Comment êtes-vous arrivé à la réalisation ?
Par accident ! En 2018, j’ai quitté la Polynésie pour suivre une formation d’acteurs et ça fait quatre ans que j’exerce ce métier en Nouvelle-Zélande où je suis représenté par un agent. L’année dernière, j’ai remarqué un manque de rôles pour les Polynésiens, surtout ceux de la Polynésie française, et je me suis dit que j’allais me lancer dans la réalisation car j’ai le don d’écrire et j’ai beaucoup d’expérience. J’ai donc écrit un scénario, j’ai trouvé un producteur et je l’ai réalisé.
D’où vient l’histoire de ce court-métrage ?
J’ai toujours eu cette volonté d’exprimer et de jouer des personnages issus des minorités. Pour mon histoire personnelle, et celle de mes parents qui étaient SDF à leur arrivée à Tahiti, je voulais commencer ma carrière avec une idée qui me tenait à cœur. C’est comme ça que j’ai commencé des recherches pour un long-métrage puis j’ai choisi de commencer par un court-métrage pour voir si les gens aiment l’histoire et si le concept marche.
Ce court-métrage va alors devenu un long-métrage ?
Je pense… Si je suis toujours jeune pour le jouer et si je trouve des producteurs qui veulent bien le financer.
Quel était le message du film ?
Je voulais parler de la quête identitaire et de la quête de chez soi. Je fais partie des jeunes qui quittent la Polynésie française pour se trouver une vie et qui font le sacrifice de quitter leur île en laissant leur « chez soi » de côté. Ce que je remarque en étant à l’étranger c’est que les Polynésiens veulent retrouver leur « chez soi ». La seule manière de le faire est de trainer avec les gens qui viennent de ton île. Le thème est venu car beaucoup de membres de ma famille sont partis à l’armée, ils reviennent une fois de temps en temps, parfois dans un cercueil. Cette quête de soi… Est-ce que ça vaut vraiment le coup de quitter son île pour réaliser les rêves des autres ?
Pour vous personnellement, est-ce que cela valait le coût ?
Ça valait le coût de quitter mon île pour avoir une autre perspective de mon île et de la Polynésie française. C’est important pour moi de sortir pour répondre à cette question : « quel est mon but ? » Ce n’était pas partir pour partir mais partir pour aller me former et revenir en Polynésie française pour travailler et vraiment m’intéresser aux problèmes de notre société.
Comptez-vous rentrer bientôt en Polynésie française ?
Je ne vais pas rentrer y vivre mais je vais y revenir pour raconter notre histoire au monde. Je reviens ici travailler. Et je vais faire travailler les gens de chez moi. Ça a déjà commencé ! J’ai beaucoup de grands projets en tête. Il y aura plusieurs œuvres : des longs documentaires, de la fiction.
Ce court-métrage est aussi l’histoire d’une collaboration avec un collectif et notamment Nikki Si’ulepa ?
Nikki fait partie du collectif néo-zélandais PISA (Pacific Islanders Screen Artists) qui réunit des gens qui font de la réalisation, de la comédie… Ma copine, Carrisse Uta’i, productrice du court-métrage et moi-même faisons partie de ce collectif. Et nous avons eu son « mentorship », elle nous a guidé pour la réalisation et la production. C’est une très grande réalisatrice en Nouvelle-Zélande. Ça n’aurait pas été possible de faire ce court-métrage sans ce collectif qui promeut l’apprentissage de cet art aux jeunes indigènes et c’est ce qui nous a aidé à trouver notre voie dans cette carrière.
Êtes-vous fier de voir le court-métrage au Fifo ?
C’est une fierté parce que ce court-métrage était d’abord pour la Polynésie française. Je suis fier de l’engouement autour du film.
Encadré :
Que les îliens racontent leurs histoires
Nikki Si’ulepa, samoane, qui fait partie du collectif PISA (Pacific Islanders Screen Artists), a été le « spiritual adviser » comme elle aime le dire sur ce court-métrage.
Pour Kahu Kaiha, le réalisateur et Carrisse Uta’i, la productrice, ce court-métrage était une première et sans le collectif, ils n’auraient pas pu se former. « Je les ai rencontrés deux ans plus tôt, raconte Nikki Si’ulepa. Ils ont beaucoup d’énergie, une vraie ambition de raconter leur propre histoire à leur façon. Je leur ai demandé de rejoindre le collectif, ce qu’ils ont immédiatement fait et ils ont pu assister aux ateliers pour se former. Ils m’ont donné du fil à retordre ! Mais je ne pouvais pas leur dire non. C’est une fierté de voir ce court-métrage présenté au Fifo. Ils ont fait un super travail. »
Carrisse Uta’i, samoane, avoue que la production n’était pas son rêve mais elle a été choisie. « Je suis fière d’avoir collaborer avec quelqu’un des Marquises. Pour moi, c’est important de produire du contenu et que l’on garde le pouvoir de parler de nos histoires. » Nikki Si’ulepa acquiesce et ajoute : « Beaucoup de films ont été faits sur nous mais ce ne sont pas du tout les mêmes perspectives que les nôtres. »
“Find where I belong” a obtenu le prix du meilleur court-métrage de fiction au Festival International du Film documentaire Océanien, vendredi 10 février au grand théâtre de la Maison de la Culture