En mars dernier, le Taporo VII devait ravitailler les îles Sous-le-Vent. Mais problème, à Tahaa, Raiatea ou encore Bora-Bora, les commerçants n'ont jamais reçu leurs commandes. Le bateau a failli couler. Ils sont mécontents. “Les plus gros fournisseurs sont sur Tahiti, que ça soit en frais, en cartons de pizza (...) je ne vois pas pourquoi on ne récupérerait pas cet argent”, clame Blandine BROSSE, propriétaire d’une pizzeria ambulante à Raiatea. Justine VERAL, elle aussi commerçante à Raiatea, estime que “ça fait quand même un trou de 45 000 cfp et ça fait deux jours de chiffre d'affaires". Teva MUSSET, chef d’entreprise sur l'île sacrée, déclare être “très pénalisé parce qu’on a besoin du matériel pour travailler, et on en n'a pas.”
Lors de l'accident, près de 3 tonnes de marchandises ont été immergées… Les victimes ont saisi le tribunal de commerce et attendent toujours qu'on les rembourse. Un collectif devrait voir le jour pour faire poids contre l’armateur. “Ils ont créé une page Facebook (...). Parmi eux, certains n'étaient pas assurés. Ceux qui n'ont pas saisi la justice contre le Taporo doivent faire le nécessaire car passé un an, il n’y a plus d’action en justice", constate plutôt amer Makalio Folitu, président de l’association des consommateurs Te Tia Ara.
Selon l’article 27 de la loi du 18 juin 1966, abrogée en Métropole mais toujours applicable en Polynésie, “le transporteur est responsable des pertes ou dommages subis par la marchandise depuis la prise en charge jusqu’à la livraison”, sauf dans certains cas : "L'incendie...En 2001, le Dori avait pris feu, cas exonératoire du transporteur maritime, il n'y a pas eu d'indemnisation...la faute nautique, est-ce que ici on va nous l'opposer ? On peut sourire, c'est quand même un navire qui est à quai, le transporteur est responsable du chargement, c'est pendant les opérations de chargement, et en plus il a l'obligation de mettre un navire en état de navigabilité en conformité avec le voyage qu'il va faire. A priori le cadre juridique est très bien défini", explique Anne-Laurence MICHEL, avocate spécialisée en droit des transports maritimes et aériens.
Déjà 80 millions cfp de pertes
Près de 80 millions cfp de pertes marchandes, estime le commissaire enquêteur, et ce n’est pas fini. L'assureur européen de la compagnie maritime est toujours en train de constater les dégâts.
Les enjeux du litige vont se cristalliser autour de la question de la nature de la responsabilité du transporteur et du (ou des) contrats d’assurance. Il est fort probable que cette situation soit portée à la connaissance du juge.
Dans cette affaire, ni l’armateur, ni l’assureur n’ont souhaité s’exprimer.
Regardez le reportage de Mereini Gamblin :