Véritables patentés ou travailleurs dissimulés ?

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Le travail dissimulé est dans le collimateur des membres du CESEC. Le 26 septembre dernier, ils ont planché sur un texte qui mettait en lumière des dérives sur l’emploi des patentés par les entreprises. Pour un patron, avoir recours à un patenté, c’est réaliser une économie de 35% de charges. Sauf que cette situation crée un manque à gagner dans les caisses de la Caisse de Prévoyance Sociale.

Salarié pendant 10 ans, Jean-François a pris une patente en 2021. Il est menuisier et travaille pour une entreprise de quincaillerie. Il est désormais attaché à la liberté que lui confère ce statut : "en fonction du travail qui m'est fourni, je m'organise, explique-t-il. Des fois, je viens et je fais tout en une journée, si je peux. C'est ça qui me plaît aussi."  Quant à sa retraite : "je pense que notre génération aura vraiment du mal à obtenir une retraite convenable. En tant que patenté, je ne cotise pas pour la retraite, mais j'épargne quand même. Là, au moins, je suis sûr d'avoir quelque chose."

Presque 5 fois moins de cotisations

Jean-François fait partie des plus de 10 000 patentés de Polynésie. Quand il cessera son activité, même s’il n’a pas cotisé au régime de retraite de la CPS, il sera éligible au moni ru'au, le minimum vieillesse, financé principalement par les salariés. 

Quand un patenté paie a minima un taux de cotisation de 9,84%, c’est 43,38% pour un salarié. Des baisses de charges favorables aux auto-entrepreneurs, mais aussi aux patrons déplore Atonia Teriinohorai, secrétaire général de O oe to oe rima : "Certaines entreprises aujourd'hui, au lieu d'embaucher des salariés, préfèrent prendre des patentés pour ne pas payer les charges à la CPS. Si on commence à prendre que des patentés, on aura moins  de salariés et moins d'argent qui rentre à la CPS."

"Une recrudescence des faux patentés"

La patente séduit. Entre 2013 et 2023, le nombre de cotisants au régime général des salariés (RGS) a augmenté de plus de 20% quand celui des non-salariés (RNS) a connu une hausse de plus de 48%. La relance de l’emploi salarié passe par une refonte du code du travail. "Le code du travail rend la tâche difficile pour les entrepreneurs aujourd'hui, assure Steeve Hamblin, le président du MEDEF Polynésie. On peut embaucher, mais licencier est difficile et coûte beaucoup d'argent. Donc, on peut se marier, mais on ne peut pas divorcer. Le code du travail est écrit en faveur des salariés. Conséquences : on a une recrudescence des faux patentés. Il faut qu'on se penche sur ce problème. Il nous faut donner davantage de souplesse à l'employeur lorsqu'il rencontre des difficultés avec un salarié, de pouvoir s'en séparer quitte à fixer un certain nombre de mois et d'indemnités pour ne pas que l'employé se retrouve du jour au lendemain sans revenu."

Si les 10 000 patentés avaient un emploi salarié, selon le rapport du CESEC, cela ferait près de 12 milliards de francs pacifique de cotisations sociales annuelles. 

Lors de son autosaisine le 26 septembre dernier, le CESEC a voté pour une série de préconisations : supprimer la patente multi-activités, affiliation d'office au RNS pour l'obtention d'une patente ou encore augmenter le taux de cotisation du RGS.

Des préconisations qui tombent à pic, en pleines discussions sur la réforme de la PSG.