Un colloque pour mieux comprendre le "Pacific Way, 50 ans après"

Le politologue Sémir AL Wardi fait un bilan sur ce que ce concept a apporté aux pays de l’Océanie.
Ce début de la décennie 2020 marque le cinquantième anniversaire de la fameuse formule Pacific Way lancée en 1970, à la tribune des Nations-Unies, par le Premier ministre fidjien. 50 ans plus tard, un colloque co-organisé par le politologue Sémir AL Wardi fait un bilan sur ce que ce concept a apporté aux pays de l’Océanie dans le domaine du foncier, de l’économie, du droit, et bien d’autres. Car le Pacific Way, c’est surtout un consensus pour le bien commun.

Encadré par l’UPF, son laboratoire GDI (Gouvernance et développement insulaire) et le Centre de recherche et de documentation sur l'Océanie (CREDO), ce colloque veut faire le bilan des 50 ans du Pacific Way, et a pour ambition de mettre en place un réseau régional, afin de mieux identifier les difficultés, mais aussi les succès naissant des îles du Pacifique : un observatoire dans le Pacifique des expressions de la démocratie / Observatory of the Pacific (Islands) Expressions of Democracy (OPED).

Historiquement, Fidji accédait à l’indépendance en 1970. C’est à ce moment que son premier dirigeant, Sir Ratu Kamisese Mara, énonça pour la première fois sa célèbre formule "Pacific Way", à la tribune des Nations-Unies. L’objectif est, selon lui, de "construire une société où des populations qui diffèrent par les races, les opinions et les cultures, peuvent vivre et travailler ensemble, au bénéfice de tous". L’état d’esprit de cette formule met en avant le dialogue, les échanges et la recherche de consensus dans la résolution de problème.

Lors de son discours d’ouverture, le Président Edouard Fritch, a souhaité souligner que les Océaniens, lors de rencontres internationales, ont une sensibilité particulière, qui diffèrent de celles des grands pays. En effet, "les valeurs qui lient nos communautés insulaires sont plutôt celles de solidarité, de cohésion, de fraternité et de paix", a indiqué le Président Fritch.

Le Pacific Way traduirait l’attachement des pays d’Océanie à une démarche consensuelle dans le traitement des affaires intérieures de la région.

Le dialogue et la recherche de consensus sont au sein des valeurs du Forum du Pacifique, auquel la Polynésie fait partie. Ces valeurs permettent de se sentir plus forts à plusieurs, et d’être unis dans des pourparlers ou dans des négociations internationales.

Le Président a d’ailleurs rappelé les évènements récents : "Encore récemment, cette pratique du consensus a pleinement joué dans l’organisation du sommet USA-îles du Pacifique à Washington. En effet, alors que la Nouvelle-Zélande, l’Australie, la Nouvelle-Calédonie, Cook, Niue, la Polynésie française et le secrétaire général du Forum n’étaient pas invités à Washington, les autres leaders membres du Forum ont spontanément exigé de l’exécutif américain d’inviter l’ensemble des 18 membres du Forum. Autrement, personne ne se rendrait à ce sommet de Washington. La Maison Blanche a accepté la condition émise par les membres du Forum. […] Nous tentons de transformer notre faiblesse apparente, provenant de notre petitesse, en opportunités et en atouts grâce à notre unité".

Aujourd’hui, de vastes problématiques sont en discussion au sein du Forum, telles que
les conséquences du changement climatique, la préservation des ressources de l’océan, la
surveillance de nos Zones Economiques Exclusives (ZEE) respectives, les pathologies
sanitaires communes, la production d’énergies renouvelables, le traitement des déchets,
ou encore les transports internationaux régionaux. 

Plusieurs personnalités ont assisté à l'ouverture du colloque.

Sur le sujet du climat, le haut-commissaire Eric Spitz a mis en exergue que le Pacific Way se traduit concrètement aujourd’hui par un leadership du Pacifique. Le Pacifique est l’espace au monde qui compte le plus d’aires marines protégées. Il a souligné que l’idée d’une gouvernance soutenable associant l’homme et l’océan, telle que formulée par le rāhui polynésien, constituait une spécificité culturelle de l’Océanie et un exemple à suivre.

Edouard Fritch a clôturé qu'"en Polynésie, nous avons intégré la règle de la majorité moins
bloquante que la règle du consensus, en tout cas, plus rapide. Oui, plus vite, plus rapide.
[…] Grâce à l’autonomie, nous sommes nous-mêmes. Ce cadre statutaire original respecte
fondamentalement notre culture, notre identité et nos langues. De ce fait, nous nous
exprimons et nous parlons à nos amis du Pacifique et au monde, avec notre âme océanienne,
avec notre sensibilité, avec nos convictions".

Le colloque "Pacific Way, 50 ans après", a lieu du 18 au 20 octobre, à l’université de la Polynésie française (UPF) sur le campus d’Outumaoro.