Maurice: le Premier ministre sortant concède sa défaite aux législatives

L'ancien Premier ministre Navin Rangoolam, lors du vote, dimanche 10 novembre. Il pourrait retrouver son poste à la faveur de ces élections législatives.
Le Premier ministre mauricien sortant Pravind Kumar Jugnauth a reconnu lundi sa défaite aux législatives, marquées par des inquiétudes à propos de la stabilité politique et économique d'une des démocraties les plus stables et les plus riches d'Afrique. L'ancien Premier ministre Navin Ramgoolam pourrait retrouver son poste.

Les résultats partiels lundi 11 novembre à la mi-journée annoncent une victoire de l'Alliance du changement menée par Navin Ramgoolam, chef du Parti travailliste âgé de 77 ans et ancien Premier ministre (1995-2000 et 2005-2014). "Nous allons vers une défaite, et c'est encore plus clair que l'Alliance Lepep (qu'il dirigeait pour les législatives) va vers une grande défaite pour l'ensemble", a déclaré à la presse Pravid Kumar Jugnauth, 62 ans. "La population a choisi une autre équipe. Je lui souhaite bonne chance", a-t-il ajouté. 
   

Le poids du scandale des écoutes

Praving Jugnauth

Le Premier ministre sortant s'était présenté fort de la conclusion début octobre d'un accord "historique" entre Maurice et Londres sur la souveraineté de l'archipel des Chagos, vu comme un succès majeur pour le gouvernement mauricien après plus d'un demi-siècle de litige. Mais son espoir de profiter de cet accord dans les urnes a été rapidement douché lorsque des extraits de conversations téléphoniques d'hommes politiques, membres de la société civile, diplomates et journalistes ont fuité sur les réseaux sociaux courant octobre.
   

En réaction, les autorités ont annoncé le 1er novembre le blocage des réseaux sociaux jusqu'au lendemain du scrutin, avant de se raviser face à l'indignation de l'opposition et des médias. 
 

Inquiétude

L'initiative malheureuse a encore ajouté à l'inquiétude de certains observateurs qui voient à Maurice des signes d'érosion démocratique. Pendant une campagne dynamique, parfois houleuse, les deux camps ont promis des mesures pour améliorer le quotidien des Mauriciens face à la hausse du coût de la vie malgré une forte croissance.
"Le peuple attend cette libération", avait lancé Navin Ramgoolam dimanche.

Ramgoolam et Jugnauth sont membres de dynasties qui ont dominé la politique mauricienne depuis l'indépendance obtenue du Royaume-Uni en 1968. Ils ont par ailleurs affronté une alliance qui se présente comme une alternative avec le slogan "Ni Navin, ni Pravind", et critique la corruption et le népotisme dans l'archipel.
   

Des policiers avaient été déployés dans les bureaux de vote à travers le pays pour assurer la sécurité des opérations, tandis que des observateurs internationaux ont surveillé le scrutin.

Forte participation

Les résultats définitifs sont attendus dans la journée. La participation du million d'électeurs inscrits devrait tourner autour de 80%, ont indiqué les médias locaux en se basant sur les chiffres de plusieurs bureaux de vote. Au total, 891 candidats sont en lice. Parmi ceux-ci, 62 seront élus députés à l'issue du scrutin. Huit sièges sont alloués par la Commission de surveillance électorale pour assurer l'équilibre dans la représentation communautaire.    

La nation majoritairement hindoue a connu une stabilité et une croissance remarquables depuis l'indépendance, bâtissant son économie sur le tourisme, les services financiers et le textile. La croissance du PIB a été de 7% en 2023, mais les analystes estiment que l'île doit diversifier son économie et s'inquiètent de la mauvaise gouvernance et de la corruption en hausse.   

L'île est célèbre pour ses plages spectaculaires de sable blanc bordées de palmiers et ses eaux turquoises, qui ont attiré 1,3 million de visiteurs l'an dernier.   

L'accord sur les Chagos

L'accord avec le Royaume-Uni sur l'archipel des Chagos a été un succès majeur pour le gouvernement sortant. Le texte prévoit toutefois que "pendant une période initiale de 99 ans", Londres sera "autorisé à exercer des droits souverains" sur la base militaire américaine qui s'y trouve, sur l'île de Diego Garcia. Des observateurs ont suggéré que la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine pourrait menacer l'accord.