Déjà épinglée en début de semaine par l'Agence régionale de santé, qui lui a signifié la suspension immédiate de ses activités de chirurgie et d'endoscopie en raison de "défauts dans ses protocoles relatifs à la qualité et la sécurité des soins", la clinique Durieux avait également un rendez-vous judiciaire important ce vendredi 8 novembre, devant le conseil des prud'hommes de Saint-Pierre.
Pas d'accord d'entreprise sur le forfait jours
Quatre cadres ou anciens cadres de la clinique ont en effet saisi la juridiction prud'homale pour des entorses au Code du travail, et notamment le recours abusif à une convention de forfait jours inexistante, faute d'accord d'entreprise et de suivi du temps de travail et de la santé de ses salariés.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
Depuis à tout le moins 2020, la clinique aurait ainsi appliqué cette organisation du travail, en dépit d'alertes internes du coordinateur juridique et de rapports sociaux concluant en 2019 à l’absence de cet accord d’entreprise.
"Burn-out" et dépressions
Aussi, les requérants réclament le paiement de centaines d'heures supplémentaires impayées sur plusieurs années, et dénoncent l'utilisation abusive du système d’astreintes, ayant conduit plusieurs d'entre eux à l'épuisement faute de temps de repos respectés.
En "burn-out", deux de ces cadres dont la directrice adjointe des soins et une adjointe au chef de bloc sont aujourd'hui en arrêt maladie pour dépression. Le quatrième, le pharmacien gérant, a préféré démissionner.
"On refuse d'être pris pour les dindons de la farce"
Me Victor Margerin, avocat de salariés de la clinique Durieux
"Dans ce dossier, l'employeur a volontairement appliqué une convention de forfait-jours qu'elle savait illégale, ce qui a été reconnu par leur conseil" souligne Me Victor Margerin, l'avocat des salariés."On refuse d'être pris pour les dindons de la farce. Nous réclamons que cette convention illégale tombe et que les salariés soient justement indemnisés pour leur préjudice."
Accusations "non-fondées" pour la clinique
"C’est aberrant d’entendre la clinique plaider l’incompréhension à chaque fois que leur responsabilité est mise en cause. Lorsque la certification de la HAS saute, c’est l’incompréhension. Lorsque le délai qui leur est laissé pour régulariser cette situation n’est pas respecté et que la clinique prend une sanction administrative, c’est l’incompréhension. Lorsqu’ils sont attaqués parce qu’ils ne respectent pas les droits des salariés en toute connaissance de cause, idem. Visiblement, on ne comprend pas grand-chose à la clinique Durieux" a-t-il plaidé.
Du côté de la clinique, l'avocat a contesté des accusations "non-fondées", tout en reconnaissant que la convention forfait jours n'était pas applicable en l'état.
Certification retirée par la HAS
Un dossier qui pose également la question des répercussions sur l'organisation du travail au sein de la clinique, et des conséquences sur son fonctionnement.
Ainsi, la démission du pharmacien de l'établissement "en raison de l’absence de moyens lui permettant d’assurer le respect du code de la santé publique" semble renvoyer à l'un des points soulevés par la Haute autorité de santé, qui a refusé en février dernier de reconduire la certification de l'établissement et de son centre d'hémodialyse. En raison, notamment, de dysfonctionnements dans la sécurité du circuit du médicament.
Le conseil de prud'hommes a mis l'affaire en délibéré au 28 février 2025.