Quand Mama Nita propose à Tiare des billets d'avion pour partir à Los Angeles. Tiare en parle à des amis qui habitent Aratika. Trois jours avant le départ, ils débarquent de leur atoll pour effectuer le voyage. Mais, le jour du départ, " on n'a pas pu partir ", raconte Tiare, " car Nita n'avait pas les billets d'avion ". C'est la douche froide. " Pour eux, c'était un rêve, pour certaines personnes c'était leur premier voyage " continue Tiare.
Comme des dizaines d'autres personnes, Tiare et ses amis venaient de se faire avoir par Mama Nita. Entre 2014 et 2017, cette quinquagénaire a proposé une croisière à Hawaii ou encore un séjour à Las Vegas avec des billets pour assister au concert de Céline Dion, à des prix défiant toute concurrence, à des clients crédules.
Parmi les parties civiles présentes à l'audience, Nélia qui représente un groupe de 20 personnes de la presqu'île. Pour aller faire du shopping à Los Angeles, elle raconte que les participants ont déboursé " 150 000 francs par couple " pour un billet aller-retour. Un voyage qu'ils n'ont jamais effectué. Aujourd'hui, ils demandent le remboursement des sommes engagées. Pour réaliser leur rêve, certains avaient échelonné leurs paiements.
" Les victimes sont victimes de leur appât du gain "
Maître Smain Bennouar
La prévenue qui comparaissait, ce mardi 18 janvier, pour escroquerie en récidive, travail clandestin et exercice illégal d’agent de voyage, s'était également improvisée changeur manuel. Elle revendait des dollars en-dessous de leur valeur légale. Une revente forcément à perte.
" Les victimes sont victimes de leur appât du gain " fait remarquer maître Smain Bennouar. L'avocat de la prévenue reconnaît la qualité de victimes des parties civiles mais il rappelle que " lorsqu'on demande des dollars en dehors du système bancaire, on prend le risque qu'il n'y a pas de garanties, ça peut marcher mais des fois, on peut y perdre beaucoup et certains peuvent perdre leurs économies ".
Pour l'avocat, si sa cliente " a commis quelques infractions, il n'y avait pas cette malice, il n'y avait pas cette intelligence des délinquants en matière financière, elle-même, elle s'est laissée emporter ".
La prévenue a agi entre 2014 et 2017, sans autorisations, sans cartes professionnelles, avec un compte personnel sur lequel ont transité des millions de francs sans que sa banque ne s'en inquiète. Ce sont ces mouvements d'argent qui ont éveillé les soupçons de Tracfin, un organisme chargé de surveiller les circuits financiers. Un signalement a, alors, été fait au parquet qui a ensuite ouvert une enquête.
À l'issue de son procès, Mama Nita a été condamnée par le tribunal correctionnel à trois ans de prison avec sursis. Elle devra indemniser ses victimes.