A Saint-Benoît, les maires de La Réunion font front commun contre les violences avant de rencontrer le préfet

Réunion de l'AMDR à Saint-Benoît suite aux violences à Bras-Fusil
L'Association des maires de La Réunion a réuni ce mercredi 27 mars les élus de La Réunion, à Saint-Benoît. Une quinzaine de maires a réfléchi à des pistes de solutions qu'ils soumettront la semaine prochaine au préfet de La Réunion, pour enrayer le phénomène de violence qui touche plusieurs villes dernièrement.

Une quinzaine de maires ont répondu ce mercredi 27 mars 2024 à l'appel de l'Association des maires de La Réunion (AMDR), pour réfléchir ensemble à la problématique des violences urbaines qui touchent le département dernièrement. 

Regarder le reportage de Réunion La 1ère : 

Réunion de l'association des maires à Saint-Benoît ©Réunion la 1ère

Le week-end dernier, le quartier de Bras-Fusil à Saint-Benoît avait été le théâtre de violences, vraisemblablement entre bandes rivales, qui s'étaient soldées par des dégradations sur plusieurs dizaines de véhicules stationnés dans la rue des Pétunias.

Une réunion sollicitée dès le week-end dernier

Le maire de Saint-Benoît Patrice Selly avait alors sollicité une réunion entre élus afin de réfléchir de façon commune aux moyens de lutter contre ce phénomène qui touche plusieurs villes de l'île. 

"C'est une grande satisfaction de voir que les maires se sont mobilisés autour de ce problème que je considère comme étant un problème de société, ces violences urbaines qui ne cessent de s'accroître non plus seulement à Saint-Benoît, mais sur tout le département"

Patrice Selly, maire de Saint-Benoît

 Autour de lui, plusieurs autres édiles ont répondu présent pour partager leurs expériences et proposer des pistes de solutions. Parmi eux, les maires de Saint-Denis, du Port, de Saint-Philippe, de Sainte-Suzanne, de Bras-Panon, Salazie... 

"Un phénomène départemental"

Pour le maire de Saint-Benoît, il s'agit pour les maires de réfléchir à comment ils peuvent agir à leur niveau. "Les maires seuls n'auront pas la capacité de régler ce problème. Il y a des solutions à plusieurs niveaux, chacun a sa part de responsabilité. On prendra les nôtres en ce qui concerne les communes, mais à l'Etat et à tous les partenaires d'assumer les leurs également", avançait-il. 

"C'est un phénomène départemental pour lequel il faut des solutions communes. Il faut qu'on parle d'une même voix. Nous avons pu établir ensemble un certain nombre de prescriptions qu'on va essayer de porter devant le représentant de l'Etat. (...) On est tous d'accord pour dire qu'il faut mettre un mot sur les problèmes qu'on rencontre, parler sans tabou, faire face aux problématiques réelles que l'on constate sur nos territoires" 

Patrice Selly, maire de Saint-Benoît

"Communautarisation"

Une nouvelle fois, le maire de Saint-Benoît a tenu à souligner le "phénomène de communautarisation des individus issus de la communauté mahoraise" qu'il pose depuis plusieurs années comme responsables d'actes réguliers de violence dans la commune. "L'objectif n'est pas de stigmatiser, mais de comprendre les origines du phénomène et d'y apporter une solution", assure Patrice Selly.

Ce faisant, il questionne la responsabilité de l'Etat dans cette situation, et appelle à une "intervention plus forte" de ce dernier à Mayotte, avec un service public plus présent, et un accompagnement des familles et des mineurs isolés. 

Préparer la réunion du 3 avril avec la préfet 

Serge Hoareau, le maire de Petite-Ile et président de l'Association des maires de La Réunion, était évidemment présent à Saint-Benoît ce mercredi après-midi. "C'est normal que les élus se saisissent de cette problématique qui est importante. On vient aussi travailler pour préparer une séance plus importante avec le préfet de La Réunion". Une rencontre prévue le 3 avril prochain. 

