Le journaliste guadeloupéen Josué Jean-Bart, après avoir gagné son procès en première instance, a été débouté, par la cour d’appel de Rennes, dans un dossier qui l’opposait à des personnalités d’extrême droite. Ces dernières l’avaient plus ou moins subtilement traité de "sauvage".
Josué Jean-Bart avait obtenu, le 21 décembre 2023, la condamnation des prévenus, pour diffamation publique et injure publique, en raison de l’origine ethnique, la nation, la race ou la religion.
Les faits se sont passés à Anger, dans l’Hexagone.
L’audience en appel s’est tenue le 19 juin dernier.
Des articles qui ont déplu à un groupuscule d’extrême droite
Les propos à l’origine de cette affaire ont été tenus sur un site d’information qualifié d’extrême droite, Breizh Info.
Cette publication, en réaction à un article de Josué Jean-Bart dans Ouest-France, a qualifié le journaliste de "plumitif guadeloupéen" qui "jette des sagaies vers son propre camp" ; une phrase du style "Y'a bon Banania", qui entend comparer le journaliste à un sauvage, selon notre analyse.
Le journaliste guadeloupéen, nous explique les raisons de cette prise à partie :
Je travaille, depuis quelques années, sur des questions de groupes d’extrême droite, dans la ville d’Angers. Il y a eu une agression, dans cette ville, de la part de membres de ce groupe d’extrême droite, qui ont frappé des gens, parce qu’ils avaient collé un autocollant sur leur volet ; ce que j’ai relaté dans le journal Ouest-France. Il y a eu une série d’articles, en plus de celui-ci (...), des articles qui ont déplu au porte-parole de ce groupuscule d’extrême droite (...).
Josué Jean-Bart, journaliste
Une parole raciste libérée en France ?
L’avis de la Cour d’appel est tout autre. Si elle convient que les termes sont péjoratifs, pour elle, ils doivent être replacés dans un contexte "d’opposition idéologique" des deux parties. Le journaliste est ainsi vu comme un militant de gauche, parce qu’il a publié sur ses réseaux sociaux, dans le passé, des messages de prises de position. Rien à voir avec son article, ni même son métier de journaliste et son employeur.
La construction argumentaire de la Cour va plus loin : Josué Jean-Bart est accusé, à titre personnel, d’être "un sympathisant, voire un militant de gauche". Un argument des prévenus, utilisé aussi pour relaxer un autre mis en cause, "L’Alvarium", condamné en première instance en diffamation, pour avoir affirmé que le journaliste a "des liens avec des antifas", ces groupes antifascistes, proches de l’extrême gauche.
Les magistrats enfoncent le clou, en affirmant que le qualificatif de "nuisible" utilisé par les prévenus à l’encontre de Josué Jean-Bart, est un qualificatif "général" qui ne renfermerait aucune "allégation ou imputation".
Une illustration, sans doute, de la libération de la parole de ce courant politique et de son acceptation.
L’expression du racisme est devenue totalement libre. On sent aujourd’hui qu’il y a quelque chose qui émerge dans la société : cette espèce d’autorisation à utiliser tout le vocabulaire raciste, les expressions, les images... On n’a plus de crainte d’y aller franchement (...).
Josué Jean-Bart, journaliste
Josué Jean-Bart ne se laisse pas abattre. Avec Ouest-France, son employeur, ils ont décidé de se pourvoir en cassation.