Un spectacle presque insoupçonnable... Sans bruit et sans mouvement, les coraux se reproduisent. Les colonies mâles émettent un nuage laiteux et les colonies femelles des milliers de petits oeufs à peine visibles à l'oeil nu. Ce matin-là, à la presqu'île de Tahiti, Vetea Liao s'équipe une dernière fois. Ce biologiste marin se passionne pour la ponte des porites rus, la seule espèce de corail à pondre de jour. Le rendez-vous est réglé comme une montre suisse : à une date et une heure précises.
"Comment ils font pour comprendre que c'est à ce moment-là qu'il faut pondre ? C'est assez mystérieux encore", admet Vetea Liao. Le président de l'association Tama no te Tairoto, traduisez les enfants du lagon, s'appuie sur un maillage de bénévoles sur plusieurs îles de Polynésie. Il compte sur la science participative pour mieux observer ce phénomène. "L'idée est de rassembler les informations de tout le monde", explique le biologiste.
La crainte c'est qu'avec le changement climatique et les problèmes environnementaux, ces zones peuvent être décimées en quelques mois
Laetitia Hedouin
À Moorea, l'un des plus éminent laboratoire français étudie les écosystèmes coralliens. Les scientifiques du CRIOBE scrutent les coraux et cherchent à les rendre plus résistant au choc thermique. En cette saison, la ponte synchronisée des porites rus fait l'objet de toutes les attentions. "La crainte c'est qu'avec le changement climatique et les problèmes environnementaux, ces zones peuvent être décimées en quelques mois. Pour donner une idée, en 2019, à 6 mètres de profondeur sur la pente externe, on a perdu 50% des coraux. C'est énorme. Aujourd'hui, c'est colonisé par les algues. La crainte qu'on a est que ces bébés coraux viennent pas s'installer sur cette pente externe parce qu'il y a pleins d'algues", explique Laetitia Hedouin, chargée de recherches au CRIOBE.
C'est le jour J, le cinquième après la pleine lune, d'octobre à avril, entre 6h30 et 7h30, les porites rus pondent. Les bénévoles de l'association ont rendez-vous avec eux. Cette année, ils sont 175 observateurs répartis sur neuf îles de Polynésie. Rapidement, la visibilité devient quasi nulle dans le lagon. "Pour moi, c'est une première. C'est magnifique, c'est étonnant même", confie Arutua Taumihau, bénévole Tama no te tairoto.