Le leader d'un collectif jugé pour avoir diffamé l'ancien procureur de Mayotte

Un membre du "collectif de défense des intérêts de Mayotte" est jugé au tribunal correctionnel de Saint-Denis pour diffamation à l’encontre de l'ancien procureur de Mayotte. L'intéressé avait affirmé à la radio que le magistrat aidait des migrants africains à entrer sur le territoire français
Soufiyane Moutouin, un des leaders du CODIM, le Collectif de défense des intérêts de Mayotte, est-il allé trop loin, le 3 mai 2019, lorsqu'il a déclaré dans l'émission matinale d'une station de radio locale que l'ancien procureur de Mayotte Camille Miansoni aidait des migrants à entrer illégalement sur le territoire français ?

"On connaît le Camille qui est haut placé, hein, tout le monde le connait bien, hein", avait lancé Soufiyane Moutouin sur les ondes en assurant qu'un migrant avait "balancé" le nom du magistrat. "Moi personnellement, je vous dis, moi j'assume, hein", avait déclaré le militant en préambule.
 

Le procès "dépaysé" à La Réunion


Ce jour-là, Soufiyane Moutouin a affirmé que l'ancien patron du parquet de Mayotte aurait favorisé pendant trois ans l'entrée illégale de migrants venus d'Afrique : de Tanzanie ou du Congo, pays dont est originaire Camille Mansioni.

Des propos suffisamment graves pour qu'une plainte soit déposée et appuyée par le parquet général. C'est ainsi que Soufiyane Moutouin a fait l'objet de poursuites pour diffamation. L'affaire doit être examinée ce jeudi après-midi par les magistrats du tribunal correctionnel de Saint-Denis.

Pour une bonne administration de la justice, le procès a en effet été "dépaysé" à La Réunion. Soufiyane Moutoui, qui va devoir démontrer sa bonne foi s'il ne veut pas être condamné, est soutenu par le collectif Re-Ma Reunion. En début d'après-midi, un comité de soutien a répondu présent au palais de justice de Champ Fleuri.
 
Rassemblement de soutien devant Champ fleuri pour Soufiyane Moutien

 

Le délibéré sera rendu le 4 novembre

A la barre du tribunal, Soufiyane Moutouin a reconnu ses propos. Il les assume mais s’excuse auprès de Camille Miansoni. Le père de famille de 51 ans, contrôleur de bus au casier judiciaire vierge, a affirmé ne pas avoir eu l’intention de diffamer le procureur de la République à Mayotte.

S’il a cité le nom d’un " Camille qui est haut placé ", il ne pensait pas au représentant du parquet, a-t-il défendu. Mais pour la partie civile, il ne s’agissait pas d’une " simple erreur de langage ". L’avocat estime qu’il y a bien eu une attaque contre le procureur de Mayotte, évoquant du "racisme " à l’encontre de son client.

Une amende de 10 000 euros a été requise. La défense a, elle, plaidé la relaxe. Le délibéré sera rendu le 4 novembre prochain.
 

Un procureur régulièrement attaqué


Premier procureur noir à exercer à Mayotte, Camille Miansoni a été régulièrement la cible d'attaques, rappelaient en juin dernier nos confrères de Mayotte La 1ère. Et notamment sur son prétendu laxisme en matière d'immigration clandestine. Des attaques injustifiées car ainsi que l'ont rappelé nombre d'avocats et de magistrats du TGI de Mamoudzou, le magistrat est au contraire réputé pour être un procureur des plus fermes et intraitables envers les délinquants de tout profil.

Denis Chausserie-Laprée, le procureur général de la Réunion et de Mayotte, avait lui-même réagi à ces attaques et apporté son soutien à Camille Miansoni du fait de ces attaques régulières.
 

Au travers de Camille Miansoni, c’est l’institution judiciaire qui est attaquée… Cela n’est pas acceptable. Ces mises en cause, ces insultes, ces injures sont inacceptables. Je me réserve le droit de faire identifier, rechercher les personnes à l’origine d’un certain nombre d’écrits constitutifs d’infractions pénales graves

Le procureur général de la Réunion et de Mayotte Denis Chausserie-Laprée



Après trois ans à Mayotte, Camille Mansioni va poursuivre sa carrière à Brest. Un mouvement qui était déjà dans les tuyaux depuis plusieurs mois.