Un casque sur la tête, au creux de la vague de Teahupoo… Cette image est de plus en plus fréquente. Les surfeurs et surfeuses qui affrontent la mâchoire de la passe de Hava’e prennent des risques, ils le savent. Le récif est à fleur d’eau, la lèvre de la vague est aussi un danger autant que la planche de surf.
« Le casque est préconisé surtout au récif, et aujourd’hui il y a aussi des figures de plus en plus aériennes, l’amerrissage peut être fatal. Le casque, ce n’est pas que le récif, c’est aussi l’impact avec la planche aussi ou en beach break »
Max Wasna - le président de la fédération tahitienne de surf
La dernière à en avoir fait les frais sur le spot de Teahupoo, c’est la Française Johanne Defay. Lors de sa première série des JO 2024 de surf, elle a tapé sur le récif. Une chute qui lui a valu quelques points de suture. Depuis, elle porte le casque. Elle est loin d’être la seule. Chez les femmes, presque toutes les athlètes le portent, seule Vahine Fierro et quelques autres habitués du spot ne le font pas. Chez les hommes, il est moins fréquent mais parfois même les plus téméraires s’y sont mis. C'est le cas du Brésilien Joao Chianca, un chargeur comme on dit dans le jargon, qui le portait lors des huitièmes de finale. Il faut dire que ce dernier s’est gravement blessé lors d’un wipe-out à Pipeline en décembre 2023. Jérémy Florès, le coach de la Team France pour ces Jeux Olympiques, avait aussi eu un grave accident lors d’un free surf en Indonésie. Il s’en était sorti avec une commotion cérébrale, 35 points de suture au visage, et surtout une obligation de porter cette protection pour surfer. Ce qui ne l’avait pas empêché de remporter la Billabong Pro 2015 à Teahupoo.
«Tu portes le casque quand tu sens qu’il y a un danger, c’est sûr. Mais, c’est un choix personnel, c’est toi qui décides si tu veux ou pas le porter. Il faut savoir que le casque est assez gênant parce que lorsque tu surfes tu as envie d’être libre et d’être synchro avec la nature mais dès fois il vaut mieux l’avoir. »
Michel Bourez - ancien surfeur professionnel
Mais, porter le casque est plutôt récent. Durant des années, il n’était pas du tout préconisé pendant les compétitions. En 2007 pourtant, le docteur Guillaume Barucq a réalisé une étude sur l’accidentologie liée à la pratique du surf sur la côte basque. Selon cette dernière, la tête du surfeur est atteinte dans 50% des accidents. L’analyse avançait notamment qu’un « casque adapté semble prévenir [le risque de plaie du scalp] en cas de choc d’intensité faible à modérée. » Et les risques sont de plus en plus élevés au fil des années. Avec l’évolution du sport, sa popularité, la taille des vagues et la puissance des manœuvres, les limites du surf sont repoussées, le risque augmente avec elles et les blessures aussi.
« On a essentiellement des traumatismes contre la planche et contre le récif. Cela peut entraîner des plaies, des hématomes, des contusions musculaires. On peut avoir sur des cas plus graves des traumatismes crâniens. Ce sont les blessures habituelles du surf. Plus les vagues sont grosses et puissantes et plus l’impact peut être importante avec des blessures plus graves. »
Olivier Matarese - responsable médical des athlètes des JO 2024 à Tahiti
En 2022, même la World Surf League a pris le virage de la sécurité, en proposant des casques aux athlètes à Pipeline, mais aussi au travers d’un nouveau protocole lié aux commotions cérébrales. D’ailleurs pour ces JO 2024, les surfeurs n’ont pas l’obligation de porter un casque mais celui-ci est clairement recommandé. Aujourd’hui, de plus en plus de surfeurs et jeunes surfeurs le portent. « C’est aussi un effet de mode. Jusqu’à présent il n’était pas préconisé, donc quand on le mettait on se faisait remarquer. Maintenant qu’il est préconisé, on peut mettre les sponsors, il peut être plus stylé, et va devenir quelque chose de tout à fait normal dans le surf», observe Max Wasna, le président de la fédération tahitienne de surf. À l’exemple de Kauli Vaast. Le prodige de Vairao est habitué à le porter sur le spot polynésien depuis tout jeune. Il était l’un des seuls mais il a pris le problème à l’envers. À Teahupo’o, son casque coloré est devenu un signe de reconnaissance. Les marques et sponsors se sont mis aussi à la page et travaillent sur ce point, proposant des modèles dont l’esthétique est travaillée.