Edouard Fritch veut faire inscrire le fait nucléaire dans la Constitution française

Edouard Fritch souhaite une modification de l'article 74 de la Constitution, afin de reconnaître le fait nucléaire en Polynésie française et ses différents impacts, et conférer aux lois de Pays une valeur législative comme en Nouvelle-Calédonie.
La révision constitutionnelle des collectivités et départements d'outre-mer est prévue pour 2023. Edouard Fritch s'est exprimé en début de semaine à Paris sur le sujet lors d'une conférence au Sénat. Le président du Pays a parlé d'élargir les pouvoirs des communes et du Pays à l'échelle du Pacifique. Mais aussi d'inscrire le fait nucléaire dans la Constitution française et d'attribuer une valeur législative aux lois de Pays.

"J'ai besoin de l'Etat français pour réparer ce qui a été fait dans ce pays !", avait lancé en novembre 2018 Edouard Fritch à l'assemblée de Polynésie.

Depuis, le président du Pays n’a pas changé d’avis, il souhaite toujours faire évoluer le statut de la Polynésie avec la France. Un statut d’autonomie qui voit le jour en 1977 avec Francis Sanford, avant d’évoluer de façon significative avec l’élargissement des compétences de la Polynésie en 1984 avec Gaston Flosse : la Polynésie se gouverne alors librement.

Elargir l'autonomie

Puis en 1996, 2003 et 2004, de nouvelles évolutions statutaires qui aboutiront en février 2019, sous la pression des indépendantistes et des associations anti-nucléaires, à la reconnaissance du fait nucléaire au Sénat et dans le statut d’autonomie.

Aujourd’hui, c’est dans la Constitution française que le président du Pays propose d'inscrire le fait nucléaire, en modifiant l’article 74. C'est ce qu'il a annoncé lundi dernier devant la commission des outre-mer du Sénat.

"Est-ce que ça va permettre à ceux qui sont nés après 1974 de présenter des dossiers ? Non. Est-ce que ça va permettre les études sur la transmission générationnelle ? Non plus. Donc, à vrai dire, cela fait peut-être du bien à l'égo", estime Moetai Brotherson, député indépendantiste inscrit dans le groupe GDR-Nupes. "Trouver des solutions concrètes pour que toutes les familles des travailleurs et des populations civiles victimes soient indemnisées, là oui on peut encore parler", déclare Hiro Tefaarere, président de l'association Moruroa e Tatou. 

Pour le politologue Sémir Al Wardi, cette demande d'inscription est "plus un symbole politique. Cela veut dire simplement que l'Etat reconnaît le fait nucléaire, reconnaît les conséquences, et forcément aura un comportement qui va correspondre à cela".

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Autre annonce importante : donner aux lois de Pays une valeur législative. A ce jour, les lois votées à l’assemblée de Polynésie sont toutes soumises au contrôle du Conseil d’Etat…si elle devenait loi à part entière comme en Nouvelle-Calédonie, la loi de Pays polynésienne serait alors uniquement validée par le Conseil constitutionnel.

"Ca tombe sous le sens, cela fait des années que les autonomistes prétendent qu'on fait la loi à Tarahoi, alors qu'on écrit juste des règlements...ça fait des années que le Tavini dit que les lois de Pays n'en sont pas", souligne le député Moetai Brotherson. "Là il y a des conséquences parce que ça permettrait à la Polynésie d'augmenter ce qu'on appelle le champ des possibles", précise le politologue Sémir Al Wardi. "On ne peut qu'être favorable à des choses qu'on a réclamées il y a plus de 20 ans, mais à l'époque tout le monde nous riait au nez", constate Hiro Tefaarere, président de l'association Moruroa e Tatou. 

Modifier la Constitution française pour y inscrire le fait nucléaire, donner un pouvoir législatif aux lois de Pays…jusqu’où peut aller l’autonomie et l’évolution du statut de la Polynésie ?