiti.
Sami, lui, habite en montagne. Souvent, l’eau de la commune n’atteint même pas ses robinets, malgré son suppresseur. Et ce n’est pas le seul problème. “L’inconvénient aussi, c’est que l’eau est saumâtre. Du coup, ça rouille. Notre linge est lavé avec de l'eau salée”, nous apprend-il.
Quid de l'eau de pluie et de l'eau potable ?
Pour pallier ces problèmes, tous les foyers sont équipés de citernes de 7 500 litres, en partie financées par la commune à hauteur de 86 millions xpf selon le maire.
Ces grandes cuves noires servent à récolter l’eau de pluie pour des usages ménagers divers.
Malgré une consommation raisonné de la population, cela ne suffit toujours pas, surtout depuis que les touristes sont de retour...
Quant à l’eau potable, les habitants peuvent se servir 24h/24 et 7 jours sur 7 aux dix fontaines installées en bord de route. L'eau provient aussi des forages mais passe par un système de filtration qui la rend consommable. Ces fontaines sont à distinguer de l'eau de la commune et de l'eau de pluie. Ils s'agit de trois réseaux distincts.
Maupiti pointée du doigt, mais toujours sans solution pérenne
En 2022, la chambre territoriale des comptes s’est intéressée au problème de l'eau à Maupiti. Son rapport indique : “un service de l'eau de mauvaise qualité”, “une ressource limitée et trop sollicitée, provoquant sa salinisation progressive.” La juridiction avait également émis quelques doutes au sujet de la propreté de l'eau distribuée, notamment dans les fontaines, et formulé deux recommandations : “instaurer un suivi du service de l’eau, à partir d’indicateurs essentiels (production, consommation, taux de fuite par réseau) dès 2023” et “distribuer dès 2023 une eau potabilisée à l’ensemble de la population, en tenant compte des ressources de l’île limitées.”
Oui, mais comment, et qui va payer ? “L’année dernière nous avions eu l’idée de revoir la lentille d’eau existante depuis des années sur un motu, où il y avait à priori de l’eau en abondance. Malheureusement, les études n’étaient pas concluantes... On a aussi abandonné l'hypothèse de l’osmoseur, très cher en maintenance et en fonctionnement : cela va alourdir le portefeuille de la population. Donc le choix a été fait de rester sur les fontaines. On attend le plan de financement pour l’amélioration de ces fontaines d’eau avec une mise en place de systèmes de filtration en UV ou en chlore peut-être. (...) Pour l'instant, c’est l’eau que consomme la population et on n’a jamais eu de problèmes” confie Woullingson Raufauore, le maire de l'île.
Impossible donc pour Maupiti de se payer un osmoseur pour désaliniser l'eau de mer, contrairement à sa voisine, Bora-Bora, qui en est déjà équipée. Il faut dire que là-bas, les habitants paient leur facture d'eau beaucoup plus chère, jusqu'à 10 000 xpf par mois, contre à peine 40xpf du mètre cube à Maupiti.
Le réchauffement climatique nous guette et nous rappelle à quel point l’eau est précieuse.