Le Kéré (qui signifie être affamé en malgache) est la conséquence de quatre années de sécheresse. Dans le Sud de Madagascar, le changement climatique n'est pas une vague idée, mais une réalité. Plus d'un million d'habitants sont victimes de cette tragédie. Reporterre a suivi Moraree, une femme d'environ 70 ans, elle a fait des dizaines de kilomètres à pied, avec son petit-fils de 4 ans (plus ou moins), pour obtenir 22 euros de la part du Programme alimentaire mondial (PAM).
L'enfant n'a jamais vu la pluie, ou presque. Les champs de sa famille sont désespérément secs. Les cultures de manioc et de maïs sont un lointain souvenir. Avec les quelques ariary offerts, la famille va acheter à prix d'or un peu de riz. Un kapoaka, soit 290 grammes, est vendu 0,44 centimes d'euro. Une fortune ! Les familles sont nombreuses et en une semaine, les 22 euros ont presque été engloutis dans l'achat de quelques denrées essentielles. Moraree, résume la situation, le plus simplement du monde, sans larmoyer : "On est en train de mourir de faim, mais aussi du manque d’eau". Ce portrait, illustre la vie de plus d'1 million 700 000 Malgaches.
Amnesty souhaite une mobilisation internationale
Le rapport publié, le 27 octobre 2021, par Amnesty International s'intitule : "Il sera trop tard quand nous serons mort". Les experts de l'Organisation non gouvernementale ont analysé les causes de la famine qui frappe le Sud de Madagascar. La conclusion est simple. La sécheresse est liée au changement climatique. Elle illustre les conséquences de la hausse des températures mondiales. L'augmentation d'un degré semble anodine et pourtant, elle a impact sur la circulation des flux atmosphériques et océaniques.
À quelques semaines de la COP26, Amnesty International vient rappeler que l'action ou l'inaction ne sont pas sans conséquence. Elle demande aux pays industrialisés :
- à s’engager en faveur d’objectifs de réduction des émissions à la fois ambitieux et respectueux des droits humains, afin de maintenir l’élévation de la température moyenne de la planète en dessous de 1,5°C ;
- à s’engager à abandonner rapidement les énergies fossiles, au lieu de compter sur des mesures de compensation qui retardent l’action pour le climat et risquent d’avoir des conséquences néfastes pour les droits fondamentaux ;
- à mettre en place un mécanisme mondial pour soutenir les personnes dont les droits ont été affectés, les États riches en assurant le coût via un financement nouveau, additionnel et non assujetti à un remboursement ;
- à garantir le droit à l’information et à la participation concernant les prises de décisions liées au climat pour les personnes affectées à tous les niveaux.
Les pollueurs doivent payer
La formule du pollueur payeur est facilement acceptée, quand il est question de notre environnement immédiat. Elle est plus difficilement admise quand il est question d'incidences lointaines. Pourtant, ce rapport laisse peu de place au doute. Les experts d'Amnesty sont catégoriques et de souligner : "Les pays qui ont le plus contribué au changement climatique, sont ceux qui ont le plus de ressources disponibles pour fournir une aide financière et technique". Ils pointent l'urgence actuelle, mais également à venir, "L’objectif et d’aider les personnes à Madagascar à mieux s’adapter aux conséquences du changement climatique, notamment aux épisodes de sécheresse de plus en plus longs et intense", écrit 2424.mg.
Le PAM (Programme Alimentaire Mondial) estime, en octobre 2021, : "Que 1,14 million de Malgaches vivant dans le Sud subissent des niveaux élevés d'insécurité alimentaire aiguë".