C’est une plante qui fascine presque autant qu’elle effraie. Le cannabis est communément appelé en Polynésie : pakalolo. Dédiaboliser le "tumu paka" relèverait presque de l’exploit… Car les gens font souvent l’amalgame entre cannabis et chanvre. Entre THC et CBD. "Le chanvre, c'est la même plante que le cannabis sauf qu'on a un taux de THC qui est contrôlé et qui ne doit pas dépasser 0,3% de THC. C'est la seule particularité qui définit en fait le chanvre", explique Edouard Legeay, créateur de Mana Bliss.
Une teneur en THC qui doit donc être très faible, ce qui permet la vente libre en France et dans plusieurs pays en Europe. Edouard Legeay ou encore Karl Anihia, militent depuis plusieurs années, pour sa réglementation. L’utilisation du CBD débute à peine.
Alors pour ce qui est de la production locale, on en est encore loin. "Les conditions qu'on a ici ne permettent pas de cultiver un chanvre industriel proprement dit. Par contre, on travaille avec des sociétés australienne et américaine qui ont développé des variétes de chanvre tropicales, donc adaptées à notre environnement", déclare Karl Anihia, militant pro-cannabis.Car légaliser l’usage du CBD changerait beaucoup de choses dans le traitement des pathologies.
Le docteur Éric Parrat, pneumologue à l’hôpital de Taaone, en est le premier convaincu. "Ces substances-là sont déjà utilisées à titre thératpeutique en France métropolitaine dans les hôpitaux. Il y a une expérimentation qui est menée depuis 3 ans officiellement, ce qui fait qu'en France si vous avez une certaine catégorie de maladies par exemple des maladies incurables, des affections neurologiques et d'autres, vous pouvez avoir accès en France à une expérimentation et bénéficier du cannabis thérapeutique. Or ici en Polynésie ce n'est pas possible", déplore Eric Parrat, président de l’association Honoea.
Certifié ou pas CBD
Mais depuis quelques mois, l’institut Louis Malardé a entamé deux programmes de recherche dans le but d’analyser et de sélectionner les plants à très faible teneur en THC, la molécule à effet psychotrope. Les techniques d’analyse et de contrôle en laboratoire doivent encore être validées par le comité français d’accréditation. "Ca va nous permettre en fait de produire un certificat. A un moment donné, quelqu'un se présente avec une fleur, on va l'analyser, on va produire un certificat qui va probablement, s'il vient pour du CBD, certifier que ce plant est bien en dessous du seuil qui va être prévu réglementairement. Et on va sortir un certificat qui va confirmer que c'est soit du chanvre à faible teneur de THC, soit du cannabis qui pourrait être considéré comme un stupéfiant", souligne Teama Richmond, directeur par intérim de l’institut Louis Malardé.
"Nous profitons de ce programme de recherche pour essayer...de maîtriser au mieux les techniques agricoles. Toujours en restant dans cette optique d'être dans un cadre pharmaceutique. Donc pas de pesticides, pas de métaux lourds", affirme Edouard Suhas, directeur du laboratoire des substances naturelles et médicinales.
A l’heure où de grands pays développent leurs techniques et maîtrisent le processus du CBD, le fenua en est encore aux balbutiements. Mais la volonté politique du nouveau gouvernement pourrait tout changer.
Pour le meilleur et pour le pire…
Le reportage de Maruki Dury :