Plan national de lutte contre la haine LGBT+ : "c'est une avancée" estime la communauté queer à La Réunion

Xylric Lépinay, président de l'association Orizon
Le 10 juillet, le gouvernement a présenté un plan de lutte contre la haine et les discriminations LGBTQIA+ pour les années 2023 à 2026. La communauté LGBT+ l'accueille volontiers, beaucoup de progrès étant encore à faire dans ce domaine.

Le 10 juillet dernier, la ministre chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Egalité des chances, Isabelle Lonvis-Rome, a présenté un plan national de lutte contre la haine et les discriminations LGBTQIA+.

Le reportage de Réunion La 1ère : 

Plan national contre la haine anti-LGBT : réactions

Parmi ces mesures, l'ouverture de 10 nouveaux centres d'accueil et d'accompagnement des personnes LGBTQIA+ sur le territoire national d'ici 2027, comme celui qui il y a quelques mois a été incendié à Saint-Denis. Un fonds exceptionnel de 10 millions d'euros a été débloqué par le gouvernement pour permettre l'ouverture de ces centres entre 2023 et 2026.

"10 millions d'euros c'est très bien" 

Xylric Lépinay, président de l'association oRizon, s'en réjouit : "10 millions d'euros c'est très bien, plus que ce qui n'a jamais été fait en France jusque-là". 

Idem pour Guillaume Kichenama, l'élu délégué à la lutte contre les discriminations de la ville de Saint-Denis. 

"En tant qu'élu délégué dans cette thématique, c'est une avancée. 10 millions d'euros c'est beaucoup et c'est peu à la fois, car il y a encore beaucoup de chemin à faire pour accompagner la communauté LGBT"

Guillaume Kichenama, élu délégué à la lutte contre les discriminations de la ville de Saint-Denis

Le centre de ressources de Saint-Denis en travaux 

Le centre de ressources LGBTQIA+ de Saint-Denis était là le seul centre de ce type existant en outre-mer. 

"Ce centre est en travaux actuellement, les associations vont le réintégrer et il va rouvrir. En attendant, les associations sont abritées sur le quartier des Camélias. Abdiquer c'est avoir peur, et nous à Saint-Denis nous n'avons pas peur", rassure Guillaume Kichenama, élu dionysien délégué à la lutte contre les discriminations. Les travaux devraient prendre encore plusieurs mois, pour rouvrir en 2024, cette fois-ci "avec des caméras et des patrouilles", souhaite l'élu délégué à la lutte contre les discriminations de la ville de Saint-Denis.

La formation des professionnels, une nécessité

Autre mesure : la formation de professionnels dans plusieurs branches, notamment les gendarmes et policiers qui seront tous sensibilisés dès 2024 aux enjeux d'inclusion et à la lutte contre les actes homophobes. Les agents publics, bénévoles associatifs, animateurs de colonies de vacances, professionnels de santé, intervenants auprès des personnes âgées ou en situation de handicap, personnels de l'enseignement supérieur, etc... bénéficieront aussi dans les prochaines années d'une sensibilisation adaptée à leurs domaines respectifs. 

"Il y a encore des agents publics qui ne sont pas sensibilisés"

Pour Guillaume Kichenama, cette action de formation est absolument nécessaire. "Il y a encore des efforts à faire, de la formation et de la sensibilisation. Il y a des agents publics dans l'Education nationale, dans les collectivités, dans la police ou la gendarmerie, qui ne sont pas sensibilisés", fait-il remarquer. "Quels que soient sa couleur, son orientation sexuelle ou son mode de vie, dans les services publics, on accueille un citoyen français", achève-t-il. 

Donner des outils 

Concernant les sessions de 2h30 de formation adressées aux policiers et aux gendarmes, Xylric Lépinay, le président de l'association Orizon, souligne que "s'il y a des agents homophobes, ça ne changera pas". "En revanche, si ça donne des outils à ceux qui ne savent pas comment s'adresser aux personnes queer, ou leurs problématiques, ça reste des temps de formation corrects pour leur dire l'essentiel", reconnaît-il. 

Former les agents des services publics

Là où cette formation est encore nécessaire, c'est pour les personnels des institutions qui sont en contact avec le public.

"Pour aller faire déclarer des choses aux impôts, ou aller à la mairie, ça peut être compliqué quand on a à faire à des gens qui ne sont pas formés. (...) Ce n'est pas forcément de la discrimination mais de l'ignorance. Les gens ne savent pas quoi faire face à quelqu'un qui a un visage particulier et une autre apparence sur sa carte d'identité. Ce sont des gens qui essaient de faire leur travail, on peut les comprendre" 

Xylric Lépinay, président d'Orizon

Une formation primordiale dans le milieu médical 

Pour les personnels soignants aussi, la formation est là encore essentielle, fait remarquer le représentant associatif.

"On a une surmortalité sur certains types de cancer comme le cancer du col de l'utérus parce qu'il y a une méconnaissance de la sexualité des lesbiennes, et parce que celles-ci ne vont pas forcément se faire soigner ou dépister, par peur d'être discriminé. C'est particulièrement vrai pour les personnes trans" 

Xylric Lépinay, président d'Orizon

Pour certaines personnes, le moment de l'auscultation chez un praticien peut s'avérer être une épreuve délicate, souligne-t-il. "C'est très très important de garder à l'esprit que les gens ne sont pas à forcément à l'aise avec leur corps et n'ont pas forcément envie de le montrer. (...) Il faut que le médecin sache à quel point c'est difficile pour ne pas le prendre personnellement", explique Xylric Lépinay. 

Des mesures "pratico-pratiques" 

Globalement, le président de l'association Orizon salue les mesures du plan national, qui sont "pratico-pratiques", à l'exemple de celle qui permet d'inclure les familles homoparentales dans les formulaires administratifs de l'Education nationale. Le plan prévoit aussi de faire voter une loi qui permettrait d'interdire l'accès aux stades des personnes déjà condamnées pour propos incitant à la haine anti-LGBT.  

Depuis 2016, les crimes et délits anti-LGBT ont augmenté de +129%. Pour Xylric Lépinay, ces dépôts de plainte ne sont pas représentatifs du nombre d'actes commis, qui seraient bien plus nombreux. "Toutes les personnes queer ont été agressées au moins une fois. On sait que tout le monde ne dépose pas plainte", dit le président d'Orizon.