Laetitia Monnier : de Papeete à Washington, la Tahitienne devenue scientifique

La jeune polynésienne pose fièrement aux côtés de ceux qui l'ont accompagné.
De Tahiti aux Etats-Unis, en passant par la métropole...Laetitia Monnier a su saisir les opportunités lorsqu'elles se sont présentées. À 28 ans, cette enfant du Fenua est désormais docteure en Sciences, après cinq années de recherches dans le domaine de l'intelligence artificielle.

"J'ai toujours du mal à y croire" diplôme en poche, Laetitia vient de valider sa thèse sur l'intelligence artificielle...elle a présenté son travail le 20 juillet 2023 sous le regard admiratif de son père, après cinq années de recherches auprès du gouvernement américain.

Présentation orale le 20 juillet 2023 à Dijon.

Passion naissante

D'abord attirée par les mathématiques, la jeune femme s'inscrit en licence "ingénierie des systèmes informatiques" à l'université Paul Sabatier de Toulouse en 2013. C'est là qu'elle apprend à coder et se découvre une passion pour cette activité. Elle poursuit alors sur un master en base de données et intelligences artificielles en alternance chez IbanFirst, entreprise spécialisée dans les transactions multidevises. 

Son travail lui plaît et à la fin de son master, elle se voit continuer dans le même domaine...mais l'idée du doctorat trotte dans un petit coin de sa tête. Hasard ou pas, l'opportunité s'est présentée : un professeur lui propose une collaboration avec le gouvernement américain au sein du National Institute of Standards and Technology (NIST), situé à Gaithersburg, à quelques kilomètres au nord de Washington. Des recherches en "big data dans le domaine industriel", c'est la chance de sa vie... "Au début, je n'y croyais pas trop", admet Laetitia. Mais elle a un bon pressentiment et se lance dans le grand bain.

Faire des sacrifices...

Après avoir quitté son Fenua pour la métropole, elle doit de nouveau tout quitter, cette fois pour les Etats-Unis. "Cela a été dur au début, je ne connaissais personne, je n'étais jamais allée à Washington...heureusement, ma maman est venue avec moi et m'a aidé à trouver un appartement et puis mon chef de projet là-bas a été très gentil" raconte Laetitia. 

Tout lui est étranger, le Pays, la ville, la langue...elle passe le plus clair de son temps dans son nouveau laboratoire, sur la côté est des Etats-Unis. Là-bas, elle doit analyser des données pour améliorer les procédés industriels à l'aide de l'intelligence artificielle. Grâce à ses résultats, elle peut par exemple accélérer la conception d'une pièce d'avion, prédire sa viabilité et sa fiabilité et ainsi éviter bien des désagréments.

...pour grandir !

Ses recherches sont cruciales pour faire avancer la science et la législation en la matière, nous explique la jeune femme. Des doutes et des peurs, il y en a eu...et janvier 2019 fut une date clé dans sa construction personnelle car Laetitia publie alors son tout premier article scientifique. "À ce moment-là, en voyant l'accomplissement de mon travail, qui plus est dans une langue étrangère, j'ai repris confiance. Je savais que j'avais fait le bon choix" relate-t-elle.

Les articles s'enchaînent, Laetitia participe à ses premiers congrès, prend la parole devant des milliers de personnes...peu à peu, sa confiance se renforce. Et elle en a besoin dans ce monde très majoritairement masculin. "Lors des congrès, sur mille personnes, il doit y avoir seulement une centaine de femmes. C'est dur de se faire une place, d'être prise au sérieux", confie-t-elle. Son assurance devient alors sa meilleure arme...

La jeune de femme de 28 ans, fraîchement diplômée.

Mais des doutes et des peurs, il y en a encore eu en 2020. Le covid a réduit à néant tout son travail. Et l'angoisse d'attraper le virus s'est ajoutée à l'équation, d'autant que la santé coûte très chère aux Etats-Unis. "Après le covid, tout est tombé à l'eau. Il a fallu tout refaire" décrit Laetitia. Le doctorat a donc duré un peu plus longtemps que prévu. Heureusement, ça lui a aussi permis de découvrir et d'étudier les procédés d'impression en 3D. "Ça évolue tout le temps, très vite" et c'est aussi ce qui la passionne dans la Science. "J'aime beaucoup ce domaine et je veux absolument continuer dedans !" s'exclame-t-elle. 

Laetitia encourage d'ailleurs tous les jeunes Polynésiens à franchir le pas : "oui ça fait peur au début, moi aussi j'ai eu peur ! Oui, c'est beaucoup de stress... Mais quand on fait quelque chose qu'on aime, ça finit par payer. Même si c'est dur, même s'il faut faire des sacrifices, être loin de chez soi, de sa famille." Et au-delà de l'expérience professionnelle, ce choix lui a permis de "voyager à New York, en Floride, au Texas, au Canada, de découvrir des gens incroyables et par dessus-tout, de valoriser mon travail et de me valoriser. Et voir la fierté dans les yeux de ceux que j'aime."

Pour l'instant, la jeune femme va continuer de faire avancer la Science aux Etats-Unis...