Réunie en congrès à l'île des Pins, l'Union calédonienne se veut ferme sur le fond

Le 9 novembre 2023, Daniel Goa prononce le discours inaugural du congrès tenu par l'Union calédonienne à Wapan.
Palika, Union progressiste en Mélanésie, Union calédonienne. Autant de partis indépendantistes qui se réunissent ce week-end, alors que l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie se réfléchit. Dès ce jeudi, l'UC a lancé à l’île des Pins le cinquante-quatrième congrès de son histoire. Le discours prononcé par le président du mouvement en ouverture donne le ton.

"Ensemble, levons-nous pour embarquer sur la pirogue de l'indépendance." Tel est le mot d'ordre, pour le congrès de l'UC qui a débuté ce jeudi et se tient jusqu'à dimanche à Wapan, dans le Nord de l'île des Pins. Il doit évoquer notamment la stratégie d’un parti qui a choisi la politique de la chaise vide, depuis les dernières discussions parisiennes. Et une position plutôt hostile quant à leurs conclusions.

Les intentions

Durant un discours inaugural ferme sur le fond, mais plutôt modéré côté forme (comparé à d'autres fois), Daniel Goa a précisé les intentions de son parti. "Aucun de nous ne veut d'un nouveau statut dans la France. Nous sommes en revanche prêts à examiner tout nouveau statut avec la France", pose celui qui préside le mouvement depuis onze ans, en parlant d'interdépendances. "Les sujets de discussions sont ouverts, avec notre puissance administrante, dit-il plus loin. Et notre projet ouvre la possibilité de la double nationalité, d'un accord de coopération régionale, d'un accord de défense et d'autres accords en matière de justice, en matière économique, monétaire et financière, en matière d'enseignement supérieur et en matière culturelle."

Le "plancher"

Mais pas question de toucher au corps électoral, martèle-t-il. Action que l’Union calédonienne associe à "une volonté politique de réactiver le peuplement de notre pays, visant à rendre minoritaire le peuple kanak", formule Daniel Goa. "L'Etat français n'a plus aucune intention de décoloniser notre pays et de l'accompagner vers sa pleine souveraineté. Il veut aujourd'hui, au contraire, conforter durablement les institutions du territoire et sa place au sein de la République." Or, "nous n'abandonnerons jamais la trajectoire unie vers la décolonisation validée par le vingt-et-unième congrès du FLNKS en février 2023. Nous avons toujours considéré que les acquis que sont le corps électoral citoyen, le maintien sur la liste des pays à décoloniser, le principe d'irréversibilité jusqu'au transfert des compétences régaliennes ne devaient jamais être remis en cause. C'est notre plancher."

Le "Non" à la réforme constitutionelle

L'Union calédonienne qui s’oppose à la future réforme constitutionnelle.

La réforme constitutionnelle n'a que deux objectifs réels. Ouvrir le corps électoral citoyen au-delà du périmètre du peuple calédonien défini lors de l'Accord de Nouméa, et mettre fin à la valeur constitutionnelle de l'Accord de Nouméa. C'est pourquoi l'Union calédonienne conteste la nécessité-même d'une réforme constitutionnelle.

Daniel Goa, président de l'UC, discours de Wapan

L'Accord de Nouméa

D’autant que le gel du corps électoral demeurerait acceptable, selon la cour européenne des droits de l’Homme, "aussi longtemps que la Nouvelle-Calédonie est sur la trajectoire d'émancipation". Selon Daniel Goa, "on peut faire beaucoup sans réécrire l'Accord de Nouméa. Rester dans cet Accord de Nouméa qui nous réunit, tous, peut représenter cette période transitoire dont nous avons besoin pour parvenir à un grand accord politique sur notre émancipation." 

Autre considération, les élections provinciales "doivent se tenir à l'heure, en mai 2024, et en corps électoral citoyen. C'est une exigence démocratique." Ou encore : "Je réaffirme ici que nous ne sortirons pas les premiers de l'Accord de Nouméa. Nous y sommes attachés parce qu'il est notre parole. Il porte un processus de décolonisation pacifique et il est irréversible. Recoloniser en rompant unilatéralement la parole de l'Accord de Nouméa par la réforme constitutionnelle sera ressenti par le peuple kanak comme une seconde prise de possession."

L'opposition au renforcement de la présence militaire

De dénoncer par ailleurs la volonté, exprimée par l’Etat, de renforcer la présence militaire française. Décision qualifiée de préoccupante. "Cette position énoncée unilatéralement par la France suggère une forme de recolonisation de Kanaky-Nouvelle-Calédonie. Une forme de nouvel impérialisme colonial."

La critique du FLNKS

Un discours critique envers le front indépendantiste. "Plusieurs paroles coexistent au nom du FLNKS et se neutralisent", pointe Daniel Goa. "Le bureau politique veut être le noyau politique. Il veut proposer la ligne de conduite ensuite adoptée en réunion plénière du front. Or, ce bureau politique du FLNKS, plutôt que de coordonner notre lutte unitaire et globale, est neutralisé par les petits calculs. Notre lutte mérite (…) un peu de hauteur de vue, et les postures auxquelles nous avons assistées ces derniers temps n'en sont pas dignes."

Pour "recentrer notre combat (…) notre congrès devra décider de l'ouverture du FLNKS à tous les mouvements nationalistes, toutes les organisations indépendantistes, les organisations politiques, associatives, syndicales, religieuses et [coutumières]". Un appel à l’unité pour parler d’une voix vers un seul objectif : définir la trajectoire vers la pleine souveraineté. 

Voyez la synthèse de Bernard Lassauce et Nicolas Fasquel

©nouvellecaledonie

Les ateliers

Le temps du congrès, des ateliers doivent plancher sur trois sujets en particulier :

  • "le fonctionnement du mouvement et du front", 
  • la stratégie "pour la phase actuelle de la transition vers l'indépendance", 
  • et "la trajectoire vers la souveraineté".