On se sert dans les locaux exigus de l’association SOS homophobie, dans le 12e arrondissement de Paris. Isabelle Lonvis-Rome, la ministre déléguée chargée de l’Égalité femmes hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances, est venue échanger avec les bénévoles et présenter son plan de lutte contre la haine et les discriminations anti-LGBT+. Le plan comporte une centaine de mesures, qui vont de la lutte contre le harcèlement scolaire à une meilleure formation des forces de l’ordre et des personnels médicaux, en passant par l’interdiction systématique de stade pour les supporters condamnés pour incitation à la haine.
"La haine se perpétue, entame Véronique Godet, la coprésidente d’SOS homophobie. Il est urgent non plus de réagir, mais d’agir". Les bénévoles d’SOS homophobie racontent les refus de dépôts de plainte qui se multiplient, "le sentiment d’isolement" des victimes, et "l’agressivité qui monte". Depuis 2016, les actes anti-LGBT+ ont augmenté de 129% en France. Si la parole se libère, les recours en justice restent marginaux : seuls 20% des victimes de menaces ou de violences anti-LGBT+ déposent plainte. Le chiffre chute à 5% pour les victimes d’injures.
Le plan du gouvernement est "un plan de lutte contre la haine, un plan qui vise à mettre fin à l’impunité, qui est encore trop fréquente", explique la ministre déléguée. Dix ans après le mariage pour tous, "on voit encore ces mêmes couples être insultés, humiliés, dans les rues ou sur les réseaux sociaux", continue-t-elle.
10 millions d’euros débloqués
"C’est d’abord un plan de formation massive", explique Isabelle Lonvis-Rome, qui mise sur "la sensibilisation", notamment des policiers et des gendarmes. Outre la formation des forces de l’ordre -qui devrait être effective d’ici mai 2024- le plan prévoit la création de nouveaux centres d’accueil et d’accompagnement des personnes LGBT+. Dix millions d’euros ont été débloqués pour atteindre l’objectif de dix centres supplémentaires d'ici 2027.
Si la ministre déléguée n’a pas détaillé dans quels territoires ils seront implantés, elle estime qu'"il faut que chaque territoire d’Outre-mer soit doté d’un centre d’accueil pour les personnes LGBT+ (...) pour ne laisser personne en dehors du chemin."
Il est important que les jeunes qui annoncent leur homosexualité et sont rejetés soient accompagnés. Ça ne se passe pas de la même façon quand on habite à Paris, à Brive-la-Gaillarde ou à Saint-Denis de La Réunion. Il est important qu’il y ait un accompagnement partout.
Isabelle Lonvis-Rome, ministre déléguée chargée de l’Égalité femmes hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances
Pour l’instant, il n’existe qu’un centre de ce type Outre-mer. Installé à Saint-Denis de La Réunion, il a été vandalisé et incendié en février dernier. Pourtant, l'accompagnement est essentiel dans des territoires insulaires, parfois peu étendus géographiquement, où la parole se libère difficilement.
"L’homophobie et la transphobie sont présentes sur l’ensemble du territoire national. C’est les mêmes mécanismes partout, mais certains territoires demandent une attention particulière", détaille Joël Deumier, le coprésident d’SOS homophobie. Il estime qu’il "faut mettre des centres là où il n’y en a pas", pour accompagner les victimes, mais pas seulement. "La conquête de l’espace public est essentielle", poursuit-il.
Face aux bénévoles qui regrettent le manque de dispositions spécifiques à la transphobie ou qui pointent la présence dans le plan de mesures déjà annoncées, Isabelle Lonvis-Rome répond que "la mise en œuvre sera effective" et nie tout "effet d’annonce".