DOCUMENTAIRE. "Sortir de l'ombre" : être homosexuel en Martinique

Aux Antilles-Guyane, l'homosexualité reste taboue. Pour ne pas être mis au ban de la société, certains préfèrent s'exiler vers la métropole, tandis que d'autres choisissent de se taire. Quelques-uns, toutefois, osent braver le qu'en-dira-t-on, les moqueries, les brimades et les insultes. Des militants engagés dans le milieu associatif livrent leurs témoignages.

De la Martinique à Paris, le documentaire Sortir de l’ombre s'attache à retracer la quête de liberté poursuivie, depuis leur plus jeune âge, par Noam, Brice, Léon, Angel et Alan. Ils sont Martiniquais, leur parcours et leurs histoires sont uniques, pourtant chacun d’eux a depuis toujours été défini par le fait qu'il aime "différemment". 

Pour survivre, ils ont dû pendant longtemps rester invisibles et silencieux, constamment rattrapés par la gravité du regard social qui pèse sur eux. À travers le récit de leurs combats, de leurs passions, de leurs souffrances et de leurs amitiés, ils témoignent aujourd’hui du chemin parcouru vers leur liberté, vers l’affirmation de leur légitimité.

Noam Sinseau

Noam, le stand-up et la danse pour faire passer des messages

Noam s’est fait une place dans le milieu du voguing, cette danse urbaine inspirée des défilés de mode. Cette danse a été créée à New York par la communauté noire LGBT en réaction au racisme et aux discriminations. Il travaille également dans un collège. Depuis un an, il s'est lancé dans le stand-up.

Toute la trame de mon spectacle c'est mon coming out (...) j'essaie de parler de ça avec humour car je trouve important que les jeunes qui m'écoutent y voient un message d'espoir. Même si c'est compliqué aujourd'hui, ça va s'arranger et s'ils veulent prendre le pouvoir sur leur vie, ils peuvent le faire.

Noam Sinseau

Brice Armien-Boudre

Brice, engagé dans la lutte contre l'homophobie

Brice est âgé de 48 ans. Il est le vice-président de l'association Kap Caraibes qui lutte contre toutes les formes de discriminations et plus particulièrement les discriminations homophobes, et venir en aide au public LGBT en difficulté. Il intervient en milieu scolaire et à l'université. 

Léon et Angel

Léon, Alan et Angel 

Léon, Alan et Angel sont de jeunes martiniquais. Ils évoquent la manière dont ils vivent leur homosexualité. Leur orientation sexuelle n'est pas facile à vivre face à la discrimination et aux agressions. Le poids social joue aussi un rôle important au sein de familles antillaises qui tolèrent peu l'expression des différences.

Ma mère n'a jamais accepté mon homosexualité. Pour elle, je suis le diable. Elle m'a dit que Dieu allait me voiler de sa face parce que je n'étais pas dans son chemin. 

Angel

Avec leurs mots, ils racontent leurs souffrances, les rejets dont ils ont pu être victimes, les tourments et les questionnements qui les ont habités à l'heure de l'affirmation de leur choix.

Nadia Chonville, docteure en sociologie

Éclairage sociologique avec Nadia Chonville

Nadia Chonville, docteure en sociologie, souligne que l'homophobie en Martinique trouve son origine dans l'histoire de la colonisation et dans l'importance culturelle des stéréotypes de genre qui valorisent la virilité. Le poids de la famille et son corollaire, la préservation de l'honneur familial, sont d'autant plus prégnants que l'insularité ne permet pas l'anonymat en dehors des centres urbains. Enfin, le poids des convictions religieuses participe à légitimer certains discours homophobes.

Sortir de l'ombre nous rappelle que s'il y a des progrès, la route est encore longue, aux Antilles-Guyane, pour faire valoir les droits des personnes LGBTQIA+ et faire évoluer les mentalités.

Réalisation : Anna Roch
Production Memento avec la participation de France Télévisions
Durée 52 minutes - © 2023