L'édile sait d'emblée qu'il rappellera à l'Etat la nécessité de jouer son rôle et de "rétablir l'ordre républicain". "Nous sommes dans un état de droit et il y a des décisions de justice qui doivent être prises face aux délinquants", affirme-t-il. 

Plusieurs réponses à apporter au problème

Mais la réponse judiciaire n'est pas suffisante, laisse entendre Serge Hoareau, évoquant un travail à poursuivre autour de "l'accompagnement de ces jeunes désoeuvrés", ou encore des parents, qui doivent être "replacés devant leurs responsabilités". 

"Ce n'est pas propre à la ville de Saint-Benoît ou au quartier de Bras-Fusil, ce sont des problèmes qu'on retrouve dans les cités urbaines et même dans la ruralité. Il ne s'agit pas pour nous de stigmatiser une commune ou un quartier, mais de montrer que nous sommes tous confrontés à cette montée de violence" 

Serge Hoareau, maire de Petite-Ile, président de l'AMDR

Davantage de moyens 

Pour autant, la sécurité est la responsabilité de l'Etat, souligne Serge Hoareau. "Je pense que c'est une urgence et que l'Etat peut déployer plus rapidement. (...) Il y a des personnes qui peuvent être mobilisées : nous avons 250 réservistes à La Réunion dans la gendarmerie, qui pourraient venir rassurer la population des cités urbaines", suggère-t-il. 

Car les manques se situent à plusieurs niveaux, pour assurer la sécurité : moyens humains dans la gendarmerie et la police, mais aussi des moyens dans la justice, des assistants sociaux... 

"L'Etat peut faire mieux. Tout le monde peut faire mieux, et l'effort doit être collectif" 

Serge Hoareau, maire de Petite-Ile, président de l'AMDR

"Il faut arrêter de tout reporter sur les maires"

Les maires ont à coeur de rassurer leur population "exaspérée par ces phénomènes de violence", mais considèrent que les efforts fournis sont déjà énormes. "Il faut arrêter de tout reporter sur les maires. Nous sommes les premiers piliers de la République, mais si la République n'est pas là quand on a besoin d'elle, c'est comme si nous n'existions pas", assène Serge Hoareau. 

Des maires solidaires

Ericka Bareigts, édile du chef-lieu, est ressortie de cette réunion de travail avec un sentiment de satisfaction face à cette "solidarité de tous les maires", y compris ceux des communes des hauts qui sont moins concernés par ce phénomène de violence. 

Des moyens "à la hauteur de l'ordre républicain"

Autour de la table, les maires présents ont pu exposer, chacun leur tour, ce qu'il se passe dans leur ville respective. Ces phénomènes de violence ne sont pas ceux d'avant, constate Ericka Bareigts. D'où une demande de moyens supplémentaires, "à la hauteur de l'ordre républicain que nous voulons maintenir dans ce pays du vivre-ensemble", "ordre républicain qui est la responsabilité de l'Etat", a aussi précisé la maire de Saint-Denis. 

"L'exaspération de nos populations dans nos villes, c'est quelque chose qu'on vit au quotidien, c'est pour ça qu'on est attachés à trouver des solutions (...) avec la police municipale, les médiateurs, les outils de politique de la ville" 

Ericka Bareigts, maire de Saint-Denis

La présence de l'Education nationale, de la justice et des bailleurs sociaux sollicitée

Lors de la réunion prévue avec le préfet de La Réunion le 3 avril prochain, que les élus ont commencé à préparer cet après-midi, d'autres acteurs doivent être présents, dont le recteur de l'académie, un représentant de la justice, mais aussi des bailleurs sociaux. "Il manque peut-être des relais dans les groupes d'habitation pour alerter sur les difficultés qu'on rencontre", fait remarquer le président de l'AMDR. 

"Si on veut vraiment avancer sur ce sujet, nous devons tous y travailler, au-delà des maires, des parlementaires, et des présidents d'EPCI, il y a d'autres acteurs qui doivent être mis autour de la table"

Serge Hoareau, maire de Petite-Ile, président de l'AMDR